Le Réunionnais Jean-Claude Boyer, fondateur et dirigeant du Groupe Morgabine Hospitality, réinvente l’hôtellerie à La Réunion

©DR / L’Éco austral / Arnaud Maunier

Le Réunionnais Jean-Claude Boyer, fondateur et dirigeant du Groupe Morgabine Hospitality, réinvente l’hôtellerie à La Réunion

Élu Entrepreneur de l'année lors des TECOMA Awards 2024, Jean-Claude Boyer incarne une nouvelle génération de dirigeants réunionnais. Ingénieur de formation, il a su transformer son parcours en une véritable success story. À la tête du Groupe Morgabine Hospitality, qui fêtera ses dix ans à la fin de l'année, ses cinq établissements conjuguent hébergement de qualité et restauration gastronomique. Porté par des valeurs fortes, il fait de l’égalité femmes-hommes une réalité au sein de ses équipes et défend un management innovant fondé sur la confiance. Convaincu de l’importance du recrutement local, il lance un appel aux jeunes générations sur les réseaux sociaux : « Reviens bâtir La Réunion de demain ». Pour Outremers 360, il revient sur son parcours et partage sa vision d’un tourisme réunionnais ambitieux, humain et tourné vers l’avenir. 

Chaque détail compte

Né à La Réunion et formé comme ingénieur de l’équipement, Jean-Claude Boyer a toujours cultivé une double passion pour l’architecture d’intérieur et l’immobilier. Une expérience formatrice dans le logement social lui permet de mesurer les réussites mais aussi les dérives d’un urbanisme parfois déshumanisé : « J’ai vu passer des milliers de logements, j’ai beaucoup appris, mais aussi observé les limites de ce système, et parfois la dégradation du paysage liée aux grands projets immobiliers. » De ce parcours naît une conviction qui ne le quittera plus : chaque détail compte, et c’est justement cette exigence supplémentaire qui transforme un lieu en expérience, et un client en prescripteur. C’est cette philosophie qui le conduira, quelques années plus tard, à se lancer dans l’hôtellerie : « Petit à petit, l’envie est née de me tourner vers autre chose, d’aller au bout de projets plus personnels. J’avais cette conviction que la réussite se joue souvent dans les détails : les 10 % de soin et d’attention supplémentaires qui, en réalité, font toute la différence pour le client. »

Inauguration du Dina Morgabine de Cilaos ©DR

Pionnier et bâtisseur 

Visionnaire, Jean-Claude Boyer est l’un des premiers à proposer des locations de vacances en ligne à La Réunion, bien avant l’arrivée d’Airbnb. Le succès est immédiat : « À l’époque, je n’y croyais pas vraiment, mais avec l’arrivée d’Internet, j’ai vite compris le potentiel. J’avais une maison en bord de mer et j’ai sans doute été l’un des premiers à la louer en saisonnier. C’était une nouvelle opportunité de se faire connaître au-delà de La Réunion. Et cette maison, conçue à mon goût et aménagée avec soin, reflétait déjà tout ce que j’aimais. »

Voyageur attentif aux nouvelles attentes d’authenticité, de confort, et de qualité et convaincu que La Réunion a une carte à jouer, il mûrit l’idée d’un projet hôtelier différent. L’ouverture du premier établissement en 2015 marque le début d’un réseau qui compte aujourd’hui cinq hôtels, le Dina Morgabine à Saint-Denis et à Saint-Gilles, l’Hôtel Doudou à La Saline-les-Bains  ouvert récemment, l’Hôtel Papangue & Spa à L’Étang-Salé et prochainement la rénovation du Grand Hôtel des Thermes de Cilaos. Au total, près de 250 salariés font vivre ce réseau hôtelier classé entre trois et quatre étoiles, dont la clientèle se partage à parts égales entre visiteurs locaux et voyageurs venus de l’extérieur.  

Morgabine Étang-Salé ©DR

Revenir bâtir La Réunion de demain

Derrière ces ouvertures, une préoccupation demeure centrale : l’emploi local. Réunionnais, Jean-Claude Boyer tient à privilégier l’ancrage dans le territoire. Mais il insiste sur la nécessité de l’équilibre : « La Réunion est faite de mixité et l’apport de compétences venues de l’extérieur est essentiel, surtout lorsque certaines expertises manquent sur place. » Le défi est réel. L’ambition est donc double : offrir des opportunités aux jeunes talents du territoire, tout en attirant ceux qui sont partis se former ailleurs, afin qu’ils reviennent avec de nouvelles compétences à transmettre. C’est dans cet esprit qu’il lance son appel sur les réseaux sociaux : inviter la nouvelle génération à revenir bâtir l’avenir de l’île avec lui.

Ce modèle existe déjà dans d’autres secteurs, à commencer par la gastronomie : de jeunes Réunionnais, formés auprès de chefs étoilés en Europe, reviennent enrichis d’un savoir-faire qui élève toute une filière. Jean-Claude Boyer espère reproduire cette dynamique dans l’hôtellerie.

©DR

Encore faut-il savoir manager ces nouvelles générations : « Les jeunes n’adhèrent plus aux modèles très hiérarchiques, observe-t-il. Ils supportent mal les structures trop verticales. » Ses équipes expérimentent donc un style de management plus horizontal et participatif. Pas une entreprise « libérée » au sens strict, nuance-t-il, mais une organisation qui valorise la confiance et la responsabilité partagée.

Aux jeunes qui veulent se lancer il conseille de : « s’entourer de partenaires réellement engagés dans le développement du territoire, et pas uniquement motivés par l’aspect financier. Bien sûr, ce dernier reste indispensable, mais l’essentiel est de s’associer avec des acteurs qui partagent une vision durable et de long terme. » Pour lui, c’est cette combinaison d’ancrage local, de développement territorial et de management moderne qui permettra de construire une hôtellerie réunionnaise solide et attractive : « La Réunion dispose aujourd’hui d’un bon niveau économique et les dynamiques de croissance sont déjà à l’œuvre. »

Tecoma Awards ©Design System

Si le littoral reste une implantation naturelle et privilégiée, Jean-Claude Boyer souhaite diversifier l’offre et développer des projets dans des zones moins tournées vers la mer, notamment dans les Hauts de La Réunion pour faire de chaque recoin de l’île un lieu unique à découvrir.

EG