Les Instituts d’Émission d’Outre-mer (IEDOM-IEOM) sont à l’origine d’un rapport publié ce mercredi, mettant en avant une évolution favorable des délais de paiement constatés en Outre-mer. Un constat de bon augure pour les économies ultramarines, mais tempéré par des situations ponctuellement difficiles.
Dans son rapport, l’IEDOM-IEOM met en avant plusieurs signes encourageants caractérisent l’évolution des délais de paiement des entreprises en 2021 et des organismes publics en 2022 dans les Outre-mer.
Les délais clients et fournisseurs ont nettement baissé dans les territoires de la zone euro pour s’établir respectivement à 55 jours de chiffre d’affaires (-4 jours par rapport à 2020) et 65 jours d’achats (-5 jours). Ce repli est particulièrement marqué dans les secteurs de la construction et du transport-entreposage où le recul atteint une dizaine de jours, une ampleur inédite sur les quinze dernières années. Les délais fournisseurs demeurent cependant supérieurs à 60 jours (correspondant au plafond fixé par la loi de modernisation de l’économie (LME) du 4 août 2008).
En Polynésie française, les délais clients s’établissent à 40 jours de chiffre d’affaires et les délais fournisseurs à 54 jours d’achats, inférieurs au plafond légal. La loi applicable en Nouvelle-Calédonie prévoit un délai de règlement ne devant pas dépasser 30 jours. Si les délais de paiement ne respectent pas ce seuil, ils sont parmi les plus faibles des Outre-mer à 42 jours pour les délais clients et 46 jours pour les délais fournisseurs, soit des niveaux équivalents à ceux de l’Hexagone (42 jours pour les délais clients et 48 jours pour les délais fournisseurs).
Pour la première fois, le délai fournisseur moyen des très petites entreprises (TPE) des territoires de la zone euro est inférieur à 60 jours et respecte le plafond légal. Le solde commercial, qui mesure la pression exercée sur les trésoreries par les délais de paiement, s’établit à douze jours de chiffre d’affaires dans les territoires de la zone euro, à un niveau similaire à celui de l’Hexagone (onze jours). La contrainte s’élève à quinze jours en Nouvelle-Calédonie et huit jours en Polynésie française.
Ces évolutions favorables ne doivent pas occulter des situations ponctuellement difficiles : Le solde commercial des Entreprises de Taille Intermédiaire (ETI) des territoires de la zone euro s’est nettement alourdi en 2021 (+7 jours, à 29 jours de chiffre d’affaires). Si les ETI ne représentent qu’une minorité des entreprises ultramarines, les montants concernés sont néanmoins significatifs et les difficultés des ETI sont susceptibles de se diffuser à une large part du tissu économique.
37 % des entreprises dans les territoires de la zone euro subissent des retards de paiement, contre 25 % en Polynésie. Cette proportion atteint 54 % en Nouvelle-Calédonie, étant entendu que les retards y sont définis à partir du seuil légal de 30 jours. Les secteurs de la construction et des activités de soutien aux entreprises sont particulièrement vulnérables aux délais de paiement. Les délais de paiement restent structurellement longs en Guyane et à Mayotte : les délais clients (à plus de 70 jours de chiffre d’affaires) y sont supérieurs d’une vingtaine de jours aux autres territoires ultramarins.
Le délai global de paiement des établissements publics de santé des territoires de la zone euro, déjà très dégradé, s’est à nouveau détérioré en 2022 pour atteindre 109 jours, soit plus du double du seuil réglementaire de 50 jours en raison d’une situation de trésorerie toujours extrêmement tendue. Il faut noter cependant que le délai global de paiement de la commande publique de l’État diminue quant à lui de près de cinq jours en 2022 pour s’établir à 19,3 jours.
De fait, les retards de paiement des clients ont un impact important sur les entreprises qui, à leur tour, peuvent être incitées à différer le règlement de leurs factures auprès de leurs fournisseurs. Ainsi, la trésorerie nette susceptible d’être mise à disposition de l’ensemble des entreprises ultramarines si aucun retard de paiement n’était constaté atteindrait 644 millions d’euros dans les territoires de la zone euro, 199 millions d’euros (23,8 milliards de F CFP) en Nouvelle-Calédonie et 49 millions (5,9 milliards de F CFP) en Polynésie française.
Il faut souligner la forte hétérogénéité des entreprises face à la problématique des délais de paiement. L’évolution du solde du crédit interentreprises par rapport à la période précédant la crise sanitaire met en évidence des variations très contrastées selon les secteurs d’activité. Dans les territoires de la zone euro, le besoin de financement lié aux délais de paiement est ainsi en recul de dix jours pour l’industrie et les transports alors qu’il ne se réduit que de quatre jours pour les activités de soutien aux entreprises et qu’il est stable pour la construction. Ce sont donc les secteurs subissant les charges de trésorerie les plus lourdes qui voient leur situation s’améliorer le moins.
Sur la base de ces constats, les efforts en matière de lutte contre les retards de paiements doivent être poursuivis en accélérant la dématérialisation du traitement des factures ; la généralisation d’une comptabilité d’engagement permettrait de progresser sur ce point.
Damien Chaillot