Projet de loi de Mayotte : Les élus du Département donnent un avis défavorable au projet de loi tel que présenté

© Département de Mayotte

Projet de loi de Mayotte : Les élus du Département donnent un avis défavorable au projet de loi tel que présenté

Deux projets de délibération d’importance pour le territoire ont été abordés hier par les 26 conseillers départementaux relatifs à l’avis des élus sur le projet de loi Mayotte adressé par le gouvernement au Président Ben Issa le 20 décembre dernier. Un sujet de notre partenaire France Mayotte Matin.

 

Les avis seront unanimes parmi les élus départementaux : le compte n’y est pas mais alors pas du tout. Le président Ben Issa rappellera la genèse de la loi Mayotte et insistera sur l’ambition affichée par le gouvernement pour cette loi, il reviendra sur l’ensemble des contributions que le gouvernement a reçu de la part des mahorais, les élus, la société civile … « Le 27 mai, le conseil départemental a remis un document de 25 pages de propositions et 5 annexes de contributions » explique le président qui se demande où sont passés les éléments car il ne figure pas dans le texte proposé qui ne prend pas suffisamment en compte les attentes des mahorais. Le président Ben Issa dira à ce propos : « Voilà 150 ans que les mahorais savent ce qu’ils veulent. Les propositions des Mahorais sont faites ; nous demandons juste que les propositions soient prises en compte. » Le président regrette que le document n’ait été adressé aux élus que le 20 décembre alors que les vacances avaient commencé et que la tension sanitaire commençait à se faire plus forte. Le contexte a compliqué les échanges, pour autant, ils ont été nombreux, les réunions et les séances de travail aussi. 

La veille de l’examen en séance, le Président Ben Issa avait convié l’ensemble des élus à un échange avec les collectifs de Mayotte pour recueillir aussi l’avis de la société civile, il a souligné la qualité et le niveau des échanges qui démontrent que les mahorais se sont saisis du dossier et ont compris la chance de pouvoir disposer d’une telle loi. Il demandera aussi à l’assistance, un brin défiant, si l’un des élus connaissait une seule personne favorable au projet de loi tel qu’il est écrit ? Hélène Polosek, la présidente du groupe de l’opposition, demandera à ce que l’avis défavorable soit complété par une liste de propositions, le président Ben Issa balaiera d’un revers de main cette demande en expliquant que les contributions ont déjà été données, que formuler encore de nouvelles propositions c’est donner le sentiment au gouvernement que les mahorais ne savent pas ce qu’ils veulent, ce qui est faux. 

Le Vice-président Ali Omar complètera l’argumentation de la majorité « Nous avons voulu être dans la France pour être protégé avant tout, ce texte est aux antipodes de ce que nous attendons aujourd’hui. En Janvier 2000 les mahorais ont eu le souci d’exprimer leur amour à la France, et leur envie de la départementalisation ce qui veut dire entrer et s’aligner sur le droit commun et ce comme tout autre département et région de France et de Navarre » il poursuit son propos en se demandant si le texte n’avait pas été fomenté par des fonctionnaires parisiens n’ayant pas pris la peine de lire les contributions mahoraises. 

Abdoul Kamardine, le conseiller départemental de Mtsamboro poursuivra « Je ne vois rien dans ce qui est écrit qui prouve que les attentes de la population sont prises en compte » il dira aussi « j’ai peur » à propos du titre sur la réforme institutionnelle, que veut dire assemblée de Mayotte ? Il s'interrogera sur la volonté supposée déguisée d’un rapprochement avec les Comores. Pour lui, le texte apporte de la confusion. Daniel Zaïdani donnera une forme de quitus à la position de la majorité en remerciant le Président pour tous les échanges mis en place depuis le 20 décembre sur la proposition de loi et concluera son propos de la manière suivante « La société civile nous a amené hier (mercredi) leurs contributions déjà remises, et j’ai été surpris par leur richesse j’estime que le gouvernement a suffisamment de documents entre les mains pour faire une loi digne de ce nom » Les élus voteront à l’unanimité les deux projets de délibération présentés, les élus de Mayotte affichent donc encore une fois une unité et une convergence de positions politiques. Ils attendent une V2 du texte qui soit à la hauteur des attentes des mahoraises et des mahorais. 
 

Une décision politique qui demande un texte de meilleure facture

Le Président Ben Issa proposera une première délibération en 3 articles pour exprimer un avis global sur le projet de loi présenté. Un premier article donnant un avis défavorable sur le texte. Les élus souligneront que l’idée n’est pas de dire que Mayotte ne veut pas de cette loi. Mais plutôt que Mayotte veut une proposition de loi à la hauteur de l’ambition affichée par le gouvernement pendant toute la phase de préparation et ressemblant aux attentes des mahorais exprimées pendant les concertations et rappelés dans toutes les contributions remises. 

C’est ainsi que l’article 2 de la délibération demande une loi programme de rattrapage économique, social et sanitaire. Pour les élus du Conseil départemental, le texte pour asseoir sa crédibilité doit être assorti d’un calendrier engageant et d’un budget permettant de tracer le chemin à parcourir. L’article 3 vise à demander que la loi prenne en compte les propositions des parlementaires, des maires, des élus du CD, de la société civile pour tendre vers ce rattrapage. Un second projet de délibération est adopté également à l’unanimité, il commente article par article le contenu du projet de loi, des questions, des refus et des rappels de propositions déjà formulées. Le projet de loi doit être présenté en conseil de ministres le 26 janvier, Paris a donc du pain sur la planche. 
 

Par Anne Constance Onghéna pour France Mayotte Matin