Katy Hoarau, Présidente du Comité Outre-Mer du Conseil national de l’Ordre des Experts-comptables : « Créer un écosystème qui permette le développement économique pérenne des entreprises en outre-mer, c’est facile ! »

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Katy Hoarau, Présidente du Comité Outre-Mer du Conseil national de l’Ordre des Experts-comptables : « Créer un écosystème qui permette le développement économique pérenne des entreprises en outre-mer, c’est facile ! »

Annoncé en novembre dernier par Elisabeth Borne, le Comité Interministériel des Outre-Mer doit présenter ses conclusions prochainement. Dans ce contexte, Katy Hoarau, présidente du Comité Outre-mer et Corse du Conseil National de l’Ordre des Experts-comptables partage sa vision du développement des entreprises en outre-mer.


Pour Katy Hoarau : « créer un écosystème qui permette le développement économique pérenne des entreprises en outre-mer : c’est facile ! ». Il s’agit d’agir sur 4 leviers : le cadre règlementaire, l’accès au financement, la formation et l’innovation et un 5ème transversal : la responsabilité sociétale des entreprises.

S’agissant du cadre règlementaire, l’accent doit être mis sur la territorialisation au niveau de chaque territoire. Les entreprises d’outre-mer n’évoluent pas dans le même environnement qu’en Ile-de-France et chaque territoire est spécifique tant sur le plan géographique qu’historique ou d’un point de vue géopolitique. C’est pourquoi l’adaptation des mesures ne doit pas se faire au niveau des outre-mer mais au niveau de chaque outre-mer. « L’idée n’est pas de trouver le plus petit dénominateur commun pour les outre-mer mais bien d’identifier le plus grand coefficient multiplicateur ! » précise Katy Hoarau. Une approche réglementaire territoriale, moteur de responsabilité, fondée sur un cadre juridique national et européen, est essentielle à la réussite du développement. Par ailleurs, il est indispensable d’offrir aux entreprises d’outre-mer un cadre règlementaire pérenne c’est-à-dire sans surprise. « Comment faire un budget N+1 quand le niveau de charges sociales est connu par les dirigeants en décembre N ! Piloter une entreprise devient mission impossible ! ». Depuis quelques années, le gouvernement propose une certaine pérennité.

L’accès au financement est un autre facteur paralysant le développement. Sera-t-il possible un jour que les entreprises ultramarines aient accès à la même offre de financement (acteurs, catalogue…) que dans l'Hexagone et à des conditions adaptées aux entreprises d’Outre-mer et non pas plus défavorables ? En l'absence de capitaux privés mobilisables pour favoriser la création, c'est d’une vraie banque de développement régionale qu'il conviendrait d'associer à un cadre réglementaire territorialisé nous precise Katy Hoarau.

Un vrai « choc formation » est indispensable en outre-mer rajoute -elle. Il doit être global et les entreprises aux côtés de l’Education nationale et du SMA doivent toutes être mobilisées pour participer à cette démarche indispensable à l'avenir des territoires d’outre-mer. La réforme du financement de la formation professionnelle des salariés a eu un effet couperet sur la création de valeur en outre-mer. Il faut garder à l’esprit que l’école obligatoire n’a pas plus de 50 ans en outre-mer. Les entreprises doivent avoir les moyens de continuer à former leurs salariés ! Deux ans après la réforme, force est de saluer la capacité d’adaptation des chefs d’entreprise ultramarins qui réintègrent à nouveau à leur budget des coûts de formation. Mais à quel prix…..Un vrai contrat pourrait être établi entre l’Etat, les collectivités et les entreprises pour booster la formation des salariés.

Le 4ème levier est l’innovation mais Katy Hoarau met en garde les pouvoirs publics sur le « tout schuss » de l’innovation. Promouvoir l’innovation va permettre de créer de nouvelles offres de services répondant à des besoins non encore identifiés. En s’appuyant sur les atouts spécifiques de chaque territoire, l’innovation est porteuse d’avenir et ajoute de la valeur ajoutée au développement global. Du fait des spécificités ultramarines, les acteurs locaux sont obligés d’être novateurs afin de faire preuve d’agilité et de s’adapter au contexte local pour pouvoir avancer. Par ailleurs, les outre-mer sont des lieux privilégiés pour « expérimenter » des pistes d’innovation. Mais, il ne s’agit pas de mettre de côté les activités de maintenance et les possibilités d’amélioration des infrastructures existantes rajoute Katy Hoarau.

Le 5ème levier est transversal et doit être la pierre angulaire du développement économique des outre-mer. Il s’agit de la responsabilité sociétale des entreprises et des organisations fondées sur les 3 piliers que sont l’environnement, le social et la gouvernance. Il s’agit pour Katy Hoarau d’embarquer les entreprises dans la transition écologique, de les accompagner dans l’adaptation des modes de management pour permettre aux nouvelles générations d’agir et de travailler avec une éthique irréprochable. Car pour Katy Hoarau, la chance des territoires ultramarins est d’être des États de droit dans leur environnement et qu’il s’agit d’un bien commun à préserver ensemble.
« Si on devait aller vers des propositions plus techniques sur les paquets fiscaux et sociaux, il s’agirait de dire que les dispositifs comme la ZFANG, la défiscalisation ou la LODEOM fonctionnent. De façon réaliste, il conviendrait toutefois de les compléter, en particulier la LODEOM qui aujourd’hui est une trappe à bas salaire. Au-delà de 2,5 SMIC+1€, les exonérations de charges patronales tombent. Si la LODEOM était calée sur le modèle du barème de l’impôt sur le revenu, les entreprises pourraient recruter l’encadrement intermédiaire qui leur manque aujourd’hui pour exploser les plafonds de verre. Des talents pourraient retourner dans leurs territoires d’origine et booster les entreprises. Et puis, ne faudrait-il pas s’interroger sur ce point : l’Etat cherche à attirer les meilleurs avec la « surrémunération » ; pourquoi ne pas laisser cette liberté d’action aux entreprises ultramarines ? Sur la défiscalisation, des pistes seraient d’ouvrir les investissements dans le secteur locatif aux particuliers pour compenser la perte de dispositifs comme le Pinel Dom et d’aller vers des dispositifs encourageant rénovation et maintenance. »

En résumé, pour Katy Hoarau, si la vision est le développement alors des solutions existent. En tous cas, il y aura toujours des experts-comptables pour accompagner les entreprises !

Katy Hoarau, Présidente du Comité Outre-Mer du Conseil national de l’Ordre des Experts-comptables