Agriculture-Elie Shitalou : « Au niveau de l'interprofession élevage, nous devons faire un travail en amont de structuration de la production et des producteurs »

© Outremers360

Agriculture-Elie Shitalou : « Au niveau de l'interprofession élevage, nous devons faire un travail en amont de structuration de la production et des producteurs »

Après plusieurs années comme secrétaire général de l'IGUAVIE, l'interprofession de Guadeloupe sur les filières de l'élevage et participant actif au comité sectoriel de l'élevage Elie Shitalou s'apprête à passer le flambeau. De passage à Paris dans le cadre de la  semaine des comités sectoriels de l'ODEADOM Elie Shitalou revient pour Outremers 360 sur la filière de l'élevage ultramarin.

 

Depuis ce lundi 17 avril, l'ODEADOM réunit ces quatre comités sectoriels. Il s'agit de réunions permettant des débats approfondis, filière par filière, quant aux évolutions en cours et autour des politiques publiques en direction des outre-mer. Ces comités sectoriels réunissent représentants professionnels, administrations et experts selon les champs suivants : filière banane, filières canne à sucre (canne sucre rhum), filières végétales diversifiées (hors canne et banane), filières animales. 

Acteur important du comité filière animale, le Guadeloupéen Elie Shitalou dresse sa vision de ce secteur à l'orée de la fin de mandat comme sécrétaire général de l'Iguavie et expert au comité sectoriel  Elevage  de l'ODEADOM.  «En Outre-mer et notamment en Guadeloupe nous avons un retard important par rapport à l'élevage national où l'agriculture nationale. Au niveau national, il y a une production optimisée fruit d'une centaine d'années de structuration avec de véritables professionnels avec des programmes de qualité, des programmes de production aux cahiers de charges bien définis. Nous sortons d'une agriculture datant de la société de plantations avec une usine centrale et des camps de canne autour jusque dans les années 1980. Nous avons vécu une période où il n'y a pas eu beaucoup de vulgarisations, peu d'encadrement pour emmener les agriculteurs à faire des progrès. Dans notre territoire, nous sommes encore dans une politique de tout-venant parce qu'il n'y a pas suffisamment de producteurs à la pointe pour pouvoir mettre en place ces cahiers de charge qualité. En parallèle de cela, il y a des personnes qui profitent de la désorganisation. Il faut revenir à des choses basiques, former les producteurs,  les emmener sur des programmes très simples pour avoir de la production, mettre en place des actions interprofessionels impliquant tous les métiers, du producteur jusqu'au distributeur, que les personnes parlent le même langage. Aujourd'hui, le travail que nous devons faire au niveau de l'interprofession, un travail en amont de structuration de la production et des producteurs.», précise Elie Shitalou à Outremers360.

 Pour parvenir au développement des filières agricoles en Outre-mer, l'ODEADOM est donc un interlocuteur nécessaire pour Elie Shitalou.« Les comités sectoriels sont une occasion de permettre aux professionnels des outre-mer et de nos partenaires nationaux (ODEADOM, les Ministères, les instituts techniques) de se rencontrer. Ces comités permettent également de partager des expériences. Dans ODEADOM, il y a le mot développement que nous oublions souvent. Nous avons besoin dans nos territoires d'une office à la taille de nos agricultures pour nous représente et être notre interlocuteur. Nous avons besoin de cet accompagnement à l'ODEADOM. Le déplacement régulier des équipes de l'ODEADOM dans les territoires d'outre-mer leur permet de comprendre ce que nous vivons».

Une démarche selon Jacques Andrieu, directeur de l'ODEADOM qui s'inscrit dans l'ADN de l'office. « C'est une des missions de l'ODEADOM que d'être un organisme en charge de la  concertation : concertation inter-territoires, concertation entre les représentations et les pouvoirs publics. Il est important de se voir, de se parler. C'est ainsi qu'une fois par an, nous organisons pour tous les secteurs des rencontres dans lesquelles les professionnels peuvent débattre, échanger. L'année dernière, les délégations de La Réunion ont pu se rendre en Guadeloupe, c'est l'une des suites de ces rencontres. Ces comités se tiennent à des moments où d'importants travaux sont appelés, des échéances politiques prochaines, un comité interministériel outre-mer qui se prépare, il est important d'avoir ces concertations, cette écoute de la part des uns et des autres pour comprendre où on va, comment faire avancer les grands objectifs de la souveraineté alimentaire, d'excellence environnementale, de développement du secteur, des filières, de l'agroalimentaire, de l'emploi dans les territoires. Les meilleurs porteurs de ces enjeux sont les représentants des filières les représentants d'organisation ou d'interprofession qui peuvent expliquer la situation de leur territoire, faire comprendre les leviers, les freins, les difficultés de manière très constructive pour dessiner des voies de solutions», ajoute-t-il. 

