Après s’être entretenu avec les formations politiques lundi 24 février jusque dans la soirée, Manuel Valls avait rendez-vous avec des représentants du monde économique au haut-commissariat. Il a confirmé la prolongation du chômage partiel et le « lancement immédiat » de la reconstruction des bâtiments publics. « L’État doit poursuivre son soutien à la Nouvelle-Calédonie », a assuré le ministre. Explications de notre partenaire Les Nouvelles Calédoniennes.
Face aux organisations patronales et syndicales, entre autres, le ministre des Outre-mer a voulu montrer l’importance qu’il accorde à l’économie, après avoir rencontré les acteurs une première fois à Paris lors d’un Forum sur le sujet le 8 février. « Il ne peut y avoir de relèvement économique sans accord politique, mais il ne peut y avoir d’accord politique durable sans relèvement de l’économie ». Manuel Valls estime donc que « l’État doit résolument poursuivre son soutien à la Nouvelle-Calédonie pour surmonter cette crise ».
Le chômage partiel prolongé jusqu’au 30 juin, mais réduit
Dans son discours, lundi, le locataire de la rue Oudinot a annoncé huit mesures, dont le contenu était cependant déjà majoritairement connu. Rappelant l’enjeu de l’urgence, c’est-à-dire « sortir du marasme économique », avec près de 240 milliards de Fcfp de dégâts, plus de 10 000 emplois détruits et près de 15 000 Calédoniens encore au chômage 9 mois après la crise, Manuel Valls a tout d’abord confirmé, comme déclaré dimanche soir dans une interview sur NC La 1ère, la prolongation du chômage partiel jusqu’au 30 juin.
« Un délai nécessaire pour éviter la casse économique et sociale », a-t-il expliqué, qui doit également permettre aux partenaires sociaux et au gouvernement de finaliser les négociations pour réformer, avant cette échéance, le régime de chômage de droit commun.
Mais l’indemnité sera moins élevée, sachant qu’elle avait déjà été abaissée en janvier, passant de 70 à 50 % du salaire. « La prise en charge du chômage partiel connaîtra ainsi une nouvelle étape de dégressivité, pour la période du 31 mars au 30 juin, afin de réaliser une transition ordonnée avec le nouveau système ». La mesure sera financée via le prêt garanti par l’État de 120 milliards Fcfp.
56 bâtiments à reconstruire dont 16 écoles
Autre annonce : le « lancement immédiat » de la reconstruction des bâtiments publics. Une enveloppe de 24 milliards de francs (200 millions d’euros) y est dédiée. Et 56 bâtiments, dont 16 écoles, sont concernés. Pour l’instant. « Cette liste pourra encore être complétée par la suite si nécessaire », a indiqué le ministre. La prise en charge s’élève à 100 % pour les établissements scolaires. La reconstruction des collèges de Kaméré, Boulari, Auteuil, ou encore la démolition de celui de Rivière-Salée est prévue sur le Grand Nouméa. Pour les autres bâtiments, la prise en charge prévue est de 70 %.
1,8 milliard de plus pour les entreprises
Concernant l’aide aux entreprises, de nombreux dossiers déposés pour une demande d’aide au cas par cas n’ont toujours pas été étudiés. Une somme d’1,8 milliard (15 millions d’euros) supplémentaires sera mobilisée pour y répondre. La commission doit se réunir rapidement afin d’instruire ces dossiers, alors que le guichet ferme le 28 février.
Un mécanisme public de réassurance du risque émeute ?
Le sujet des assurances, hautement sensible et « essentiel », a précisé Manuel Valls, est en discussion. Le ministre a informé de « la mise en place d’une médiation, assurée par la Mission Nouvelle-Calédonie », pour aider les entrepreneurs calédoniens à faire avancer leurs dossiers bloqués auprès des assureurs.
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L’État attend aussi des assurances qu’elles étendent le délai réglementaire d’un an dont disposent normalement les entreprises pour reprendre leur activité après un sinistre. Un travail est également en cours afin d’instaurer un mécanisme public de réassurance du risque émeute au niveau national. Cela devrait aboutir d’ici la loi de finances 2026.
Parmi les autres points évoqués : la prise en charge des opérations inscrites au titre du contrat de développement 2017-2023 qui n’ont pas pu aller à leur terme à cause des évènements de mai 2024 si elles avaient un niveau d’avancement de 70 % ; la poursuite et l’adaptation éventuelle des prêts garantis par l’état à travers la Sogefom (un fonds de garantie qui apporte des garanties partielles à des prêts que les banques accordent aux TPE et PME), sachant qu’une ligne de 3,5 milliards (29 millions d’euros) a été dégagée en loi de finances et pourra être mobilisée.
Une première tranche du prêt de 120 milliards prévue fin mars
Le locataire de la rue Oudinot a fait un point sur les conditions du versement du prêt garanti par l’État, voté dans le cadre de la loi de finances, de 120 milliards de francs. Une première tranche de près de 60 milliards de francs (500 millions d’euros) est censée être approuvée par le conseil d’administration de l’AFD (Agence française de développement) le 20 mars, avant un décaissement à la fin du mois de mars. Ce montant doit servir à « rembourser les avances et couvrir les besoins de trésorerie les plus urgents, notamment pour la prise en charge du chômage », a développé Manuel Valls.
La deuxième tranche du prêt doit intervenir avant l’été (hexagonal, NDLR), mais en contrepartie de réformes, évoquées depuis des années, et pas des moindres. Le ministre a listé les priorités, déjà bien connues : la protection sociale, santé, retraite, et logement social ; la fiscalité ; la baisse des dépenses publiques, ainsi que des mesures pour favoriser la concurrence et la compétitivité. Manuel Valls a été clair sur le sujet : « Nous devons aboutir, avec le gouvernement d’Alcide Ponga, à des engagements clairs sur ces réformes. Des efforts devront être faits, car nous sommes aussi redevables devant les Français de ce soutien financier apporté à la Nouvelle-Calédonie par la communauté nationale. »
A-C P pour Les Nouvelles Calédoniennes