Artiste pluridisciplinaire, la Martiniquaise Jade Chantelle vient de terminer ses prestations dans la comédie musicale Noé où elle interprétait le rôle de Lusiné. Elle enchaîne sur le Paradis Latin qu’elle a intégré en qualité de meneuse de revue dans le spectacle «Oiseau paradis» mis en scène par le célèbre chorégraphe Kamel Ouali tout en préparant activement son premier EP aux influences pop caribéennes qui sera disponible en avril prochain. En dépit de ses activités artistiques très prenantes, celle qui avoue être «déterminée » et « n’abandonne jamais» a bien voulu prendre le temps pour répondre à nos questions. - Entretien -
Outremers360: Autrice, compositrice, interprète, instrumentiste, danseuse, comédienne et mannequin, vous êtes considérée comme une artiste complète et pluridisciplinaire. C'est rare à votre âge et cela suppose beaucoup de travail en amont. Jade Chantelle, pour quelqu'un qui disait souffrir du regard des autres quand
vous étiez plus jeune, on peut dire que vous avez fait bien du chemin depuis ? Comment avez-vous fait ? Quel est votre moteur ? Où puisez-vous cette force pour mener de front ces différentes carrières ?
J’ai toujours été curieuse. J’aime apprendre car cela m'enrichit et me permet d’approfondir ma vision du monde. Depuis mon plus jeune âge, je suis attirée par le monde artistique et j’ai envie d’explorer ses différentes facettes. J’ai commencé à 8 ans par le chant, la danse et le piano. Après des études dans la mode et un stage de styliste dans la broderie haute couture, j’ai décidé de me consacrer pleinement à la musique puis je me suis mise à la comédie il y a un an.Il y a tellement de choses à faire et à apprendre dans une vie et je trouve cela fascinant de pouvoir développer différentes activités dans des domaines qui me passionnent.
Je suis persuadée que tout est possible à celui qui croit en ses capacités et qui travaille dur pour y arriver. J’en suis la preuve vivante. Quand j’étais enfant j’ai souffert du regard des autres à cause de mon métissage, de ma grande taille , de mon hypersensibilité et de mon profil scolaire atypique (Je suis dyscalculique et dyspraxique). Pour ceux qui ne savent pas ce qu’est la dyspraxie, il s’agit d’un trouble de la coordination. La dyscalculie est un trouble de l’apprentissage lié aux chiffres
Ces difficultés scolaires qui m’apparaissaient au départ comme des obstacles et qui ont engendré beaucoup de souffrance m’ont permis d’être plus résiliente. Avec du travail et de la détermination j’ai réussi à les apprivoiser, à surmonter mes peurs et à aller plus loin que je ne l’aurais jamais imaginé.
Elles m’ont permis d’acquérir cette capacité à m’adapter en toute situation. Aujourd’hui je peux dire que cet état d’esprit est devenu mon moteur car j’ai toujours réussi ce que j’ai entrepris malgré les difficultés.
Quand je regarde en arrière, que je constate le chemin parcouru, ça me donne la force et le courage d’avancer aller au bout de mes rêves. Je suis déterminée et je n’abandonne jamais.
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La musique vous a-t-elle libérée de vos angoisses, de vos doutes et de vos peurs ?
La musique m’a confrontée à ma plus grande peur, celle du regard des autres. Mais elle m’a aussi permis de transcender cette peur.
Considérez-vous votre métissage et votre double culture comme une force et une richesse ? Vos questionnements identitaires sont-ils toujours d'actualité?
Oui, je suis fière d’être métisse et issue d’une double culture. C’est très enrichissant! Je pense que le métissage offre une ouverture au monde exceptionnelle et fédératrice. J’ai fait de ma différence une force. Pour moi la représentation est une chose primordiale et ça me tient à cœur de véhiculer ce message pour les générations futures.
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Vous avez sorti l'année dernière un single intitulé "Viens on s'aime", un titre qui invite à s'émanciper des jugements et des critiques des autres dont on peut parfois être l'objet. Est-ce désormais votre credo pour aller de l'avant ? Comment ce single a- t-il été accueilli ?
«Viens on s’aime» m’est apparu comme un leitmotiv, une sorte de mantra que j’essaie de garder à l’esprit le plus souvent possible. Quoi que vous fassiez, quoi que vous disiez, vous serez toujours jugé et critiqué.
Cette chanson c’est une manière de dire aux gens : nourrissons-nous de ce qui nous rend plus fort donc «l’amour» et laissons aux autres la haine et la frustration qui leur appartiennent.
Ne nous laissons pas polluer par la vision étroite de celui qui nous méprise mais concentrons-nous sur cette vibration d’amour.
Vous venez d’intégrer le Paradis Latin en qualité de meneuse de revue. Dans quel état d'esprit êtes-vous à la veille de ce grand saut ? S'agit-il pour vous d'une sorte de graal ? L'aboutissement de vos efforts ? Une consécration ? Le début d'une nouvelle carrière ?
Cette place de meneuse je la perçois comme une consécration, comme l’aboutissement de toutes ces années de travail. Je la reçois comme un cadeau. Je suis honorée de pouvoir évoluer sur cette scène mythique qu’est le Paradis Latin et de travailler avec un artiste comme Kamel Ouali qui est une référence dans le milieu artistique. Je prends cette expérience comme un nouveau challenge qui va me permettre d’évoluer scéniquement et m’inspirer pour la suite de ma carrière.
Est-ce à dire que vous mettez entre parenthèses vos autres activités?
Je continue mon projet en tant qu’artiste solo. La sortie d’un troisième single et d’un album est prévue au printemps. Pour ce qui est de la mode, je fais toujours du mannequinat et je crée des vêtements quand mon emploi du temps me le permet. Ma priorité est ma carrière de chanteuse.
Propos recueillis par E. Boulard