Projet de loi Mayotte : Le préfet déroule la feuille de route des consultations de la population

Projet de loi Mayotte : Le préfet déroule la feuille de route des consultations de la population

Le préfet de Mayotte recevait la presse hier après-midi pour présenter les différents axes de la concertation préalable au projet de loi Mayotte annoncé par Sébastien Lecornu à la fin du mois de mars. Une concertation qui entend placer les mahorais au cœur même de la loi, et qui se déclinera au travers de différentes manifestations tout au long du mois de mai. Quand le gouvernement souhaite impliquer « les forces vives mahoraises » au cœur même du projet de loi... Tous les détails avec notre partenaire France Mayotte Matin. 

Comme l’expliquait Jean-François Colombet en début de conférence, c’est à lui qu’incombe le soin d’organiser les concertations préalables au projet de loi voulu par le ministre des Outre-mer. Un mode opératoire a donc été défini, lequel devait impérativement placer la population de l’île au centre des considérations, la rendant actrice de cette loi qui, selon JFC, pourrait « changer les lignes du 101ème département ». « Il faut qu’avec ce projet de loi Mayotte puisse saisir cette opportunité pour sa transformation dans les prochaines années » déclarait-il, de ce ton solennel qu’on lui connaît si bien. Et au lendemain du 10ème anniversaire de la départementalisation, l’initiative prend un tournant symbolique. « Beaucoup a été fait pour Mayotte mais beaucoup reste à faire » reprenait-il. 

« Un projet sans tabou » décliné en cinq volets 

Les concertations se diviseront ainsi en cinq axes bien définis. Le premier, et probablement l’un des plus importants, s’attardera sur les possibilités en termes de convergence des droits sociaux.

Le second concernera le renforcement de l’État régalien, « pour relever les défis que nous connaissons : l’immigration clandestine, la sécurité publique et la sécurité civile avec en particulier l’existence du volcan à quelques kilomètres de l’île ». 

Le troisième axe portera sur le développement accéléré de Mayotte : il visera les grandes infrastructures, comme la piste longue ou encore la construction du second hôpital, ou encore « tout autre sujet que les mahorais voudront exprimer sur le développement du territoire ». 

Le quatrième axe portera sur le renforcement du Conseil départemental, une décision qui selon le préfet prend tout son sens au lendemain du dixième anniversaire de la départementalisation. 

Le cinquième axe portera sur la jeunesse et l’insertion. « Le ministre souhaite vraiment un projet sans tabou » explique le préfet. C’est pourquoi il entend ouvrir des concertations publiques, afin de faire résonner les voix des mahorais au cœur du projet.

Comment donner la parole à la population mahoraise ? 

Dans les éléments transmis au représentant du gouvernement à Mayotte, le ministre Sébastien Lecornu utilisait la formule : « je souhaite que ce projet de loi soit inspiré, pensé et nourri par les forces vives mahoraises ». Comment alors, trouver ces forces vives et les impliquer dans le processus ? Plusieurs outils seront utilisés par la préfecture afin de mener cette mission à terme. 

En premier lieu, l’organisation de trois forums citoyens où tout un chacun pourra être force de proposition sur les 5 thématiques précédemment évoquées. Ils se tiendront dans le courant du mois de mai à Dembéni, Sada et Tsingoni. Le projet de loi sera présenté, puis la parole sera laissée à la population. Tout sera traduit en shimaoré et en shibushi. 

En parallèle se tiendront des forums institutionnels. Au nombre de cinq, ils seront chacun assignés à l’un des axes du projet de loi, et seront ouverts aux élus, des parlementaires jusqu’au conseil municipal, mais aussi aux associations, aux organisations professionnelles (syndicales et patronales), etc... 

Le but de ces forums sera de recueillir un maximum de propositions, lesquelles seront toutes traitées et considérées. Considérant la date relativement proche de rendu au gouvernement (le 1er juin) la période de concertation sera ouverte dès ce lundi matin au lycée des Lumières, où seront réunis élus et membres du CESEM. 

Parmi les autres outils de concertations, des cahiers seront mis à disposition dans les mairies, où « chaque usager pourra librement noter des propositions pour améliorer le destin de Mayotte », sortes de cahiers de doléances 2.0. Le préfet tiendra également des audiences libres dans plusieurs communes, principalement à destination des collectifs souhaitant faire entendre leur voix. Enfin, des adresses électroniques seront assignées aux différents thèmes pour que chacun puisse émettre des propositions. 

« Une chance historique » ? 

Jean-François Colombet ne faisait que peu de mystères de son enthousiasme à la vue de ce projet somme toute colossal qui initiera de nombreux rendez-vous tout au long de ce mois de mai. « Ce projet de loi, c’est une chance historique pour Mayotte dont il faut se saisir » expliquait-il, en ajoutant que l’objectif visé relevait d’une adoption au conseil des ministres, le calendrier parlementaire étant ce qu’il est. « Ce projet de loi peut changer les lignes à Mayotte, et faire en sorte que dans dix ans nous puissions fêter les 20 années du département en constatant les progrès immenses sur les cinq thèmes qui constitueront le projet de loi » déclarait-il. 

Le changement sera-t-il si concret ? Une loi, aussi mobilisée soit la population dans son établissement - si du moins celle-ci répond au rendez-vous - suffira-t-elle à changer ces lignes apparemment immuables qui constituent la Mayotte que nous connaissons aujourd’hui ? Le préfet semble y croire : « c’est une loi qui peut-être aussi importante que la loi départementalisation », « une circonstance historique qui s’offre à nous » concluait-il. Cela restera à voir... 

Mathieu Janvier pour France Mayotte Matin