À rebours des partis nationaux de gauche, les députés NFP Davy Rimane et Christian Baptiste demandent un entretien entre le Premier ministre et l’ensemble des parlementaires Outre-mer du Nouveau Front Populaire qui « disposent d’une liberté de ton, de vote, de pensée (…) dans l’intérêt des Ultramarins ». Ils souhaitent aussi « la création d'un ministère des Outre-mer de plein exercice » et « dénoncent la baisse prévue du budget alloué aux Outre-mer ».
Un peu plus d’une semaine après la nomination de Michel Barnier à Matignon, les députés Davy Rimane, également président sortant de la Délégation aux Outre-mer à l’Assemblée nationale, et Christian Baptiste, co-rapporteur du budget des Outre-mer, ont pris leur plume pour alerter « sur des enjeux cruciaux concernant les territoires d’outre-mer ».
« Nous souhaitons vous faire part de notre inquiétude grandissante quant à la place qu'occupent nos territoires dans les priorités de l'État, particulièrement dans le cadre de la politique d'austérité et face à l'inflation galopante qui exacerbe déjà une situation économique et sociale tendue » écrivent les deux députés dans leur missive, faisant part du « mécontentement (…) palpable » et des « attentes (…) immenses » à l’égard du futur gouvernement.
Dans un premier temps, les deux députés réclament « un interlocuteur compétent, un ministère des Outre-mer de plein exercice, rattaché directement à l’autorité du Premier ministre, afin de lui octroyer le poids politique et la vision globale nécessaires pour mener à bien les actions qui s’imposent, afin de répondre aux réalités qui diffèrent drastiquement de celles à l’œuvre dans l’Hexagone ». Ils rappellent à ce sujet que depuis 2022, « nous avons vu se succéder trois ministres délégués aux Outre-mer, dont les nominations, bien que certainement faites avec les meilleures intentions, ont révélé une incompréhension préoccupante des réalités ultramarines ».
« Il est aujourd'hui clair pour nos concitoyens que les Outre-mer ne peuvent plus être gérés par des personnalités déconnectées des défis spécifiques que nous rencontrons quotidiennement » ajoutent-ils, appelant à « rompre avec cette approche ». Ce retour à un Ministère de plein exercice, comme ce fut le cas entre 2012 et 2022, est notamment défendu par les Medef ultramarins et d'autres parlementaires des Outre-mer. L’Élysée avait, en 2022, justifié le rattachement de l’Outre-mer à Beauvau par une meilleure influence et plus de poids au sein du gouvernement.
Face à la vie chère, la précarité accrue et les « inégalités socio-sanitaires », « qui empoisonnent nos territoires depuis des années », Davy Rimane et Christian Baptiste demandent « des actions tangibles ». « Une concertation a été lancée sur l’octroi de mer à l’été 2023. L’État nous a annoncé travailler sur des scénarios de réforme sur la base des retours des différents territoires et s’est engagé à rendre publics ces éléments. Nous demandons donc la restitution de ces simulations. De même, nous avons obtenu après de multiples relances la publication du rapport de l’inspection générale des finances sur le prix du carburant aux Antilles et en Guyane et nous attendons que votre Gouvernement précise les conséquences qu’il compte en tirer dans l’intérêt de nos concitoyens ».
Autre sujet évoqué : la Nouvelle-Calédonie : « il nous paraît impératif d’assurer la reconstruction et le rééquilibrage économique de la Nouvelle-Calédonie Kanaky et d’y déployer une politique qui permettra d’éviter de nouveaux affrontements et de pacifier la bipolarisation entre les indépendantistes et les non-indépendantistes ».
Ils déplorent aussi dans leur lettre « une politique Outre-mer par à-coups » : « entre Assises, consultations populaires et États généraux, elle s’est principalement matérialisée par la multiplication de mesures ponctuelles et par des plans d’urgence élaborés au gré des crises. Un tel mode de gouvernance ne permet pas d’adresser les problèmes structurels et historiques des territoires ultramarins ».
Un entretien avant la formation du gouvernement
Enfin, Davy Rimane et Christian Baptiste se disent aussi inquiets de « la politique d’austérité à venir ». « Le gouvernement démissionnaire a prévu une réduction a minima de 35% des moyens du programme 123 « Conditions de vie outre-mer » et envisage une réduction des exonérations de cotisations sociales incompatible avec la situation de l’emploi sur nos territoires. La situation budgétaire nationale ne doit pas conduire à délaisser encore davantage les Outre-mer, mais au contraire à chercher à tirer les conséquences des expériences précédentes ».
Ils demandent ainsi « un entretien avec l’ensemble des Parlementaires d’Outre-mer du Nouveau Front Populaire avant la formation définitive du prochain Gouvernement ». « Les parlementaires ultramarins, plus que les autres, disposent d’une liberté de ton, de vote, de pensée par rapport aux partis politiques nationaux, qu’ils n’hésiteront pas à utiliser dans l’intérêt des Ultramarins » ont-ils assuré.