Le successeur d'Elie Shitalou comme secrétaire général de l'Iguavie est déjà connu. Il s'agit d'Alain Bazir. «C'est un grand honneur de succéder à Elie Shitalou, c'est une personne que j'ai beaucoup respecté et côtoyé lorsque j'étais dans d'autres filières. Je partage la même volonté d'Elie, celle de travailler pour le développement du pays, que le territoire s'approche d'une souveraineté alimentaire. On s'approche de ce plan en misant sur la qualité et en mettant les agriculteurs au centre de nos objectifs».

Alain Bazir et Elie Shitalou © Outremers 360

 

Panorama de la filière diversification animale dans les Outre-mer 

Le développement des filières de l’élevage dans les départements et collectivités d’outre-mer est contraint par un certain nombre d’handicaps par rapport aux conditions rencontrées en métropole :

·         incidences négatives du climat tropical sur les performances d’élevage en raison de températures et de taux d’humidité élevés pendant une grande partie de l’année ;

·         existence de pathologies particulières liées au climat tropical : par exemple, présence de la tique sénégalaise aux Antilles – vecteur de transmission d’hémoparasitoses (piroplasmoses, cowdrioses) et de dermatophiloses.

Ces contraintes d’ordre bioclimatique, auxquelles s’ajoutent les handicaps liés à l’insularité sur le prix des intrants, ont pour conséquence des coûts de production élevés et un manque de compétitivité vis-à-vis des produits importés. Pour lever ces contraintes, un certain nombre d’actions sont menées par l’ODEADOM et l’Union européenne à travers des programmes de soutien aux diverses filières animales.

L’évolution moyenne sur 2011-2019 de la part des interprofessions dans les abattages de bovins est positive dans tous les DOM (+3 points en Guyane, entre +0,3 et +0,6 point dans les autres territoires), de même que le nombre d’adhérents à une organisation de producteurs en Guadeloupe et à La Réunion (respectivement +6 % et +1 %). Le nombre d’adhérents à une organisation de producteurs est en diminution de 3 % en Martinique pour la filière bovin (données non disponibles en Guyane).

L’évolution tendancielle 2011-2019 du nombre d’adhérents et l’évolution moyenne de leur part dans les abattages de la filière ovine-caprine est contrastée suivant les DOM : ils sont en diminution en Guadeloupe (-4% et -2,1 points) et Martinique (-5% et -3,8 points), du fait des difficultés rencontrées par les structures coopératives de ces deux départements, tandis que le nombre d’adhérents à une organisation de producteurs augmente fortement à La Réunion (+13 % sur la période 2011-2019), traduisant la montée en puissance de la coopérative OVICAP.

L’évolution du taux de couverture des marchés sur ces filières est globalement positive, à l’exception de la Réunion. Dans l’ensemble, le nombre d’adhérents des interprofessions porcines est en diminution (de 2% à La Réunion à 4% en Guadeloupe), tandis que la part des abattages dans les interprofessions est stable ou positive (0 point en moyenne annuelle en Guadeloupe, +0,3 point à La Réunion, +0,6 point à la Martinique). Les données de structuration de la filière avicole ne sont pas connues en Guadeloupe et Guyane, où ces filières restent très atomisées, avec un nombre important d’acteurs privés. Cette filière reste relativement bien structurée en Martinique, où l’enjeu est au développement de nouveaux marchés plus rémunérateurs. Son niveau de structuration se développe fortement à La Réunion, où le nombre d’adhérents à une organisation de producteurs est en augmentation de 5 % sur la période 2011-2019 et la part des interprofessions dans les abattages de volailles est en augmentation de 1,4 point en moyenne annuelle sur cette même période.

Un travail important a été fourni dans chaque département sur les aspects de la promotion et de la communication, ainsi que la recherche de nouveaux débouchés, par une plus forte valorisation des produits et une segmentation plus importante des marchés.

(Sources: ODEADOM)