Moins d’un mois après la Rencontre des Entrepreneurs de France (REF) à Paris, Bruno Blandin, président du MEDEF tire la sonnette d’alarme et affiche sa détermination : pour relancer l’économie de l’archipel, retenir les jeunes talents et sécuriser les territoires, il faut agir vite, simplifier les normes, renforcer les coopérations et mobiliser l’ensemble des acteurs politiques et économiques. Dans un contexte marqué par un ralentissement économique, un déséquilibre démographique et le narcotrafic, l’UDE-MEDEF Guadeloupe entend jouer un rôle moteur pour donner un nouveau souffle à la Guadeloupe. Pour Outremers 360, Bruno Blandin se confie sur les priorités et les actions à mener en vue d’une réelle transformation.
Pacte territorial : « Il est temps d’agir concrètement »
Tout avait pourtant bien commencé. La participation de l’UDE-MEDEF Guadeloupe à la REF, en août dernier constituait un signal encourageant. Un succès que souligne d’ailleurs son président : « Plus de 60 chefs d’entreprise guadeloupéens ont fait le déplacement, ce qui est une première ». Véritable vitrine de l’archipel : « Le stand de l’UDE-MEDEF Guadeloupe a permis à l'archipel de gagner en visibilité, aussi bien auprès des entrepreneurs que des responsables politiques présents. Nous avons également bénéficié du soutien de nos adhérents et partenaires que sont le Comité du tourisme des Îles de Guadeloupe, la CCI et la compagnie aérienne Corsair, ce qui a renforcé notre démarche de promotion de notre territoire. » explique t-il.
Mais la satisfaction a été de courte durée. De retour dans l’archipel, Bruno Blandin s’attaque aux enjeux structurels de l’île, en particulier le pacte territorial. « Le projet est soutenu par l’ensemble du monde économique, mais nous avons encore du mal à convaincre nos partenaires politiques, en particulier les collectivités majeures », déplore-t-il. « Il faut aller vers un véritable choc de simplification : il faut que nous prenions nos responsabilités afin de régler des sujets majeurs comme la distribution et l’assainissement de l’eau, le développement économique, la formation professionnelle, ... Aujourd’hui, chacun se renvoie la balle, et cela freine notre progression. »

En effet, pour Bruno Blandin, les normes imposées ne sont pas adaptées aux spécificités des Outre-mer. Il appelle à des propositions concrètes et insiste sur la nécessité d’une coopération claire et efficace entre acteurs économiques et politiques. « Sur le plan économique, nous avons une réunion importante en septembre avec l’État, notamment le ministre du Commerce, pour discuter des soutiens possibles : dispositifs de soutiens sociaux et économiques pour les entreprises en difficulté, mais aussi accompagnement des secteurs à développer comme l’agriculture, l'industrie ou l’artisanat. »
Car la situation des entreprises en Guadeloupe est préoccupante : « Il y a urgence à se faire entendre et à passer à l’action, pour que la Guadeloupe retrouve son dynamisme et offre de vraies perspectives à ses habitants. » Et d’ajouter : « Nous voulons taper du poing sur la table. Nous ne comptons pas rester passifs. Nous allons renforcer notre mobilisation et faire entendre notre voix. »
Démographie et attractivité : la difficile recherche de l’équilibre
L’enjeu est de taille. La Guadeloupe, comme l’ensemble des Antilles, fait face à une crise démographique majeure : une population vieillissante, un solde migratoire négatif et une natalité en baisse. Chaque année, de nombreux jeunes quittent l’archipel pour poursuivre leurs études ou chercher des opportunités ailleurs, sans forcément revenir.
Résultat : la pyramide des âges se déséquilibre, pesant lourdement sur la dynamique économique et sur la capacité d’investissement local. « La démographie reste un enjeu central. C’était le thème principal de notre dernière assemblée générale. » souligne Bruno Blandin qui illustre son propos avec un exemple concret : « De nombreuses petites communes n’ont pas de crèches. Comment voulez-vous stabiliser des mères de famille qui travaillent, si elles n’ont pas de solution pour la garde de leurs enfants ? C’est un sujet prioritaire pour l’avenir. »

Le président évoque également la formation professionnelle et la nécessité de créer de la valeur ajoutée pour retenir les jeunes talents : « La formation est quasiment en faillite en Guadeloupe, tout au moins celle qui est soutenue par la collectivité majeure. Faire revenir nos jeunes, c’est bien, mais encore faut-il leur donner des perspectives concrètes. Aujourd’hui, l’économie guadeloupéenne reste trop atone, et beaucoup d’entreprises souffrent d’un manque de dynamisme. Le BTP, par exemple, est en grande difficulté. »
Coopérations stratégiques et sécurité
Pour Bruno Blandin, le rôle des Outre-mer ne se limite pas à l’économie : il s’agit aussi de renforcer la sécurité et la coopération régionale. « Il faut d’abord rappeler que les Outre-mer représentent une véritable force pour la France », explique-t-il. « Notre rôle, c’est de convaincre les chefs d’entreprise et les investisseurs de l’Hexagone que nos territoires sont prêts à les accueillir pour créer de la valeur, des entreprises et de l’emploi. »
La coopération régionale est également cruciale face aux défis transnationaux : « Dans le cadre de la CARICOM (Caribbean Community), nous devons développer des partenariats solides avec les pays de la Caraïbe. Mais cette coopération doit aussi servir à traiter des sujets sensibles comme le narcotrafic. Une grande partie de la contrebande, de la drogue et des armes qui circulent en Guadeloupe, en Martinique ou en Guyane provient de cette zone. Il est donc indispensable que la France établisse avec ces États, des accords clairs pour lutter efficacement contre ces trafics. »
Urgence et détermination
Confrontées à de nombreux défis, les entreprises guadeloupéennes font preuve d’une grande capacité d’adaptation, comme le rappelle Bruno Blondin : « Les entreprises guadeloupéennes sont dirigées par des chefs d’entreprise courageux et résilients. Nous traversons des crises, nous surmontons les difficultés, et nous sommes toujours là, même si certaines structures disparaissent », déplore-t-il. Il conclut sur une note d’espoir pour transformer ces défis en véritables opportunités : « L’avenir de la Guadeloupe dépendra de notre capacité à agir ensemble, avec détermination ».
Pour aller plus loin :
Bruno Blandin reconduit à la présidence de l’UDE-MEDEF Guadeloupe