Nouvelle-Calédonie : Le projet d’accord de Bougival au cœur des discussions politiques menées par Naïma Moutchou

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Nouvelle-Calédonie : Le projet d’accord de Bougival au cœur des discussions politiques menées par Naïma Moutchou

Le deuxième jour de visite de la ministre des Outre-mer était consacré, ce mardi, aux discussions bilatérales sur l’avenir institutionnel, et plus particulièrement sur le projet d’accord de Bougival, rejeté par le FLNKS, première délégation reçue ce matin, suivi des autres délégations politiques, indépendantistes et non indépendantistes. Récit de la journée avec nos partenaires des Nouvelles Calédoniennes.

Dans le cadre de ces discussions bilatérales consacrées à l’avenir institutionnel, la ministre des Outre-mer a reçu ce mardi, l’ensemble des forces politiques calédoniennes. Une journée qui s’est ouverte par le FLNKS, seuls élus à avoir rejeté l’accord de Bougival et à qui la ministre consacre toute la matinée. Puis dans l’après-midi, ce fut au tour des indépendantistes de l’Union nationale pour l’Indépendance (Uni), puis des Loyalistes, du Rassemblement, de Calédonie ensemble et enfin de l’Éveil océanien.

Pour le Rassemblement, « la Calédonie ne se relèvera pas sans un accord qui fédère »

La délégation du Rassemblement emmenée par Alcide Ponga, Pascal Vittori et Virginie Ruffenach, a estimé, à l'issue de son entretien avec Naïma Moutchou, que la ministre a « rapidement saisi l'ampleur des enjeux »« Elle comprend que la Calédonie est à bout de souffle et qu'il nous faut avancer, notamment politiquement », juge Virginie Ruffenach, pour qui « on ne peut plus procrastiner », sur le travail autour de l'accord de Bougival « car la Calédonie ne se relèvera pas si nous n'avons pas un accord qui fédère et qui dresse des perspectives pour l'ensemble des habitants de notre territoire. »

La cheffe du groupe Rassemblement au Congrès regrette néanmoins la position du FLNKS qui a affirmé, encore ce mardi matin, « ne pas changer de cap » (lire ci-dessous). « Je comprends qu'il n'y a pas vraiment de volonté de travailler sur Bougival de la part du FLNKS. J'aurais espéré qu'il en soit différemment, mais semble-t-il, il n'y a pas une grande volonté d'essayer de travailler et d'avancer pour permettre l'accord des Calédoniens, et c'est la question que nous nous sommes toujours posés : le FLNKS, aujourd'hui, dans sa nouvelle composition, veut-il vraiment un accord pour la Nouvelle-Calédonie ? Je crains que non. »

Quant aux revendications de l'Uni « d'améliorer » certains points du texte de ce projet d'accord, sur le transfert des compétences ou l'autodétermination, le Rassemblement apprécie que « chacun s'exprime pour essayer de trouver un chemin ensemble », mais reste frileux à certaines nouvelles concessions. 

« C'est une discussion que nous devons avoir. Mais pour être très francs, et nous l'avons déjà dit : les partisans de la France ont fait des pas très importants dans le cadre de l'accord de Bougival », poursuit Virginie Ruffenach. « Nous avons avancé sur beaucoup de choses, et donc notre marge de manœuvre n'est pas grande aujourd'hui, parce qu'il va bien falloir qu'une majorité de Calédoniens votent cet accord. Or les Calédoniens ont choisi à trois reprises le non à l'indépendance majoritairement. »

Les Loyalistes s'abstiennent de tout commentaire

La délégation des Loyalistes, composée de Sonia Backès, Nicolas Metzdorf et Gil Brial est restée près d'une heure avec la ministre des Outre-mer. En revanche, ces représentants n'ont pas souhaité réagir à l'issue de cet entretien, laissant entendre vouloir éventuellement communiquer ultérieurement, à l'issue de cette séquence ministérielle. Notamment si d'autres rencontres autour de l'avenir institutionnel s'organisent d'ici-là avec Naïma Moutchou. 

Pour l'Uni, il faut encore « améliorer » l'accord de Bougival

La délégation de l'Uni était emmenée par Victor Tutugoro (UPM), Adolphe Digoué (Palika) et Jean-Pierre Djaiwé (Palika), qui a pris la parole à l'issue de cet entretien, assurant continuer de soutenir l'accord de Bougival et vouloir continuer le travail avec les non-indépendantistes, mais aussi le FLNKS, mais en comptant « améliorer le texte sans toucher à l'équilibre général ».

Parmi ces points à faire évoluer le transfert des compétences régaliennes à la Nouvelle-Calédonie. « Dans l'accord de Bougival, il faut qu'un groupe du Congrès dépose une résolution, que cette résolution soit adoptée par 36 élus, et une fois que cette résolution est adoptée, un groupe de travail se met en place pour voir les modalités, notamment juridiques, financières, techniques, et ensuite, si ce travail est finalisé avec l'État, avec des représentants du Congrès, des autorités politiques et coutumières dans la Nouvelle-Calédonie, ce projet est soumis au peuple, par un référendum », détaille Jean-Pierre Djaiwé. « On a donc dit à la ministre qu'il faudrait préciser, si on n'arrive pas au niveau du Congrès à trouver cette majorité de trois cinquièmes, que l'État puisse l'organiser comme ce qui est prévu dans l'accord de Nouméa. »

Par ailleurs, en cas de transfert des quatre compétences régaliennes « restantes » à la Nouvelle-Calédonie, « pour nous, la rétrocession des dernières compétences équivaut à l'accession du pays à la pleine souveraineté. Et il faudrait que l'État dise par quel acte juridique l'État acte le fait que la Calédonie devienne un pays souverain. »

FLNKS : « Le cap ne change pas »

Le FLNKS a été reçu au haut-commissariat à partir de 9h30. La délégation, composée des membres de l’Union calédonienne Pierre-Chanel Tutugoro, Oriane Trolue et Dominique Fochi, de Marie-Pierre Goyetche (Parti travailliste), de Laurie Humuni (RDO) et de Jean-Marie Ayawa (Dus), est restée plus de deux heures à la table des discussions, soit le double du temps censé être accordé aux autres délégations.

« Aujourd’hui, la nouvelle ministre arrive et c’est un premier contact pour lui rappeler la méfiance du FLNKS et la perte de confiance dans l’État, depuis tout ce qui s’est passé depuis le 12 décembre 2021 (et le troisième référendum, ndlr). Pour autant, on a dit qu’il fallait continuer le dialogue », glisse Dominique Fochi, pour qui de nombreux sujets ont été évoqués, dont le retour des « prisonniers politiques » et pour lesquels le Front attend des « réponses concrètes ».

Quant au projet d’accord de Bougival, signé par la délégation de juillet dernier -qui n’est plus celle qui négocie actuellement avec l’État- puis finalement rejeté par les représentants du FLNKS, la position du mouvement n’a pas évolué : « le cap ne change pas et notre message est toujours le même », martèle Dominique Fochi. « On veut sortir du gouvernement de la République pour pouvoir établir des liens solides, que ce soit avec les pays de la région, ou même avec la France. »

Anthony Tejero pour Les Nouvelles Calédoniennes