La droite loyaliste de Nouvelle-Calédonie, où Emmanuel Macron a réalisé dimanche l'un de ses meilleurs scores (40,51%), connaît une énième recomposition avec l'émergence d'un pôle « macroniste » et l'isolement de LR, à la veille de discussions cruciales sur l'avenir institutionnel de l'archipel.
Après avoir remporté haut la main (96,5% avec un très fort taux d’abstention) le troisième et dernier référendum de l'accord de Nouméa sur l'indépendance (1998), le 12 décembre dernier, les dirigeants non indépendantistes reprennent les hostilités, un temps mises de côté, à la faveur des élections présidentielle et législatives.
Mercredi, la coalition Avenir en confiance (AEC), majoritaire à droite depuis les élections provinciales de 2019, a en effet éclaté avec la création par 12 de ses 19 membres d'un nouveau groupe « d'Union loyaliste » au Congrès (assemblée délibérante), avec comme figure de proue Sonia Backès, présidente de la province Sud. Dans un communiqué, l'Union loyaliste s'engage à « s'opposer à la politique » du gouvernement local présidé par un indépendantiste mais également à « être une force de soutien à la politique calédonienne mise en œuvre depuis cinq ans par Emmanuel Macron et son ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu ».
Les sept autres élus du groupe AEC, tous étiquetés Rassemblement-LR à l'exception d'un, qui a en cours de mandat rejoint le RN, ont « déploré l'ingérence d'échéances nationales, qui viennent rompre une unité qui avait fait sens depuis 2019 », stigmatisant « des divisions instrumentalisées par Paris ». Pour autant, le parti Rassemblement-LR, émanation du RPR de Jacques Lafleur, n’avait pas hésité à officialiser ses propres candidatures pour Legislatives, au détriment de ses partenaires de l’Avenir en Confiance.
Convertis au macronisme
Cette mise à l'écart du Rassemblement-LR intervient après que Valérie Pécresse n'a recueilli, lors du premier tour de la présidentielle, que 5,88% des voix dans ce bastion historique de la droite gaulliste. François Fillon avait obtenu 31,13% en 2017, tandis qu'en 2012 Nicolas Sarkozy y était plébiscité avec près de 50% des voix dès le premier tour.
Les loyalistes calédoniens se sont convertis en masse au macronisme notamment depuis que le président sortant a maintenu l'organisation du référendum à la date du 12 décembre, tenant tête aux indépendantistes, qui en réclamaient le report à cause de la crise sanitaire et ont refusé d'y prendre part. « Macron a contribué à recomposer le paysage politique local en vampirisant non seulement l'électorat de droite mais également celui d'extrême droite », observe Pierre-Christophe Pantz, docteur en géopolitique.
Marine Le Pen avait explosé les compteurs lors de la présidentielle de 2017, arrivant juste derrière François Fillon au premier tour (29,09%) et récoltant 47,43% au second. A l'époque, seul le parti de centre droit Calédonie Ensemble avait appelé à voter pour Emmanuel Macron au second tour, les autres partis loyalistes n'ayant pas donné de consignes.
Dimanche dernier, la candidate RN n'a rassemblé que 18,83% des voix, tandis qu'Éric Zemmour en a réuni 9,13%. Mais, le représentant du candidat de Reconquête en Nouvelle-Calédonie, qui siège au sein du nouveau groupe d'Union loyaliste au Congrès, a annoncé qu'il voterait Emmanuel Macron le 24 avril, à contre-courant des consignes d’Éric Zemmour. Le Rassemblement-LR a, de son côté, décidé de laisser le choix à ses sympathisant, s’attirant les foudres des autres formations non indépendantistes.
Épineuses discussions
La scission de l'Avenir en Confiance était prévisible alors que sa frange macroniste s'est récemment rapprochée de Calédonie ensemble, après des années de mésentente. Ce parti de centre-droit, qui a 6 élus au Congrès et trois parlementaires (UDI) sur quatre, s'était rallié à Emmanuel Macron dès le second tour, en 2017.
En vue des épineuses discussions qui vont s'ouvrir avec les indépendantistes sur l'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie, les leaders loyalistes pro-Macron ont annoncé vouloir « unir leurs forces pour négocier la sortie de l'accord de Nouméa ». « Le soutien à la candidature d'Emmanuel Macron, à la manière dont il a géré le dossier calédonien et à son projet pour l'avenir institutionnel permettent de dépasser les clivages traditionnels » entre non indépendantistes, a déclaré à l'AFP le député Philippe Dunoyer (Calédonie ensemble, UDI).
Ce rapprochement entre Calédonie ensemble et une fraction de l'AEC devrait se confirmer lors des élections législatives. « On sera d'autant plus forts à la table des discussions si on a deux députés qui sont dans la majorité présidentielle », a déclaré Sonia Backès, espérant une réélection d’Emmanuel Macron.
Avec AFP.