À l’issue de son 46e congrès extraordinaire du samedi 6 décembre, le FLNKS annonce l’envoi dès dimanche d’une délégation auprès des groupes parlementaires et du président de la République. Le mouvement entend dénoncer le projet d’accord de Bougival, alerter sur la situation du pays et réclamer un cadre de discussions fondé sur « la neutralité de l’État et le consensus, hérités de Matignon et de Nouméa ». Un sujet de notre partenaire Les Nouvelles Calédoniennes.
À Nimbayes, samedi 6 décembre, le FLNKS a tracé sa feuille de route : repartir à Paris pour « remettre l’État face à ses responsabilités ». Au lendemain de son 46e congrès extraordinaire à Ponérihouen, le FLNKS a présenté, ce mercredi 11 décembre, les orientations arrêtées pour la suite du processus politique.
Au cœur des décisions : l’envoi dès dimanche d’une délégation à Paris pour rencontrer les groupes parlementaires et solliciter une entrevue avec le président de la République. Objectif affiché : « reprendre le bon chemin » et réaffirmer le refus de l’accord de Bougival, présenté par le mouvement indépendantiste comme une impasse politique.
De retour en Nouvelle-Calédonie après sa détention en métropole, Christian Tein a ouvert la conférence de presse en replaçant la situation du pays dans une continuité historique. Il a rappelé les alertes « ignorées » sur le dégel du corps électoral et estimé que « l’État prendra sa responsabilité dans ce qui s’est passé » en mai 2024. Devenu président du FLNKS alors qu’il était encore incarcéré, il dit porter une fonction « chargée de la souffrance de notre peuple » et pose l’horizon : « Fermer définitivement la parenthèse coloniale, avec l’ensemble des concitoyens du pays ».
Demande d’une mission de l’ONU en Nouvelle-Calédonie
Roch Wamytan, son prédécesseur à la tête du mouvement, est revenu longuement sur la passation coutumière qui a formalisé ce changement de présidence. Selon lui, ce geste a « éclairci la route et l’unité du FLNKS », permettant au FLNKS de se projeter vers « la pleine souveraineté ».
Il a détaillé le volet international adopté au congrès : demande officielle d’une « mission des Nations unies en Kanaky », renforcement de la présence du FLNKS au sein des organisations régionales et création d’une cellule diplomatique dédiée. Il s’est également félicité de la résolution adoptée en 2025 par l’Assemblée générale de l’ONU et de l’institution d’une journée internationale contre le colonialisme le 14 décembre, qui confirment selon lui que « le système colonial français est toujours actif ».
Sur le terrain institutionnel, Laurie Humuni (RDO) a insisté sur l’opposition ferme du mouvement à la consultation prévue le 15 mars. Elle a dénoncé une démarche « juridiquement bancale et politiquement risquée », estimant que l’État cherche à imposer l’accord de Bougival « sans consensus », en rappelant le vote fracturé du Congrès de l’archipel sur la date de la consultation. Pour elle, le pays ne peut avancer « qu’à travers un dialogue loyal et structuré », en bilatéral avec l’État mais aussi avec l’ensemble des forces politiques, pour construire un projet de souveraineté.
Exigence de « neutralité absolue de l’État »
Gilbert Tyuienon a, de son côté, détaillé la mission qui sera envoyée à Paris. Elle portera trois messages : le refus de l’accord de Bougival, l’exigence d’un retour aux méthodes qui ont permis les accords de Matignon et de Nouméa -« neutralité absolue de l’État » et « consensus »- et une alerte sur la situation économique, sociale et politique du pays.
Il a rappelé que l’ouverture du corps électoral a été signalée comme une « ligne rouge » durant des décennies : « Pas touche au corps électoral », a-t-il répété, estimant qu’il incombe désormais à l’État de « réparer les dégâts ». La délégation compte également demander une rencontre avec le chef de l’État, « en tant que mouvement de libération nationale ».
La séquence de questions-réponses a confirmé la volonté du mouvement de mettre en avant l’unité du peuple kanak et de replacer le débat dans une logique de décolonisation. Le FLNKS annonce également que sa charte révisée, adoptée lors du congrès de Ponérihouen, sera prochainement mise en ligne.
Concernant le déplacement à Paris, Christian Tein en a résumé l’enjeu : obtenir que l’État « sorte le peuple kanak du ravin pour le remettre sur le chemin », afin de retrouver un cadre de discussions permettant d’aborder sereinement l’avenir institutionnel. « La stabilité du pays passe par le peuple kanak », a-t-il insisté, ajoutant que la justice et notamment les enquêtes en cours devront également faire partie des discussions.
Julien Mazzoni pour Les Nouvelles Calédoniennes























