Après une première séance houleuse, les élus du Congrès sont tombés d’accord, ce jeudi 19 octobre, sur la proposition de loi du pays pour réformer le Ruamm, après une matinée de négociations et l’ajout de 14 amendements. Un consensus salué par l’ensemble des groupes, en attendant la fixation des taux de cotisation, qui fera l’objet d’une délibération future. Détails avec notre partenaire Les Nouvelles Calédoniennes.
Au lendemain de sept heures de séance achevée sans le moindre accord, c’est dans un étonnant "esprit de consensus et d’unité" que les élus du Congrès ont pris place dans l’hémicycle, ce jeudi 19 octobre. Le résultat d’une matinée de négociations entre les différents groupes politiques, qui a pris fin quelques minutes avant l’ouverture de la séance, en début d’après-midi. Ces discussions ont permis de "trouver les équilibres sur la loi du pays de réforme du Ruamm en prenant en compte les propositions de chacun", pouvait-on lire dans un communiqué signé de la main des six présidents de groupes.
"Moment décisif pour l’avenir du pays"
"Parti comme c’était parti hier, c’était fin mal barré, a lâché Pierre-Chanel Tutugoro, président du groupe UC-FLNKS et Nationalistes. C’était important, malgré les différences de points de vue, qu’on puisse se retrouver sur ce texte." Même satisfaction du côté des élus non-indépendantistes, qui ont vanté une "très bonne méthode de travail", selon Françoise Suve, présidente du groupe Loyalistes.
"On espère que la suite se fera dans le même contexte que ce qui a prévalu depuis hier après-midi", a repris la présidente du groupe Rassemblement, Virginie Ruffenach. "C’est un moment décisif pour l’avenir de notre pays, ces petits pas sont très importants", a salué pour sa part Jean-Pierre Djaïwe, à la tête du groupe Union nationale pour l’indépendance, tandis que Philippe Gomès, de Calédonie ensemble, s’est dit "heureux de ce dénouement peu envisageable il y a 24 heures".
L’abattement pour les secteurs aidés maintenu
Ce "consensus" s’est matérialisé par l’ajout de 14 amendements au projet de loi du pays, qui vise à repenser le financement du Ruamm, plombé par une dette abyssale (26 milliards de francs) et un déficit structurel (de 10 à 14 milliards). Parmi ces différentes modifications, les élus ont acté l’abrogation de l’article 7, qui prévoyait la fin du dispositif d’abattement des secteurs aidés. "Il était important de ne pas aller tout de suite à la suppression de ce dispositif et de continuer à travailler sur cette mesure", a expliqué Virginie Ruffenach. Cet abattement de 75 % de charges patronales et salariales a toutefois été délimité, dans un second amendement, aux salaires en dessous de 24 SMG annuels, soit les revenus inférieurs à 330 068 francs par mois.
Autre nouveauté : les élus ont acté la "participation symbolique" des Calédoniens de 100 francs par boîte de médicaments remboursables délivrée. Une mesure qui permettrait de rapporter "370 millions de francs par an" et pourrait inciter à "un comportement responsable" des patients. Les élus non-indépendantistes sont également parvenus à insérer dans la loi un article pour que le gouvernement adresse, dans un délai de six mois, un rapport sur la dématérialisation des feuilles de soins et la création d’un numéro unique de protection sociale.
Deux milliards d’économies
Ajoutés à l’instauration d’un jour de carence pour les fonctionnaires et à la diminution à 10 % du taux de prise en charge du petit risque, ces différents amendements ont convaincu les groupes initialement opposés au texte à voter sa nouvelle version. "C’était important de trouver des pistes d’économie", estimées à "deux milliards de francs", a indiqué François Suve.
Le texte a été voté à l’unanimité des membres présents. Seule Maria-Isabelle Saliga-Lutovika, ex-Eveil océanien, s’est abstenue. "Cette réforme représente un progrès social pour notre pays et une lueur d’espoir, a réagi Milakulo Tukumuli, rapporteur du texte et membre du groupe de l’Éveil océanien. Ce texte était a fait descendre du monde dans la rue il y a quelques mois, aujourd’hui c’est lui qui nous rassemble."
Quid des taux de cotisations ?
Cette séquence ne marque toutefois pas la fin des discussions. D’autres sujets à venir promettent des débats mouvementés au Congrès, en particulier la fixation des taux de cotisation, mesure phare du futur financement du Ruamm. Un point sur lequel "nous nous montrons très vigilants", a prévenu Virginie Ruffenach, appelant néanmoins à garder "le même état d’esprit vers un chemin commun". Le projet de loi prévoit un taux de cotisation unique des patentés à 13,5 %. "Aller au-dessus de 10 % est une erreur", a insisté Gil Brial, du groupe Loyalistes.
Mardi, Milakulo Tukumuli a ouvert la voie à un abaissement à 7 % pour 17 000 patentés qui gagnent moins de 2 SMG par mois. Les taux de cotisation seront définis lors de la délibération d’application de la loi, qui doit passer devant le Congrès avant le 31 décembre.
Par Baptiste Gouret pour Les Nouvelles Calédoniennes