Du cyclone Chido à Mayotte aux inondations en Bretagne, la sécurité civile est en première ligne face au dérèglement climatique et gère aussi des interventions du quotidien sur fond de désertification médicale. Une concertation a été relancée pour moderniser tout un système en quête de financements.
Ce Beauvau de la Sécurité civile avait été annoncé en avril 2024 par le ministre de l'Intérieur de l'époque Gérald Darmanin avant d'être interrompu par la dissolution de l'Assemblée en juin. Les travaux ont été relancés cinq mois plus tard et sont désormais sous la houlette de François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre de l'Intérieur.
Quatre chantiers se sont tenus dans différentes villes, chacun avec un thème précis et réunissant une myriade d'acteurs (pompiers, ambulanciers, Samu, associations, collectivités, etc). Le dernier chantier se tient mardi à Mâcon (Saône-et-Loire) autour de la gouvernance et du financement du futur modèle de la sécurité civile.
L'objectif affiché du ministre, qui sera à Mâcon, est d'établir « le modèle opérationnel de la sécurité civile pour les 20 prochaines années », plus de vingt ans après la loi de modernisation de la sécurité civile de 2004. François-Noël Buffet ambitionne de présenter un projet de loi au Parlement avant l'été mettant notamment l'accent sur la « révision des missions de la sécurité civile, la charge financière et l'adaptation des moyens ».
« Surengagement des agents »
La sécurité civile -dont la mission est le secours aux personnes, de l'accident à l'incendie en passant par les catastrophes- repose à près de 81% sur le volontariat et l'engagement associatif. Parmi ces non professionnels, des associations agréées de sécurité civile (AASC) -autour de 100 000 effectifs- et un peu plus de 200 000 sapeurs-pompiers volontaires, quand le voisin allemand en compte plus d'un million. Participent aussi à ce système sous tension quelque 43 000 sapeurs-pompiers professionnels.
Les modes d'organisation sont hétérogènes, avec différents niveaux de donneurs d'ordre allant de l'État aux collectivités en passant par la sphère associative, ce qui complexifie la coordination des actions. Les associations agréées sécurité civile demandent à avoir « une place plus importante dans le fonctionnement » afin de « renforcer la coordination et la prise en charge de la population », selon Florent Vallée, directeur national de l'urgence et des opérations à la Croix-Rouge française.
« La problématique est plutôt dans les crises. On sait très bien faire les choses, mais c'est vrai qu'on peut améliorer très largement la prise en charge des populations ce qui permettrait de gagner du temps sur tout un tas d'interventions », poursuit Florent Vallée.
Or, « les crises sont plus grosses et plus importantes » alors même qu' « en temps normal, on est déjà en difficulté par le quotidien », relève Sébastien Delavoux, coordinateur de la CGT des SDIS (Services départementaux d'incendie et de secours). Selon lui, « la sécurité civile a le pantalon sur les chevilles : on nous dit qu'elle va bien, mais aujourd'hui elle ne fonctionne que grâce au surengagement des agents ». Les volontaires contribuent largement et leurs conditions de travail et de rémunération doivent être interrogées, commente pour sa part Sébastien Bouvier, secrétaire fédéral CFDT en charge des SDIS.
Pour l'heure, « on avance totalement à vue » dans ce Beauvau, et « les thématiques abordées vont de la place du citoyen aux démineurs jusqu'à la situation à Mayotte, c'est tellement vaste, de quoi ça va accoucher ? », s'interroge le représentant CFDT. « Ce n'est pas un chantier qu'on traite en trois mois », dit-il, saluant toutefois le fait que les autorités « ont au moins le mérite de nous réunir ».
Les pompiers, « colonne vertébrale » des secours, seront « très vigilants » à ce qui sortira de ces consultations, insiste quant à lui Jean-Paul Bosland, président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France (FNSPF). Plusieurs acteurs interrogés soulignent la nécessité d'installer sur l'ensemble du territoire une plateforme commune de gestion des appels d'urgence, gage selon eux d'une prise en charge plus efficiente et moins coûteuse. Tous soulignent l'impératif de redéfinir les missions de sécurité civile.
« Certaines missions non urgentes peuvent être destinées à d'autres organisations que les pompiers, ou peut-être être facturées », avance notamment Jean-Paul Bosland. Au global pour ce Beauvau, « il y a quand même des questions qui n'avaient jamais été posées avant, donc ce n'est pas inintéressant », estime Sébastien Delavoux.
Avec AFP