Depuis 2022, Mayotte bénéficie d’un data center de dernière génération accessible à tous types de clients publics et privés. Ultra-sécurisé, tout est adapté pour qu’aucune panne n’ait lieu sur le site. Reportage avec notre partenaire Mayotte Hebdo.
En journée, un flux continu de voitures passe devant cet imposant bâtiment brun qui surplombe la côte du boulevard Younoussa Bamana à Mamoudzou. Cette mystérieuse structure est l’unique data center ou centre de données de Mayotte. Ne rentre pas qui veut, l’accès à ce lieu stratégique est hautement contrôlé. Il faut dire que la sécurité est la principale promesse faite aux clients. Flambant neuf, le site a été inauguré en octobre 2022.
Héberger des données
D’une hauteur de deux étages, le centre de données, propriété de l’entreprise ITH Center, héberge, comme son nom l’indique, les données de ses clients. Ils sont de tous types, parmi eux, le Centre hospitalier de Mayotte (CHM), les mairies de certaines communes, des petites et moyennes entreprises. « En tout, nous en avons une quarantaine », détaille Zayed Mouhoussoune, le business manager relations clients, tous ne sont pas connus, certains tiennent à garder cela privé. Des opérateurs comme Orange, SFR ou Free utilisent également le site. Si on doit simplifier, le rôle d’ITH Center est comme celui d’une agence immobilière, il loue aux entreprises et institutions ses espaces pour accueillir les serveurs.
Ce data center dernière génération offre une disponibilité de 99,99 %. « Cela signifie que nous garantissons en permanence de l’électricité, du froid et de la sécurité. Il ne tombera pas en panne plus de 1,6 heure par an. Mais depuis son ouverture ce n’est jamais arrivé qu’il s’arrête », indique Johan Desmyter, responsable de production du site. Cela vaut au site d’être classé Data Center Tier III. « Ce niveau permet d’héberger les établissements de santé ou encore bancaires. » Le maximum est le Tier IV utilisé par l’armée.
Un maximum de sécurité
Pour assurer qu’il n’y a aucune panne, sur le bâtiment, « tout est redondé, cela signifie que tout est en double », précise Johan Desmyter. Cela commence dès l’extérieur. A l’entrée se trouve un poste haute tension avec deux arrivées de deux fois 20.000 volts, ainsi que deux transformateurs. A l’arrière, deux groupes électrogènes de secours sont installés. « Si une panne arrive ou qu’il y a une maintenance, le data center peut continuer à tourner », explique-t-il. Tout le site est construit ainsi. L’intérieur a des allures de labyrinthe sortie d’un film futuriste avec son dédale de salles d’un blanc immaculé et ces machines inconnues du grand public. Toutes les pièces y sont en double. Les locaux de télécommunication A font face aux B, toujours dans le même souci de redondance.
Un data center nécessite d’être maintenu dans le froid alors d’énormes climatiseurs sont installés dans les locaux “climatisation et incendie”. La surface brune de la construction est également recouverte de béton banché, une technique qui améliore l’isolation et conserve le froid. Le site est aussi équipé d’un double onduleur, un appareil qui lui permet d’être alimenté même en cas de panne et qui assure la transition le temps du basculement entre le groupe haute tension vers celui électrogène par exemple. Son rôle est aussi de nettoyer le courant. « Parfois, les tensions d’EDM sont très basses, c’est quelque chose que les serveurs supportent mal. L’onduleur lisse donc le courant pour le rendre propre », décrit Johan Desmyter.
Éviter les pannes
Grâce au data center, Mayotte n’est plus dépendante des autres territoires en termes de numérique. « Ce lieu illustre notre souveraineté numérique », se félicite Zayed Mouhoussoune. « Nous sommes le premier data center Tier III de l’océan indien. La Réunion a inauguré le sien il y a seulement deux semaines. » Il était souhaité de longue date par les professionnels du secteur. Arrivé à Mayotte en 2010, Johan Desmyter commence alors à travailler à Etic services, une société de service informatique, (aujourd’hui partenaire de ITH Center). « A cause de pannes, il fallait très souvent remplacer les serveurs des entreprises, j’en ai vu mourir à cause de ça mais aussi des mairies perdre leur état civil par manque d’équipement adapté », évoque-t-il. Précurseur dans l’océan Indien, ce lieu a été entre autres financé par le fonds européen de développement régional, la banque des territoires et la caisse des dépôts pour un total de 7,35 millions d’euros.
Des visites possibles
Dans ce temple de sécurité, il reste de la place pour les entreprises, des baies (armoires) qui hébergent les serveurs sont vides. L’équipe d’ITH Center met en avant les économies que cela peut représenter de migrer son serveur ici. Avec le travail sur l’isolation, le fait qu’ils soient tous réunis au même endroit, « on consomme moins d’énergie et finalement ça coûte moins cher », souligne Johan Desmyter. Beaucoup d’établissements à Mayotte ont leur système informatique en métropole, « cela crée une latence de quelques secondes, si on veut envoyer un document ça va mais s’il en y a beaucoup, cela prend du temps ». Zayed Mouhoussoune souhaite « démystifier ce lieu car personne ne sait ce que c’est ». Il propose de le faire visiter aux sociétés « pour faire comprendre l’importance de ce bijou à Mayotte », dit-il en souriant.
Pour stocker des données, le tarif commence à 260 euros pour un serveur unique hébergé dans une baie informatique.
Par Mayotte Hebdo