Le fonds souverain norvégien exclut Eramet pour risques environnementaux et violations de droits humains

©Adlun Fiqri / Ej Atlas

Le fonds souverain norvégien exclut Eramet pour risques environnementaux et violations de droits humains

Le fonds souverain norvégien a décidé vendredi d’exclure le groupe minier français Eramet -maison-mère de la Société Le Nickel en Nouvelle-Calédonie- de son portefeuille, invoquant des risques de violations des droits des populations autochtones et des dommages environnementaux liés aux activités d’une mine de nickel en Indonésie.

Chapeauté par la Banque centrale norvégienne et alimenté par les énormes revenus énergétiques de la Norvège, le fonds souverain norvégien est le plus important au monde, pesant plus de 20 000 milliards de couronnes (près de 2 000 milliards de dollars) avec des parts dans quelque 8 500 entreprises à travers le globe.

« Le comité exécutif de Norges Bank a décidé d’exclure la société Eramet SA en raison d’un risque inacceptable que celle-ci contribue à, ou dont elle est elle-même responsable, de graves atteintes à l’environnement et de violations flagrantes des droits humains », a indiqué le fonds dans un communiqué. Au 30 juin, le fonds détenait une participation de 0,44 % dans Eramet, évaluée à environ 6,8 millions de dollars, selon ses données. 

La décision a été prise sur la base d’une recommandation du conseil d’éthique du fonds, qui a cité « un risque inacceptable » lié au fait que l’entreprise soit à l’origine ou contribue à des dommages environnementaux, et à des « violations graves des droits humains de populations autochtones isolées ».

Plus précisément, le conseil a pointé « la participation d’Eramet dans la société commune (entre le groupe indonésien Antam et la société singapourienne Strand Minerals, NDLR) PT Weda Bay Nickel, qui exploite du nickel sur l’île de Halmahera, en Indonésie ». WBN indique représenter 17 % de la production mondiale de nickel en 2023. Critiquée pour ses effets sur la forêt environnante, cette mine s’étend sur 45 000 hectares sur cette île de l’archipel des Moluques, à l’est du pays.

Selon le conseil d’éthique du fonds souverain norvégien, l’exploitation minière entraîne la déforestation de zones de forêt tropicale et « la perte d’habitats essentiels pour des espèces menacées et endémiques », tout en menaçant la survie de populations autochtones vivant « en isolement volontaire ».

Eramet a déclaré « regretter profondément » la décision du fonds. « En tant qu’actionnaire minoritaire (de WBN), Eramet s’efforce de promouvoir les meilleures pratiques en matière d’exploitation minière, de gestion environnementale et de responsabilité sociale auprès de ses partenaires, conformément aux valeurs et à l’engagement du groupe en faveur d’une exploitation minière responsable », a assuré le groupe.

Une enquête de l’AFP menée en juin a montré les effets sur les membres de l’une des dernières communautés de chasseurs-cueilleurs isolées du pays, la tribu indigène des Hongana Manyawa. Cette communauté affirme que la forêt dont elle dépend depuis toujours pour se nourrir et s’abriter est détruite par la déforestation et la dégradation de l’environnement liées à la mine. WBN rejette les allégations et affirme s’engager en faveur d’une « exploitation minière responsable et de la protection de l’environnement ».

L’organisation de défense des droits des peuples autochtones Survival International a salué la décision du fonds souverain norvégien, qui coïncide avec la saisie par les autorités indonésiennes de 150 hectares de la concession empiétant sur des zones forestières sans permis.

« L’entreprise est désormais aussi toxique que ses activités minières, et nous appelons tous ses autres actionnaires à se désengager également, tant qu’une zone interdite d’accès (destinée à protéger) les Hongana Manyawa n’aura pas été instaurée », a déclaré à l’AFP Caroline Pearce, directrice de l’ONG.

Avec AFP