C’est un mal souvent invisible et passé sous silence, qui concerne des milliers de Calédoniens. On estime que près de 18 % de la population adulte est illettrée. C’est du moins les seuls chiffres à ce jour connus… qui datent de 2013. Pour tenter d’enrayer ce phénomène et de disposer de données actualisées, un collectif vient de se créer, avec l’objectif d’interpeller les pouvoirs publics sur la nécessité de renforcer la lutte contre l’illettrisme. Un sujet de notre partenaire Les Nouvelles Calédoniennes.
Dans le pays, près d’un Calédonien sur cinq souffrirait d’illettrisme. Des chiffres a priori alarmants qu’il convient néanmoins de nuancer puisqu’ils sont vieux de plus de dix ans, tirés d’une étude de l’Isee (Institut de la statistique et des études économiques) menée en 2012 et dont les résultats ont été publiés en 2013. À l’époque, ce phénomène était deux fois et demie plus marqué que dans l’Hexagone.
Depuis, aucune enquête similaire n’a été produite sur le Caillou (contrairement à la France où le taux est passé de 7 % à 4 % des adultes), signe que le sujet semble s’être éloigné des priorités des pouvoirs publics. Mais c’est sans compter une poignée de bénévoles, qui suivent de près ces questions depuis de longues années, et qui espèrent « faire bouger les lignes » en lançant le collectif Illettrisme NC.
Une initiative qui a été dévoilée à la presse ce lundi 8 septembre, en l’absence notable des membres du gouvernement en charge de l’enseignement ou encore de la formation, comme du vice-recteur. Signe que le chemin s’annonce long avant d’atteindre l'objectif affiché : « ancrer durablement » la lutte contre l’illettrisme, notamment en améliorant le repérage des personnes concernées, pour que cette problématique devienne « l’affaire de tous », y compris dans la sphère professionnelle où des milliers de salariés subissent ce phénomène.
« Dépasser ce sentiment de honte »
« L’illettrisme, il faut en parler pour dédramatiser, pour inciter toutes les personnes qui sont dans cette situation à dépasser ce sentiment de honte qu’ils ont, parce que ce n’est pas une fatalité. Beaucoup de gens s’en sortent, une fois qu’ils décident de prendre ce problème à bras-le-corps. Et nous sommes là pour les aider, pour les mettre en confiance », résume Laurent Calleja, responsable de programme au Giep (groupement pour l’insertion et l’évolution professionnelle).
Il rappelle que de nombreuses actions sont menées à travers tout le pays, notamment au sein des médiathèques, des associations, des centres de formation et même de certaines entreprises. « L’idée du collectif, c’est d’essayer de structurer davantage tout ce travail de lutte contre l’illettrisme et de faire du lobbying au niveau des pouvoirs publics. »
« On a vraiment besoin de savoir où on en est »
Ces bénévoles, dont certains travaillent au sein des institutions, espèrent ainsi que les autorités compétentes débloqueront prochainement des fonds pour mener une nouvelle étude dans le pays et ainsi quantifier l’ampleur du phénomène. Quand bien même les finances des collectivités sont aujourd’hui dans le rouge.
« Le territoire est très grand avec des particularités. Beaucoup de langues différentes sont parlées. Tout le monde n’a pas la même maîtrise du français et ce n’est pas si facile pour certains enfants », tient à rappeler Marie-Christine Cazaly, chargée de mission pour la prévention de l’illettrisme au vice-rectorat. « On a quand même progressé sur cette question, comme sur la formation notamment dans l’enseignement public et privé. Mais aujourd’hui, on a vraiment besoin de chiffres sur lesquels s’appuyer pour savoir où on est. C’est vrai que c’est un coût, mais il nous faudrait cette enquête. »
Note
Le collectif Illettrisme NC est notamment composé de membres de la Croix-Rouge, du Giep, du Fiaf (Fonds interprofessionnel d’assurance formation), de l’École de la Réussite, de l’Ifap (Institut de formation à l’administration publique) ; du vice-rectorat ou encore de la DTEFP (Direction du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle).
Les Nouvelles Calédoniennes