Nouvelle-Calédonie : « Il faut que la Nouvelle-Calédonie s’aide aussi elle-même » estime Emmanuel Moulin

©Anthony Tejero / Les Nouvelles Calédoniennes

Nouvelle-Calédonie : « Il faut que la Nouvelle-Calédonie s’aide aussi elle-même » estime Emmanuel Moulin

Au terme de sa visite sur le Caillou, le délégué interministériel chargé d’accompagner la Nouvelle-Calédonie dans sa reconstruction a réaffirmé que le pays devra engager dès l’an prochain de nombreuses réformes, notamment sur le plan fiscal, pour bénéficier en contrepartie du soutien financier de l’État. Un sujet de notre partenaire Les Nouvelles Calédoniennes.

« Dans toute crise, il y a une opportunité », lance Emmanuel Moulin, délégué interministériel chargé d’accompagner la Nouvelle-Calédonie dans sa reconstruction, qui achève une visite d’une semaine sur le Caillou. Et en l’occurrence, cette opportunité concerne avant tout de nombreuses réformes à mettre en place rapidement dans le pays. Condition sine qua non pour bénéficier des aides de l’État, dont l’extension du prêt garanti pour un montant total de 120 milliards de francs (pour la période 2025-2027).

« Ce prêt devra servir à la Nouvelle-Calédonie à faire face à ses obligations, mais surtout à engager des réformes car avant le 13 mai, le territoire était déjà sur une trajectoire insoutenable, à travers une accumulation de déséquilibres : le déficit du Ruamm de l’ordre de 15 milliards, d’Enercal, société en quasi-faillite, de la filière nickel dont la solution proposée par l’État (à savoir le pacte du nickel) n’a pas été acceptée, etc », liste, sévère, Emmanuel Moulin. « Il faut que la Nouvelle-Calédonie s’aide aussi elle-même. Elle ne peut pas compter que sur la Métropole, qui a un déficit de 6 % et qui demande beaucoup d’efforts à ses concitoyens, pour un système qui n’est pas soutenable et qui est une voie sans issue ».

Le plan S2R, « un accord très équilibré »

Autrement dit, le pays doit adopter « une vision » nouvelle sur le plan social, fiscal ou encore administratif (qui se traduit notamment par une baisse de la masse salariale publique) pour le représentant de l’État, qui perçoit d’un bon œil l’instauration du plan S2R (sauvegarde, de refondation et de reconstruction) porté par le gouvernement. Un « accord équilibré obtenu par Louis Mapou et très favorable » pour le pays avec une « progressivité » de l’instauration des différentes mesures. Emmanuel Moulin a notamment demandé, lors de cette visite, que les réformes de la TGC entrent en vigueur au 1er juillet prochain et celle de la CCS (contribution calédonienne de solidarité) d’ici fin mars.

27 milliards de francs à débloquer d’ici la fin de l’année

Ce plan S2R est d’ailleurs le prérequis aux déblocages des nouvelles aides de l’État. Autrement dit, si les élus du Congrès ne votaient pas ce texte, cette décision remettrait complètement en cause les financements de la France, assure Emmanuel Moulin. D’ici-là, les élus du boulevard Vauban seront appelés à voter le 11 décembre une autre tranche d’aides pour un montant de 27 milliards de francs (dont près de 20 milliards dédiés aux provinces et aux communes).

Cette visite d’Emmanuel Moulin était aussi l’occasion de lancer la préfiguration du comité interministériel chargé de la reconstruction de la Nouvelle-Calédonie qui permettra notamment de coordonner l’action et l’expertise des différents ministères au sein d’une seule et même entité. Un comité appelé donc à se rendre de nouveau sur le Caillou l’an prochain pour accompagner dans la durée la reconstruction et la relance de l'économie tout en fléchant les différentes aides financières de l’État au bénéfice des collectivités et des entreprises.

Et si le gouvernement Barnier tombe ?

Les financements débloqués par l’État, dont l’extension du prêt garanti, sont désormais suspendus à l’adoption de ce PLF (programme de loi de finances) 2025 au niveau national. Si le Premier ministre Michel Barnier décide de le passer en force avec le 49.3 et que derrière, une motion de censure est votée à son encontre, son gouvernement tombe et les annonces d’aides de la France pour la Nouvelle-Calédonie deviendront alors caduques.

Si les représentants de l’État ne se projettent pas dans ce scénario, cette éventualité ne peut pas être pour autant exclue. Quels seraient alors les leviers encore possibles pour aider le Caillou dans l’urgence, avant de renégocier les aides avec le futur gouvernement ?

Dans une telle situation, « il n’y aura pas un problème seulement pour la Nouvelle-Calédonie s’il n’y a pas de budget au Parlement, mais pour toutes les composantes de notre pays », juge déjà bon de rappeler Emmanuel Moulin, laissant entendre que certains financements pourraient tout de même être débloqués pour le Caillou : « Après, on peut faire voter une loi de mobilisation de ressources, de levée des impôts, qui peut comprendre aussi des éléments notamment pour continuer le fonctionnement de certains dispositifs ».

Anthony Tejero pour Les Nouvelles Calédoniennes