Dans un courrier adressé aux élus calédoniens, Sébastien Lecornu a détaillé les contours d’un pacte de refondation économique de 262,5 milliards de Fcfp sur cinq ans pour l’archipel. Il prévoit le financement d’un programme d’investissements, un soutien aux collectivités et le renforcement de l’attractivité économique. Il faudra toutefois que le budget 2026 de la France soit adopté, et que la Nouvelle-Calédonie s’engage sur la réforme de son modèle. Explications de notre partenaire Les Nouvelles Calédoniennes.
Confrontée à une crise économique sans précédent et à une perte de recettes fiscales estimée à 60 milliards de francs en 2026, la Nouvelle-Calédonie attendait désespérément des annonces de l’État, qui tardait à dévoiler le niveau de son soutien financier au territoire.
C’est finalement le Premier ministre qui s’est chargé de détailler l’accompagnement financier envisagé par le gouvernement français. Dans un courrier adressé aux responsables calédoniens ce vendredi 5 décembre, Sébastien Lecornu a dévoilé les contours d’un « pacte de refondation économique » d’un montant total de 262,5 milliards de francs (2,2 milliards d’euros) en « réponse à la crise économique profonde que connaît le territoire ». Il repose sur cinq piliers.
Renforcer l’attractivité du territoire
C’est la priorité de l’État en Nouvelle-Calédonie : « il est nécessaire de renforcer l’attractivité du territoire afin de favoriser la création d’emploi par les entreprises privées », estime Sébastien Lecornu. Le plan prévoit un soutien cumulé de 36 milliards de Fcfp sur cinq ans, concentrés sur plusieurs mesures : la création d’un « ensemble de zones franches autour des ports en eaux profondes et des aéroports ouverts sur le Pacifique Sud ». Des sites sur lesquels les entreprises profiteront d’un « cadre fiscal attractif et de procédures simplifiées ».
Il s’agira également de financer une « exonération totale d’impôt sur les sociétés pour toutes les petites et moyennes entreprises (hors nickel) générant un chiffre d’affaires jusqu’à 4 millions d’euros », soit 477 millions de Fcfp. Enfin, cette somme permettra d’augmenter le soutien de l’État « au micro-crédit pour les plus petites entreprises », en particulier celles liées au tourisme ou à la pêche dans les îles et en tribus.
Le Premier ministre indique également que la Nouvelle-Calédonie va bénéficier d’un mécanisme de solidarité nationale pour « faire face aux difficultés d’assurabilité ».
23 milliards d’investissements publics
Deuxième pilier : un programme d’investissements publics de 23 milliards de francs sur cinq ans. Les projets concernés relèveront du « développement de la pêche, du tourisme et de l’agriculture », mais aussi du « désenclavement du territoire », de « l’accès aux services essentiels » et de l’adaptation aux effets du changement climatique. La sélection des projets et le pilotage du plan « seront assurés par l’État ».
La « transformation » de la filière nickel
Plus question, pour l’État, de financer des usines de nickel qui ne sont pas rentables. Dans son courrier, Sébastien Lecornu enjoint les autorités locales à élaborer, avec l’appui de Paris, un « plan de transformation de la filière » au premier semestre 2026.
L’objectif : parvenir à un modèle rentable, validé par les experts, une condition à un éventuel accompagnement financier de l’État des différents acteurs industriels. Il s’agira notamment de « décarboner le mix énergétique du territoire » et offrir un coût de l’électricité « compétitif » aux usines.
Pour cela, un travail sur le Schéma pour la transition énergétique de la Nouvelle-Calédonie (Stenc) sera réalisé. Le gouvernement Lecornu s’engage également à financer la « prochaine étude nécessaire à la réalisation de la station de transfert d’énergie par pompage (Step) de Tontouta ».
8 milliards contre le décrochage scolaire
Le pacte de refondation économique a également pour ambition « d’ouvrir à la jeunesse calédonienne de nouvelles perspectives d’avenir ». Un programme de lutte contre le décrochage scolaire et professionnel des jeunes de 15 à 25 ans sera financé à hauteur de 8,3 milliards de francs sur cinq ans. Il permettra notamment la création d’une nouvelle compagnie du Régiment du service militaire adapté (RSMA) dans le Grand Nouméa, le financement de 1 000 postes de services civiques par an et la création de 100 postes d’éducateurs spécialisés.
36 milliards de Fcfp pour les collectivités
Le député Nicolas Metzdorf l’a révélé, jeudi 4 décembre, en assemblée de province Sud, Sébastien Lecornu vient de le confirmer : l’État va octroyer 36 milliards de Fcfp aux collectivités territoriales pour l’année 2026. Cette aide prendra la forme d’un prêt garanti, ce qui devrait agacer un certain nombre de responsables politiques calédoniens, qui accusent l’État de surendetter la Nouvelle-Calédonie.
Une partie de ce prêt, jusqu’à 12 milliards de Fcfp, pourra toutefois être transformée en subventions, indique Sébastien Lecornu, « sous condition de la mise en œuvre effective de réformes nécessaires au rééquilibrage des finances de la Nouvelle-Calédonie ».
Pour les années suivantes, le Premier ministre promet une nouvelle aide de 36 milliards, cette fois sur quatre ans (2027-2030), pour les collectivités. « En revanche, à compter de 2030, l’État n’interviendra plus financièrement que dans ses domaines de compétences ». Par conséquent, à l’issue de cette phase de soutien, « la Nouvelle-Calédonie devra être en capacité d’assumer seule le financement de l’ensemble de ses compétences ».
L’adoption de ce pacte de refondation économique dépend toutefois du Parlement. En effet, ce programme de financement sera intégré, à travers six amendements, au projet de loi de finances 2026, qui fait toujours l’objet de vives oppositions entre les groupes politiques nationaux.
Baptiste Gouret pour Les Nouvelles Calédoniennes























