Les 9 et 10 septembre prochains, l'ACCD'OM sous la houlette de sa vice-présidente Sophie Charles, et avec le soutien du CNFPT de Guyane, organise en Guyane un colloque sur la situation de l'illettrisme et l'illectronisme en Outre-mer à l'occasion des journées nationales de lutte contre l'illettrisme. Pour Outremers, Sophie Charles aborde les objectifs de ce colloque.
« L'Illettrisme et l'illectronisme sont des handicaps importants en Outre-Mer, il est urgent d’agir », avance Sophie Charles. La maire de Saint Laurent du Maroni et Vice-Présidente de l’Association des Communes et Collectivités d’Outre-mer, est particulièrement sensibilisée et investie sur la question des handicaps en raison de son expérience d'ancienne dirigeante d’établissements médico-sociaux. C’est ainsi qu'à sa demande en janvier 2023 que les équipes de l’ACCD’OM ont lancé une consultation des collectivités sur la problématique de l’analphabétisation en Outre-Mer. Cette consultation a permis de relever plusieurs constats. Premier constat, l’illettrisme est toujours une problématique très forte des territoires ultramarins en 2024. «Il est important de faire la différence entre analphabète et illettré. Le premier n’a jamais eu accès à l’apprentissage de la lecture et représente environ 2% de la population en France, alors que le second a eu accès à l’apprentissage de la lecture mais ne l’a pas assimilé ou l’a perdu. En conséquence, les personnes illettrées, qui sont environ 12% en France, ont des difficultés à déchiffrer un texte simple. En outre-mer ces chiffres moyens sont doublés !»
L’immigration, en particulier en Guyane et à Mayotte, occasionne l’arrivée sur le territoire d’un grand nombre de personnes ne sachant lire ou n'ayant pas appris à lire en français, faisant grimper les chiffres de l’analphabétisation. En parallèle, et en raison de plusieurs facteurs, l’illettrisme lui passe à une moyenne de 30%, avec des chiffres encore plus importants sur certains territoires. Pour résumer, 3 ultramarins sur 10 sont en situation d’analphabétisation ou d’illettrisme. « Deuxièmement, parmi ces 30% d’illettrés, certains occupent des emplois de catégorie C dans nos collectivités.Ces derniers doivent cependant faire avec un grand nombre de notes de services, instructions de sécurité et autres documents transmis par leur direction. Le sujet étant encore très tabou, aucune mesure n’est prise pour s’adapter à cette situation handicapante», ajoute-t-elle.
Troisièmement, l’illectronisme s'ajoute au problème de l’illettrisme. « A l’ère du tout numérique, les personnes âgées, mais également beaucoup de nos jeunes de moins de 25 ans sont encore incapables d’effectuer leurs démarches en ligne. CAF, Impôts,Sécurité sociale, France travail, mais également rédaction de CV, recherche d’emploi, nos vies sont aujourd’hui rythmées par le numérique et nos concitoyens sont nombreux à ne pas savoir faire. Si le travail des France-Service nous permet d’aider nos populations dans leurs démarches, il apparaît que la question de l’illectronisme est sous-évaluée et qu’il est urgent de mettre en œuvre des mesures qui permettront de d’aider durablement nos populations. Nous souhaiterions notamment un élargissement de l’offre de services pour répondre aux besoins aujourd’hui non-couverts et également une évolution du dispositif pour garantir sa pérennisation et faciliter le « aller vers».
Fort de ces constats, l'ACCD'OM organise ce colloque en Guyane, avec une journée sur l’île de Cayenne et une journée à Saint Laurent du Maroni. Il permettra de sensibiliser les élus à ces problématiques qui touchent encore trop fortement les territoires d’Outre-Mer à travers les trois océans. « Des solutions existent et nous voulons les mettre en avant pour pouvoir aider les collectivités à les mettre en œuvre au service des territoires. Certaines solutions sont d’ailleurs des initiatives venues des Outre-mer, et il est primordial pour moi de montrer la résilience et l’innovation ultramarines».
L’évènement se terminera par une visite des communes du fleuve Maroni, afin de montrer aux élus qui auront fait le déplacement des autres territoires, la difficulté encore plus accentuée dans zones enclavées de l’Ouest guyanais. « Les territoires du Pacifique connaissent des situations très similaires avec la double insularité et les problèmes de connectivité, il est donc essentiel que nous partagions nos problèmes et nos solutions afin de résorber ces handicaps. », a conclu Sophie Charles.