Planète : Les cultures illégales, double peine pour la biodiversité de Mayotte

Padzas de Vahibé ©Frédéric Ducarme

Planète : Les cultures illégales, double peine pour la biodiversité de Mayotte

Pour que les cultures clandestines de manioc ou de bananes naissent, les exploitants illégaux doivent d'abord détruire la végétation et les espèces qui y vivaient. Mais, même quand les autorités reprennent la main sur ces terrains pour les replanter, une seconde destruction est nécessaire, ce qui assèche la terre et la biodiversité exceptionnelle de la forêt mahoraise. Un sujet de France Mayotte Matin. 

Ce mardi 16 mars avait lieu l'une de ces opérations qu'on aimerait ne plus voir sur l'île au lagon.Des agents de la Conseil départemental, avec l'appui ponctuel de la DAAF et de l'ONF ont dû détruire 4,5 hectares de cultures illégales de manioc et de bananes. Ces dernières se situaient dans la forêt Majimbini, proche de Combani mais aussi et surtout mitoyenne à la forêt primaire de Mayotte, précieux trésor vert qui est plus ou moins resté vierge de la présence de l'Homme. 

Les agents de la DAAF étaient encadrés par plus d'une dizaine de fonctionnaires de la gendarmerie et de la police au cas où les exploitants illégaux des cultures venaient à réclamer les anciennes parcelles qu’ils cultivaient sans droit ni titre, comme cela s'était passé à Dzoumogné ou Dembéni. 

A Chirongui aussi, les destructeurs de la nature sévissent. En effet, les forces de l'ordre ont récemment interpellé des étrangers en situation irrégulière en train de couper des cocotiers, soit pour en utiliser le bois, soit pour exploiter le terrain. Mais, qu'importe leurs motivations, les personnes ont toutes été arrêtées et placées au centre de rétention administrative en attendant leur expulsion du territoire français. Si les fonctionnaires sont si à cheval sur ces affaires environnementales, c'est parce que l'agriculture illégale détruit la biodiversité mahoraise. Pour planter des arbres fruitiers, il est nécessaire de raser la végétation qui vivait sur place. 

Une végétation adaptée aux fortes précipitations mahoraises 

Le fait est que cette végétation mahoraise s'organise par « étages ». En effet, de grands arbres en abritent de plus petits, qui protègent eux-mêmes des fourrés et des plantes au sol. Avec ce système naturel, les fortes pluies que connaît l'île au lagon sont atténuées à chaque étage pour pouvoir arroser les autres. Quand l'eau arrive au sol, ralentie par les différentes couches végétales, elle pénètre sans souci dans la terre, irriguant les plantes et les nappes phréatiques.

Néanmoins, dès lors que la végétation est détruite par l'Homme, les fortes précipitations foudroient la terre nue. Cette dernière s'effrite et se détache, provoquant parfois des glissements de terrain. Mais là n'est pas le plus important. L'eau ne pénètre finalement pas dans les sols, qui demeurent arides, et deviennent ainsi des terres sèches et dépourvues de végétaux, presque mortes : les fameux padzas. Et cette menace pèse sur les parcelles déforestées par les exploitants illégaux. Une double peine donc, pour ces terrains extrêmement riches du point de vue de leur biodiversité, que les arbres et plantes essentiels mettront longtemps à ré-oxygéner.

Axel Nodinot pour France Mayotte Matin