INTERVIEW. La Réunion : « Pour cette année 2021, nous allons mettre en œuvre 75% de notre projet municipal », assure Ericka Bareigts, maire de Saint-Denis

INTERVIEW. La Réunion : « Pour cette année 2021, nous allons mettre en œuvre 75% de notre projet municipal », assure Ericka Bareigts, maire de Saint-Denis

©Facebook / Ericka Bareigts

Élue maire de Saint-Denis de La Réunion le 28 juin dernier, Ericka Bareigts était en déplacement cette semaine à Paris et dans l’Hexagone pour « faire le point avec des partenaires sur des sujets que nous portons dans le cadre de notre projet municipal ». La maire de la capitale la plus peuplée des Outre-mer s’est rendue à Grenoble, ville verte européenne, pour « inscrire Saint-Denis dans cette démarche », et a, successivement rencontré les présidents d’Action Logement et de l’UNCCAS, le conseiller Outre-mer de l’Élysée, le président de la Fondation pour la mémoire de l’esclavage et la maire de Paris. Outremers360 a fait le point de ce déplacement avec l’édile dionysienne. INTERVIEW. 

Outremers360 : Premièrement, quel était le but de ce déplacement à Grenoble ?  

Grenoble, qui est l’équivalent en nombre d’habitants de Saint-Denis, est très engagée sur tout ce qui est de l’ordre de l’aménagement des pistes cyclables. Cette ville est très en avance sur ce sujet et elle a été élue ville verte européenne. J’ai l’ambition de pouvoir inscrire Saint-Denis cette démarche.

Sur place, j’ai pu rencontrer Éric Piolle, le maire, et visiter Grenoble à vélo. Cela m’a permis de voir les possibilités et évidemment, Saint-Denis peut s’inscrire dans la mise en œuvre de pistes cyclables à grande échelle pour atténuer les problématiques de circulation. D’ailleurs, nous en avons déjà mis en place deux, et pas des moindres, en l’espace de deux mois Nous souhaiterions aussi travailler à la candidature de Saint-Denis au titre de Ville verte européenne dans les mois à venir.

À Paris, vous avez rencontré le président d’Action Logement Bruno Arcadipane. Quel était le but de cet entretien ? 

On a signé avec le ministre des Outre-mer, le Département, l’association des bailleurs sociaux et la Ville de Saint-Denis, une convention d’intention sur une grande démarche de réhabilitation de logements sociaux sur la ville. Nous sommes sur un potentiel de près de 7 000 logements qui pourraient être réhabilités pour amener du confort aux familles, permettre un réaménagement dans les quartiers pour amener de l’apaisement, du vert et de la qualité de vie.

C’est aussi bon pour l’économie parce que la réhabilitation apporte du travail à nos entreprises, petites et moyennes. C’est une vraie filière et un acte économique très important. Ça associe le social, l’économie et l’écologie.

Avec le président d’Action Logement, nous avons donc échangé sur un dossier que nous avons présenté en conseil municipal et une première convention que nous allons bientôt signer avec la SHLMR, qui concerne au total deux quartiers de Saint-Denis et 3 600 personnes qui sont visées par cette réhabilitation, ce qui n’est pas neutre en termes d’impact.

Vous vous êtes aussi entretenue avec Didier Migaud, fraîchement nommé président de la Haute autorité pour la Transparence de la Vie publique. Quels ont été les échanges ? 

La ville de Saint-Denis s’est engagée sur la signature et la mise en œuvre d’une charte de l’éthique qui intéresse les administrations, le cabinet et les élus. Et il était question avec Didier Migaud de la mise en œuvre de cette charte. Saint-Denis serait ainsi la première ville des Outre-mer affiliée à cette charte. J’avais besoin d’échanger pour préciser les actes, la mise en œuvre, la rédaction, et soumettre notre projet de convention à la Haute autorité, ce que j’ai obtenu de Didier Migaud.

Autre rendez-vous dans cet agenda visiblement chargé : un entretien avec le président de l’UNCCAS, Luc Carvounas. Là encore, quel a été le but de cette rencontre ? 

Je suis 1ère présidente de l’UNCCAS (Union nationale des Centre communaux d’Action sociale) et j’ai été reçue par le président pour savoir comment et sur quels sujets nous allions travailler. En Outre-mer, la grande pauvreté est un sujet essentiel et il est naturel que je m’occupe de cette problématique. La rencontre était importante pour l’organisation de mes futures missions.

