INTERVIEW. Joël Sorres, président de l’ODEADOM, réagit au rapport de la Cour des Comptes relatif à l’office

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INTERVIEW. Joël Sorres, président de l’ODEADOM, réagit au rapport de la Cour des Comptes relatif à l’office

Avec un rapport approfondi publié le 16 septembre consacré à l’ODEADOM, la Cour des Comptes adresse à l’office et au gouvernement un certain nombre de recommandations qui ont trait à l’avenir de l’office, à son organisation et appelle à une clarification de ses missions. Nous avons tenu à interroger Joël Sorres, président du conseil d’administration de l’office quant à la lecture du rapport et aux conséquences qu’il en tire.

Outremers360 : Comment avez-vous lu ces conclusions et recommandations du rapport de la Cour des Comptes ?

Joël Sorres : Nous attendions avec un peu d’impatience cette publication. En effet, la Cour a effectué un travail approfondi d’examen des missions de l’office et surtout de la manière dont il répond aux attentes. Les services de l’office mais aussi les administrateurs ont été interrogés et audités. Ces conclusions de la Cour ne constituent pas réellement une surprise. J’en retiens que la Cour ne recommande plus, comme elle le faisait par le passé, une fusion de l’ODEADOM avec un autre établissement public. A l’opposé, elle demande que se prépare l’avenir de l’office avec des recommandations pour son évolution. C’est un rapport qui sera très utile à tous les administrateurs au moment où se prépare le futur contrat avec l’Etat.

Le rapport est pourtant parfois critique, voire très critique, en revenant sur la valeur ajoutée de l’office, au-delà de ses missions de paiement…

Oui la Cour, comme c’est son rôle, interpelle le gouvernement quant aux missions qu’ils donnent à l’office. Sur un certain nombre de points d’ailleurs, nous avons marqué un désaccord dans le diagnostic. La Cour travaille en transparence et a publié, en même temps que son rapport, les réponses que j’ai apportées, ou que les Ministères ont apportées, et j’invite chacun à les lire également, en contre-point, ou plutôt en complément du rapport de la Cour. 

Des exemples sur des éléments que vous ne partagez pas ?

Ils sont détaillés dans ma réponse. Citons par exemple la lecture que fait la Cour du rôle respectif de l’office et des services d’Etat dans les départements. Les deux sont importants et essentiels, mais imputer les bons résultats de gestion de l’ODEADOM au seul fait que les DAAF fassent l’essentiel du travail pour les aides européennes n’est pas juste, ni étayé. Reprocher aux instances de l’office de ne pas arbitrer les évolutions nécessaires du programme POSEI est méconnaître le rôle respectif des différents organes.

Le conseil d’administration que je préside fournit des avis, des contributions, des propositions, il ne saurait lui être fait reproche des arbitrages faits ou non faits. Et évidemment quand la Cour réitère que le maintien de l’office se justifie d’abord par la portée « symbolique » que représente l’office pour les territoires, je réfute catégoriquement. C’est faire affront non seulement aux administrateurs élus ou désignés, mais également aux ministres qui trouvent dans l’office un vrai espace de dialogue et qui ont tenu à le maintenir, qui le sollicitent. Et surtout c’est faire fi de la nécessité de concertation totalement indispensable sur notre avenir agricole qui ne se construira pas dans les seuls bureaux parisiens des Ministères.

Et des exemples d’éléments sur lesquels vous êtes d’accord ?

Finalement c’est tout le fond de leur analyse que je partage assez : l’ODEADOM fait bien son travail d’organisme payeur, cela est souligné et c’est un résultat encourageant. Mais la Cour estime que l’ODEADOM devrait faire plus, que ce soit en termes d’analyse, de concertation, de propositions, et que ses moyens ne le permettent pas aujourd’hui. 

Et là nous sommes assez d’accord. C’est ainsi que je lis également les réponses qu’ont faites les administrations à ce rapport qui appuient l’office dans ses réalisations et en espèrent également des apports accrus. Et si la question passe par un débat sur les moyens, la taille de l’ODEADOM, les outils qu’ils développent, parlons-en sans tabou. Nous aurons des débats en conseil d’administration sur la base de ce rapport et de celui que nous attendons de la part des Ministères, également avec un peu d’impatience, pour bâtir le futur contrat d’objectif. Nous les aborderons avec clarté.

Aujourd’hui, « les instances nationales de concertation de l'office sont les seules existantes permettant un dialogue entre l'ensemble des acteurs du développement de l'agriculture Outre-mer », c’est le délégué interministériel Arnaud Martrenchar qui le dit dans sa réponse. C’est un constat et soyons au rendez-vous. Et ces rendez-vous sont nombreux tant les sujets agricoles sont importants dans les Outre-mer. Non seulement sur les outils financiers mais également sur les grandes orientations, le projet de loi d’orientation agricole qu’avance le ministre Fesneau, le chantier de la planification écologique, le suivi du CIOM de juillet 2023 par exemple mériteraient à l’évidence des volets agricoles ultramarins à partager. Mais le « réflexe ultramarin » que le gouvernement entend insuffler n’est pas encore totalement acquis dirons-nous.

Nous avons publié hier un article consacré à l’autre rapport de la Cour des Comptes relatifs aux aides agricoles. Qu’en pensez-vous ?

Je n’ai pas été saisi en amont du rapport, et je m'abstiendrai donc. Si les ministères veulent en parler au fond, nous le ferons, avec toutes les parties prenantes que sont les administrateurs au conseil de l’ODEADOM, les représentants de filière, les collectivités, les chambres d’agriculture, les administrations mais aussi les consommateurs et les salariés.

Les projets de l’ODEADOM à court et moyen terme ?

D’abord un grand séminaire en Guadeloupe fin octobre, organisé avec les chambres d’agriculture consacré au changement climatique et à l’agriculture des Outre-mer. Voilà un sujet totalement central qu’il convient de travailler d’urgence. Et l’ODEADOM le fait, avec le soutien des deux ministres référents, agriculture et Outre-mer. Ensuite le contrat d’objectif pour les 5 années à venir comme je l’ai évoqué, qui sera l’occasion de préciser le rôle, l’évolution, la destinée de l’office. Et rendez-vous à tous en 2024, ce seront les 40 ans de l’ODEADOM, nous célébrerons la jeunesse, la vitalité et l’énergie de l’Office, notamment à l’occasion du salon de l’agriculture.