Océan Indien : Les positions stratégiques françaises des territoires d’Outre-mer à l’épreuve des ingérences étrangères, selon la Délégation parlementaire au renseignement

Océan Indien : Les positions stratégiques françaises des territoires d’Outre-mer à l’épreuve des ingérences étrangères, selon la Délégation parlementaire au renseignement

Au nom de la Délégation parlementaire au renseignement (DPR), l’Assemblée nationale et le Sénat viennent de publier conjointement un rapport public relatif à l’activité de la délégation pour l’année 2022-2023. Consacré aux ingérences étrangères, le document de la DPR fustige particulièrement les tentatives de déstabilisation de la Chine et de la Russie dans l’océan Indien, notamment dans les Terres australes et antarctiques françaises (Tromelin et Îles Éparses) ainsi qu’à Mayotte.

 Chaque année, la Délégation parlementaire au renseignement (DPR) effectue une mission de contrôle et d'évaluation de la politique publique  renseignement à travers de nombreuses auditions et déplacements dans les services, suivis d’un rapport. Pour l’exercice 2022-2023, la DPR s’est focalisée sur les ingérences étrangères, et aux moyens dont disposent les services de renseignement français pour détecter, surveiller et contrecarrer leurs opérations.

Une partie du rapport est consacrée aux positions stratégiques françaises à l'épreuve des ingérences en Afrique australe et dans l'Océan indien. Dans cette optique, les territoires ultramarins de la zone sont concernés au premier plan. Selon la DPR, dont le président, Sacha Houlié, député (Renaissance) de la Vienne et président de la Commission des lois de l'Assemblée nationale, s’est rendu à La Réunion, en Afrique du Sud et à Madagascar au mois d’avril, les actions d’ingérences sont essentiellement le fait de deux pays, la Russie et la Chine, avec des modes opératoires qui leur sont propres.

« Les intérêts français en Afrique australe et dans l'océan indien sont multiples et revêtent une dimension stratégique. L'action des services de renseignement français - principalement la DGSI (Direction générale de la sécurité intérieure, ndlr) pour les départements d'Outre-mer et la DGSE (Direction générale de la Sécurité extérieure, ndlr) pour l'étranger - consiste à identifier et à neutraliser les actions de déstabilisation qui ciblent notre pays en contestant la présence française », précise la DPR.

*CSI : Code de la sécurité intérieure 

« Au-delà des intérêts français, c'est aussi la souveraineté de la France dans cette région du monde qui est remise en cause », souligne la Délégation. « Notre présence dans l'océan Indien constitue 93% de la zone économique exclusive (ZEE) de la France. Certains territoires, habités ou non, font l'objet de contentieux anciens entre la France et plusieurs États que sont notamment Maurice (Tromelin) et Madagascar (îles Éparses). La situation à Mayotte est également un sujet de tension majeur entre la France et les Comores comme l'a illustré l'opération Wuambushu lancée en mai 2023. » 

Pour la DPR, ces contentieux et ces tensions sont régulièrement instrumentalisés par des puissances étrangères qui les utilisent pour nuire aux intérêts de la France. « La Russie ne manque jamais une occasion de rappeler son soutien à la revendication de Madagascar sur les îles Éparses tandis qu'aux Comores, Moscou joue des tensions liées à la situation à Mayotte, allant même jusqu'à se prononcer en faveur d'une ‘Mayotte comorienne’ », relève la Délégation, qui égratigne au passage le soft power de la Chine qu’implique la présence d’un Institut Confucius à La Réunion.

Dans ce contexte, la DPR se félicite que les services de renseignement français soient orientés dans une stratégie de riposte fondée sur l'exploitation des faiblesses de ses adversaires et le développement de partenariats avec des pays qui ne font pas partie de la sphère historique d'influence de la France. « Derrière les apparences, la Russie et la Chine sont loin d'être en terrain conquis dans les pays qu'ils investissent. Tout en accusant l'occident de néocolonialisme, la Russie et la Chine se comportent en réalité comme des prédateurs, pillant les ressources naturelles des pays qu'ils exploitent, peu scrupuleux du respect de l'environnement exerçant leur mainmise sur la souveraineté même de ces États », dénonce la Délégation. 

Aussi, la DPR juge nécessaire de mieux valoriser et d'amplifier l'action de la France dans les pays où elle est déjà présente. « Enfin, même s'il ne s'agit pas de renseignement à proprement parler, il serait judicieux de repenser notre dispositif de coopération. Le nombre de coopérants français n'a cessé de diminuer au cours des dernières années, marqueur de la volonté politique de tourner la page de la françafrique. Pour autant, dans le contexte d'intensification des ingérences étrangères, les coopérants sont des relais privilégiés qui contribuent utilement à une stratégie d'influence », conclut la Délégation. 

PM