Mayotte, débordée par les migrations des Grands Lacs, cherche des solutions probantes

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Mayotte, débordée par les migrations des Grands Lacs, cherche des solutions probantes

La déferlante migratoire à Mayotte atteint des sommets en 2023, laissant l'île désemparée face à des milliers de migrants en provenance des pays des Grands Lacs. La situation complexe expose des failles dans la réponse locale. Gérald Darmanin doit négocier des actions décisives pour endiguer cette crise aux multiples facettes. Le MIOM avait promis des négociations.Explications avec notre partenaire France-Mayotte Matin.

Mayotte se retrouve confrontée à une crise migratoire sans précédent. Selon un courrier officiel de la préfecture de Mayotte que la rédaction de France Mayotte matin a pu se procurer, le département est confronté en 2023 à une problématique migratoire sans précédent, principalement en provenance des pays des Grands Lacs. Les chiffres sont vertigineux : plus de 1000 migrants originaires du Congo RDC, près de 250 du Burundi, 250 du Rwanda et 134 de Somalie ont été recensés en 2023. En comparaison, l'année précédente avait enregistré 611 migrants congolais, 176 burundais, 136 rwandais et 39 somaliens. Cette explosion des chiffres met Mayotte face à une complexité migratoire inédite. Un défi majeur réside dans l'absence de laissez-passer consulaire pour faciliter le renvoi de ces clandestins dans leurs pays d'origine. En 2022, 611 migrants des Grands Lacs étaient recensés ; en 2023, le nombre a explosé à plus de 1000. Le Congo RDC, le Burundi, le Rwanda et la Somalie sont les principaux contributeurs à cette augmentation. Les dérèglements climatiques et les tensions politiques ont incité des populations à fuir, générant des parcours éprouvants. Les témoignages révèlent des situations de violence et de précarité avant d'atteindre Mayotte. Outre les implications humanitaires, cette crise migratoire entraîne des problèmes de décompensation psychologique à Mayotte de plus en plus nombreux. Le département manque d'unités psychiatriques adaptées pour traiter ces problèmes spécifiques liés aux migrations. Les faits divers faisant état de ces problèmes ont explosé sur l’île en 2023. 

La situation migratoire est incroyablement complexe. En effet, l'absence de laissez-passer consulaire pour raccompagner ces clandestins les condamne à rester à Mayotte sans droit ni titre, condamnés à l'illégalité. Gérald Darmanin avait annoncé qu'il comptait négocier avec les pays d’origine de ces migrants des processus de retour. L'actualité politique dans l'Hexagone l'a sûrement retenu loin de ces pays des Grands Lacs. Néanmoins, à Mayotte, les problèmes deviennent toujours plus persistants, soulignant la nécessité de trouver des solutions. La préfecture informe dans ce courrier destiné aux élus locaux qu'elle travaille main dans la main avec la Tanzanie pour lutter contre les départs depuis ses rivages et pour faciliter les retours des ressortissants déboutés du droit d'asile ou clandestins dans leur pays d'origine. La Tanzanie affirme être très favorable à la mise en place d'une politique efficace avec la France à Mayotte pour lutter contre la traite des êtres humains. C’est une perspective politique intéressante mais qui n’apporte aucune solution concrète à court terme. 

Les échanges informels avec les migrants démontrent que bien souvent, quand ces Africains arrivent à Mayotte alors qu'ils n'ont plus d'argent, ils se retrouvent dans un cul-de-sac géographique et diplomatique sans aucune solution. Pendant ce temps, la préfecture délivre une autorisation à Solidarités Mayotte pour accueillir et domicilier 4000 migrants dans le cadre de leurs démarches officielles. Les 17 maires ont demandé au préfet de revenir sur cette décision, il n’a pas accédé à cette demande. 

Alors que Mayotte vit déjà une situation d'immigration clandestine incontrôlée en provenance de l'union des Comores, il semblerait que les migrations en provenance de l'Afrique ne soient qu'à leurs prémices. Comment le département peut-il faire face sans une politique résolue engagée et ferme, et surtout sans que les élus montent au créneau pour obtenir de Paris des décisions indispensables pour le département ? 


Par Anne-Constance Onghéna pour France-Mayotte Matin