Ce vendredi, vous vous êtes rendue à l’Élysée pour rencontrer le Conseiller Outre-mer du président. Quel message souhaitiez-vous lui faire passer ? 

Il s’agissait d’échanger sur quelques engagements comme la mobilisation du plan de relance, les investissements pour la ville comme le téléphériques et les infrastructures que nous avons présenté aux services de l’État sur le territoire, pour montrer que la ville de Saint-Denis s’inscrit dans un grand projet de transformation écologique, sociale, économique avec une mise en valeur du patrimoine -nous avons notamment parlé de la valorisation de la prison Juliette Dodu-. Il fallait expliquer au conseiller du président notre vision, notre engagement et notre ambition. Le message a été très bien transmis et le contact de très grande qualité.

Vous allez également, ce vendredi après-midi, rencontrer le président de la Fondation pour la Mémoire de l’esclavage…

En effet. La Ville de Saint-Denis a été élue à la présidence du Conseil des territoires de la Fondation pour la Mémoire de l’Esclavage. Nous allons travailler avec Jean-Marc Ayrault et ses collaborateurs sur ce que l’on attend des territoires et sur ce que nous porterons ensemble.

Rencontre avec la Fondation de la Mémoire pour l’Esclavage ©DR

Rencontre avec la Fondation de la Mémoire pour l’Esclavage ©DR

Je terminerais mon déplacement par un entretien avec la maire de Paris, Anne Hidalgo. Saint-Denis fait partie des grandes villes francophones au même titre que Paris et je voudrais, en tant que maire de la plus grande capitale des Outre-mer, lui présenter notre projet et voir dans quelle mesure pourrions-nous nous associer, travailler, collaborer, s’inspirer mutuellement.

Par exemple, dans le programme d’Anne Hidalgo, il y a le bus gratuit et c’est une mesure que nous faisons déjà à la ville de Saint-Denis, jusqu’aux usagers de 18 ans, et nous allons l’étendre cette année aux 19-20 ans et à terme jusqu’à 26 ans. Nous pouvons, avec Paris, être source d’inspiration mutuelle. Et en tant que maire, femme nouvellement maire d’une grande capitale, c’était important de pouvoir rencontrer Anne Hidalgo.

Justement, en juin dernier, vous avez été élue maire de Saint-Denis, la ville la plus peuplée des Outre-mer et de surcroît, dirigée par une femme pour la première fois. Quel bilan tirez-vous de ces premiers mois de mandature ?

C’est davantage une première perception du travail qu’un bilan qui a été fait et pendant ces six derniers mois nous avons beaucoup travaillé. Nous avons initié de nombreuses mesures liées au Covid-19 puisque la ville a été dès août un territoire visé par des clusters.

En bonne collaboration avec le préfet, nous avons pu faire face parce que nous avons aussi proposé des innovations, des mesures d’accompagnement et de sensibilisation de la population sur l’usage du masque, nous avons mobilisé nos associations, nous avons fait des test « populationnels » à grande échelle dans nos quartiers. La crise sanitaire nous a beaucoup mobilisé et nous mobilise encore, mais cela nous a permis de juguler une situation sanitaire assez explosive, notamment en août.

En parallèle nous avons pu aussi construire une démarche d’éducation et de médiation culturelle en maintenant les commémorations du 20 décembre à Saint-Denis. Saint-Denis est une ville historique et nous avons initié, pour la première fois dans les Outre-mer, une carte actuelle de la ville sur laquelle nous avons tracé l’existence des camps d’esclaves qui ont disparu. C’est très important car cela équilibre la mémoire, met en évidence notre potentiel culturel et touristique, et participe à l’union dionysienne.

Nous avons également continué à travailler sur la mise en œuvre de l’école bienveillante. Nous avons aussi maintenu les actions sociales comme le Noël des enfants, l’accompagnement des mamans modestes et leur cadeau pour la fête des mères, avec du retard certes, mais il fallait le maintenir car les mamans ont été secouées par cette crise. Et puis nous avons aussi réorganisé notre administration et écrit nos orientations budgétaires. Pour cette année 2021, nous allons mettre en œuvre, commencer, largement pour certains, 75% de notre projet municipal. Ce qui est exceptionnel. Nous avons voté dès décembre notre budget primitif 2021.

Donc aujourd’hui, après six mois de travail largement dédiés à la gestion de la crise sans nous empêcher d’être dans l’action et construire nos outils, nous sommes prêts à démarrer concrètement parce que nous avons nos actions, notre budget, notre ligne politique, notre organisation et notre administration. Tout est en place.