INTERVIEW. Nouvelle-Calédonie -Yann Caron, directeur de l'IEOM : « L’épargne ‘‘forcée’’ a conduit à un rattrapage de la consommation »

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INTERVIEW. Nouvelle-Calédonie -Yann Caron, directeur de l'IEOM : « L’épargne ‘‘forcée’’ a conduit à un rattrapage de la consommation »

Fin mars, les Comptes économiques rapides pour l’Outre-mer (Cerom) ont publié un rapport sur les conséquences économiques de la crise sanitaire dans les Outre-mer en 2020. Si l’impact économique pendant la période du premier confinement a été moindre pour les Outre-mer que dans l’Hexagone, la Nouvelle-Calédonie a toutefois accusé le coup avec une baisse de 44% de l’activité, la plus importante constatée. Pour comprendre cet effet, notre partenaire Actu.nc a interrogé Olivier Fagnot, directeur de l’ISEE, et Yann Caron, directeur de l’IEOM.

 

Actu.nc : Si l’impact économique du premier confinement apparaît moindre dans les DOM qu’en métropole, il est toutefois similaire voire légèrement supérieur dans les territoires du Pacifique avec -34% en Polynésie française et -44% en Nouvelle-Calédonie. Pourtant, dans les autres territoires ultramarins, l’impact est moins conséquent. Comment peut-on l’expliquer ? 

Olivier Fagnot : Cette baisse est issue d’une observation réalisée secteur par secteur et cet ensemble constitue l’économie du territoire. Effectivement, c’est en Calédonie que nous constatons le ralentissement le plus important. Mais probablement que l’effet le plus important est dans le secteur de l’administration et des services non marchands qui, habituellement, jouent un rôle d’amortisseurs. Il se trouve que c’est un secteur qui n’a pas forcément subi la crise puisque pendant toutes cette période, les salaires ont été versés. La situation de la Calédonie est très particulière en ce sens que le poids de ce secteur est davantage proche du poids de la France métropolitaine – de l’ordre de 22 à 24% – que du poids constaté sur l’ensemble de l’Outre-mer (plus de 38%). L’effet protecteur de ce secteur s’est fait moins ressentir sur le territoire ce qui explique aussi que le ralentissement ait été plus important sur le territoire.

Actu.nc : Il y a également eu une épargne ‘’forcée» des ménages en raison des restrictions imposées par le confinement. Où se situe la Nouvelle-Calédonie en comparaison des autres Outre-mer ?

Yann Caron : Le confinement en Nouvelle-Calédonie ayant été plus court qu’ailleurs, cette épargne ‘‘forcée’’ a également une dimension qui est directement liée à la durée de ce confinement. Elle est d’une dizaine de milliards de francs CFP sur le territoire. Dans la période qui a suivi, elle a conduit à un effet de rattrapage des différents agents économiques et surtout des ménages qui, finalement, ont eu envie de consommer après avoir été bridés dans la possibilité de consommer pendant un mois. Dans les mois qui ont suivi, ils ont rehaussé leur niveau de consommation. Certains ont même emprunté en crédit consommation un peu plus, ce qui a entraîné un double phénomène de rattrapage. Cette épargne s’est donc très largement consommée pendant cette période.

Actu.nc : Il a également été constaté que cette période a réduit de 3 points le PIB de la Nouvelle-Calédonie, de Mayotte et des Antilles. Pourquoi les autres territoires comme la Guyane, La Réunion ou la Polynésie française – sans parler de la France métropolitaine (5 points) – ont vu le leur réduit de 4 points ?

Olivier Fagnot : L’impact de cet épisode sanitaire sur l’économie d’un territoire dépend de deux facteurs : l’intensité de ce ralentissement et sa durée. La Nouvelle-Calédonie a connu le plus fort ralentissement avec 44%. D’un autre côté, le confinement a été le plus court – 27 jours – contre 55 aux Antilles, à La Réunion… et même 62 jours à Mayotte. C’est ce confinement réduit qui, combiné à l’intensité, fait qu’au final l’impact sur la richesse créée sur l’année 2020 fait partie des moins importants des territoires français.

Propos recueillis par H. C.