Lors de la conférence de presse du 9 juin, Emmanuel Macron a annoncé sept avancées concrètes qui redéfinissent les priorités pour les décennies à venir. Ces mesures témoignent d’une volonté affirmée de bâtir un multilatéralisme ambitieux, tourné vers la mobilisation et l’action, face aux menaces croissantes de l’exploitation sauvage. Et des mesures également qui concernent les Outre-mer.
Entrée en vigueur du traité sur la haute mer au 1er janvier 2026
Comme il l’avait déjà indiqué à la presse quotidienne régionale et à Outremers360, le traité pour la protection des zones situées au-delà des juridictions nationales, connu sous le sigle anglais BBNJ (Marine Biodiversity of Areas Beyond National Jurisdiction), couvrant 65 % des océans, entrera officiellement en vigueur le 1er janvier 2026, a assuré le chef de l'État. En effet, plus de 60 pays, seuil nécessaire à son entrée en vigueur, se sont engagés à le ratifié d'ici la fin de l'année.
Lire aussi : UNOC-3 : Qu'est-ce que le traité pour protéger la haute mer ?
Ce traité est le fruit de deux années de négociations depuis Lisbonne 2022 et se donne pour ambition de mettre fin à un vide juridique : « Il faut se représenter que lorsqu'on s'est rassemblés à Lisbonne, à l'UNOC en 2022, il n'y avait aucun cadre agréé pour deux tiers des océans. Et donc tout ce dont on parlait ne valait que pour ce qui était dans nos zones économiques exclusives, le reste, c'était le Far West. »
Une accélération mondiale des aires marines protégées
Grâce à la dynamique portée par la coalition franco-costaricienne, la part des zones économiques exclusives (ZEE) protégées dans le monde est passée de 8% à 12%, avec des annonces phares comme celle de la Polynésie française qui fait progresser de +1,2 point la part des océans protégés à l’échelle mondiale.
Lire aussi : UNOC-3 - Aire marine protégée en Polynésie : Emmanuel Macron salue un « exemple » et « un cap pour la planète »
En effet, grâce à la Collectivité autonome du Pacifique, qui représente à elle seule près de 5 millions de kilomètres carrés, la France fait un bond significatif en matière de protection des océans : elle passe de 4 % à 5,2 % d’aires marines protégées. Cela confirme son statut de deuxième puissance maritime mondiale. D’autres pays ont aussi annoncé des avancées : le Brésil, qui passera de 26 % à 30 %, et la Grèce, qui prévoit de nouvelles zones marines protégées. L’objectif des 30 % d’aires protégées d’ici 2030 entre ainsi dans une phase d’implémentation concrète.
Vers un moratoire renforcé sur les grands fonds marins
Une coalition de 36 États soutient désormais le moratoire initié par la France contre l’exploitation minière des grands fonds marins. L’enjeu : préserver les écosystèmes abyssaux, encore largement méconnus mais riches en biodiversité et en potentiel scientifique, face à une pression industrielle croissante.
Une ambition scientifique renouvelée
Deux grandes missions sont lancées : Neptune, dédiée à l’exploration des grands fonds, et Corsair (Common Oceanographic Research Study And Insight Ressource), pour une observation satellitaire avancée. « Il n'y a que 5 ou 6 pays au monde qui sont capables d'envoyer des sous-marins habités à plus de 5 000, voire 6 000 mètres de fond, ce qui est une prouesse aussi dure que d'envoyer une fusée dans l'espace. » Ces programmes s’appuient sur des outils comme Mercator International, le « jumeau numérique » des océans, et l’indicateur Starfish, pour ancrer la science au cœur des décisions politiques.
Décarboner le transport maritime mondial
Un accord inédit a été acté par l’Organisation maritime mondiale pour réduire les émissions du transport maritime, avec des mesures concrètes : ralentissement des navires, décarbonation des flottes, électrification des ports. Le cluster maritime français a largement contribué à cette avancée.
Une coalition internationale des villes et régions côtières
Face aux impacts du dérèglement climatique, une nouvelle coalition mobilise les territoires littoraux autour des cinq grandes crises : eau, alimentation, santé, climat, biodiversité, identifiées dans le rapport Nexus de l’IPBES (Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem Services). L’objectif de cette coalition est de proposer une approche intégrée et systémique, pour adapter les zones côtières, compenser les impacts irréversibles et éviter les décisions contre-productives.
Lire aussi : UNOC-3 : Une vague de nouvelles protections attendues à Nice pour les océans
Intensification de la lutte contre la pêche illégale
Alors qu’un poisson sur cinq consommé dans le monde provient encore de la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN), le sommet a renforcé la coordination internationale. Soutenus par la Food and Agriculture Organization of the United Nations (FAO) et l’Organisation mondiale du commerce (OMC), les États ont annoncé une intensification des contrôles en mer et des efforts accrus pour assécher les filières illégales. L’UNOC c’est aussi des progrès notables sur plusieurs enjeux clés de la gouvernance maritime
Pollution plastique : maintenir la pression pour un traité mondial
La lutte contre la pollution plastique reste un axe central. Malgré des blocages persistants dans les négociations internationales, la France et ses partenaires européens ont réitéré leur appel à un traité mondial juridiquement contraignant. Pour faire avancer les choses concrètement, ils misent sur des leviers déjà en place : développement de l’économie circulaire, la science et les solutions alternatives, à l’image de la politique « zéro plastique » engagée par la ville de Nice.
Protection forte : un bond en avant pour la France
La France franchit un cap historique en matière de protection forte de ses espaces maritimes, dépassant désormais les 14%, bien au-delà de l’objectif international de 10%. Avant le Sommet, la France avait déjà atteint les 30 % de surfaces protégées. Elle consolide sa position de chef de file grâce à des mesures récentes, notamment en Polynésie française.
Cette dynamique est portée en grande partie par ses territoires ultramarins, qui forment l’essentiel de sa zone économique exclusive : « Nous étions avant ce sommet, nous, Français, pour l'ensemble de nos eaux territoriales à 4 % de protection forte. Nous sommes passés à 14 % de protection forte, ceci en grande partie grâce à nos territoires ultramarins qui font d'ailleurs, et il faut bien le dire, l'écrasante majorité de notre zone économique exclusive. Quand on dit que la France est la deuxième puissance maritime mondiale, c'est parce que la France a la chance d'avoir en son sein, par exemple, la Polynésie française, qui, à elle seule, est grande comme le continent européen. »
Lire aussi : UNOC-3 : Dans une tribune, Polynésie française et République des Palaos disent non à l’exploitation minière
Dans l’Hexagone, la protection forte passera également de 0,1% à 4%, avec la création de 500 nouvelles aires marines protégées issues d’une large concertation réunissant scientifiques, ONG, collectivités et professionnels de la mer.
Un renforcement des coopérations régionales
Le sommet a également permis d’intensifier la coopération régionale, avec des séquences spécifiques sur la Méditerranée, l’Afrique et les îles du Pacifique. Ces dynamiques traduisent un véritable basculement vers une diplomatie de l’océan, où les enjeux marins deviennent centraux.
À Nice, la Conférence des Nations Unies sur l’Océan n’a pas seulement clarifié les enjeux, elle a enclenché un changement d’échelle. En combinant diplomatie, science et engagements concrets, l’édition 2025 pose les bases d’une nouvelle gouvernance océanique, capable de répondre aux urgences du siècle.
EG
Pour aller plus loin :