À l’heure où elle s’apprête à rejoindre la Guadeloupe pour de nouvelles fonctions, Chantal Maurice, directrice régionale d’Orange en Guyane, revient sur ses missions dans un territoire marqué par des défis majeurs. En Guyane, Orange a dû faire face à un double défi : déployer des infrastructures de pointe dans des conditions géographiques extrêmes, tout en agissant comme un acteur engagé pour le développement économique et social. Pour Outremers 360, Chantal Maurice revient sur les actions structurantes qu’elle a menées pour soutenir durablement la croissance technologique et l’inclusion numérique en Guyane.
Le double défi guyanais : connecter un territoire hors-norme
La Guyane, avec sa superficie équivalente à celle du Portugal couvert à plus de 90% par une forêt tropicale, impose des contraintes uniques. La population se concentre principalement sur une bande littorale et le long des fleuves, comme le Maroni. Pour un opérateur comme Orange, cette configuration représente ce que Chantal Maurice nomme un double défi.
Pour y parvenir, Orange a adopté une stratégie pragmatique basée sur un mix technologique adapté aux réalités du terrain : « Ce territoire présente ainsi un double défi : mener à bien une mission déjà achevée depuis longtemps ailleurs, tout en adaptant les déploiements technologiques à des contraintes locales majeures. Sur la zone littorale, la fibre optique se déploie d’est en ouest, de Saint-Georges à Apatou, dernière commune accessible par la route. Au-delà, pour les villages situés le long du fleuve, le satellite prend le relais. Ce modèle hybride représente un enjeu majeur pour l’avenir du réseau. »
Ce mix technologique sur mesure répond directement au paradoxe statistique fondamental de la Guyane. Car le fossé immense entre la couverture de la population et celle du territoire : « Ce modèle hybride représente un enjeu majeur pour l’avenir du réseau. Car si la couverture de la population atteint environ 98 % en 4G, celle du territoire, elle, reste très faible, entre 3 et 5 %, un indicateur peu pertinent dans un espace où l’habitat est extrêmement dispersé. » L’objectif prioritaire est d’apporter une connectivité équitable aux habitants les plus éloignés.
À ces défis structurels s’ajoute une autre difficulté : garantir la continuité des communications en cas de catastrophes naturelles dans un territoire où les contraintes environnementales n’ont pas d’équivalent en France hexagonale.
Anticiper l'imprévisible : la solution Safety Case
Dans une région particulièrement exposée aux risques climatiques, sismiques et cycloniques, la résilience des réseaux est une priorité absolue. En situation de crise, qu'il s'agisse d'une catastrophe naturelle, d'un sabotage ou d'une cyberattaque, les réseaux d'énergie et de communication sont les premiers à tomber.

Face à cet enjeu, Orange a développé un dispositif innovant pour garantir une reprise rapide des communications, la Safety Case qui permet de rétablir rapidement les communications mobiles et internet, même quand l’énergie est interrompue : « L’idée, c’est que n’importe qui puisse utiliser cet équipement : le premier arrivé sur place peut le mettre en route, sans technicien spécialisé », précise Chantal Maurice. Léger, transportable, autonome sur batterie et compatible avec le satellite, il offre une solution immédiate pour les collectivités, les pompiers ou les hôpitaux.

Testé à Mayotte et déployé en Guyane, Martinique et Guadeloupe, le dispositif a déjà permis de monter un hôpital de campagne et d’assurer la continuité de services essentiels, tout en maintenant la population connectée grâce à « un réseau sécurisé pour les urgences et une seconde ligne pour que la population reste en contact avec ses proches », conclut-elle.
L'inclusion numérique comme mission sociétale
Pour Orange, la responsabilité ne se limite pas à fournir un accès à Internet. Comme le rappelle Chantal Maurice, la mission consiste aussi à veiller à « l'usage qui est fait des outils que nous mettons entre les mains du clients ». Cet engagement s’incarne dans une série d’initiatives menées par la Fondation Orange, qui œuvre auprès des publics les plus vulnérables pour favoriser leur inclusion numérique.

En 2015, Orange lance les Maisons digitales en Guyane. « Ces espaces, comparables à des tiers-lieux, sont portés par des associations locales et accompagnés par la fondation. Ces structures offrent des formations gratuites d’une durée de six à douze mois aux femmes, notamment dans les quartiers prioritaires. L'objectif est de renforcer leur culture digitale et de leur offrir davantage d’autonomie. Pour les aider dans leur recherche d'emploi, leurs démarches administratives dématérialisées ou simplement pour mieux accompagner leurs enfants dans leur scolarité. » Déployées aux Antilles, en Guyane et à La Réunion, elles forment aujourd’hui un réseau solidaire qui répond à des besoins concrets et croissants.
Dans le sillage des Maisons digitales, les FabLabs Solidaires voient le jour. Destinées aux 18-25 ans en décrochage scolaire, ces structures offrent : «une dimension plus technique (imprimantes 3D, machines-outils) et visent à développer des compétences numériques concrètes et à remobiliser les jeunes vers un parcours d'insertion. » En renforçant leurs compétences pratiques, ces Fablabs offrent une porte d’entrée vers la formation professionnelle, l’emploi ou la reprise d’études.

Enfin, en 2022, Orange a accompagné quinze lycéens de la filière Systèmes numériques du lycée Jean-Marie Michotte dans un projet pédagogique sur le déploiement de la fibre en Guyane, aboutissant à la création et à la présentation de maquettes 3D.
Un partenariat avec le RSMA de Guyane
L'initiative phare de la Fondation Orange en Guyane, qui incarne sa philosophie d'intervention ciblée et à fort impact, est le partenariat unique noué avec le Régiment du Service Militaire Adapté (RSMA). Acteur central de l’insertion professionnelle, le RSMA accueille chaque année plus de 800 jeunes et affiche un taux de sortie vers l’emploi ou la formation supérieur de 80 %, une performance qui en fait un pilier essentiel pour la jeunesse guyanaise.

À leur arrivée, près de 70 % des jeunes engagés au RSMA se trouvent en situation d’illettrisme. Un défi pédagogique majeur, qui rend nécessaire d’apposer une approche numérique à la formation militaire, civique et professionnelle déjà en place. C’est dans ce contexte qu’a été créé le FabLab au sein du camp de Saint-Jean-du-Maroni : « Bien plus qu’un simple espace technologique, ce FabLab constitue une réponse éducative innovante. En s’appuyant sur la pratique et le visuel, il contourne l’obstacle de l’illettrisme et ouvre un accès concret aux savoirs fondamentaux. Les jeunes y découvrent les bases de la culture digitale, tout en fabriquant des objets en 3D, une approche qui transforme l’apprentissage en expérience tangible, gratifiante et surtout valorisante. » précise Chantal Maurice.
À l’heure où s'achèvent ses missions en Guyane, Chantal Maurice ne cache pas une émotion certaine : « On a essayé de mener tous nos projets du mieux possible, et pour la plupart, ils ont très bien avancé », ajoute-t-elle, lucide sur la nécessité de passer la main. La Guadeloupe l’attend avec son lot de nouveaux défis.
























