Nouvelle-Calédonie : Décès de Déwé Gorodey, auteure et figure de la lutte indépendantiste kanak

©Édition Bruno Doucey

Nouvelle-Calédonie : Décès de Déwé Gorodey, auteure et figure de la lutte indépendantiste kanak

Auteure et figure de la lutte indépendantiste kanak, Déwé Gorodey est décédée des suites d’une longue maladie, ce dimanche en Nouvelle-Calédonie, à l’âge de 73 ans.

Née dans une tribu de Ponérihouen le 1er juin 1949, Déwé Gorodey a occupé plusieurs postes au sein du gouvernement collégial calédonien, de 1999 à 2017, sous les présidences des non indépendantistes Jean Lèques à Philippe Germain, en passant par Pierre Frogier, Harold Martin ou Philippe Gomes. Elle endossa les portefeuilles de la Culture, de la Condition féminine, de la Citoyenneté, de la Jeunesse et des Sports, des Affaires coutumières et des relations avec le Sénat coutumier. 

Diplômée de Lettres modernes à l’Université Paul Valery de Montpellier, Déwé Gorodey devient, à son retour au pays, professeur de français, puis professeur de paicî (une des 27 langues kanak) au sein de l’École populaire kanak (les établissements scolaires créés par les indépendantistes pendant les Évènements des années 1980) dans sa tribu natale de Ponérihouen. Elle donne enfin des cours d'histoire de la littérature du Pacifique et de littérature mélanésienne contemporaine à l'Université de la Nouvelle-Calédonie à Nouméa de 1999 à 2001.

L’emblématique figure indépendantiste s’engage dans les années 1970 au sein des Foulards Rouges et du Groupe 1878, deux groupes d'indépendantistes révolutionnaires, avant de participer à la création du Parti de Libération Kanak (Palika) en 1976. Le Palika devient ensuite une des composantes majeures du FLNKS et pendant les Événements, Déwé Gorodey participe à des missions du front indépendantiste dans le Pacifique, en Australie, en Algérie, au Canada, à Mexico et à l'ONU. Déwé Gorodey fut également une militante féministe, engagée pour la cause des femmes kanak, aux côtés notamment de Marie-Claude Tjibaou.  

Déwé Gorodey fut une défenseure acharnée des langues kanak, des signes identitaires et de leur enseignement. Elle participa activement à la création de l’Académie des Langues kanak et du Comité de pilotage sur les signes identitaires. Elle a également milité pour transformer la date controversée du 24 septembre, fériée en Nouvelle-Calédonie, date anniversaire de la prise de possession de l'archipel par la France en 1853 et revêtant ainsi un aspect négatif pour les indépendantistes, en une célébration plus consensuelle de la citoyenneté néo-calédonienne. D’abord « Journée citoyenne », cette date devient « Fête de la citoyenneté », permettant aux habitants de l’archipel d’ « assumer » leur « histoire commune ». 

Femme de lettres à la plume singulière, Déwé Gorodey est aussi l’auteure de nombreux textes, contes, poèmes, nouvelles, devenus des références de la littérature Kanak, calédonienne et océanienne. On citera Sous les cendres des conques, son premier recueil de poèmes, Utê Mûrûnû, petite fleur de cocotier, une nouvelle, Kënâké 2000, une pièce de théâtre, L’Épave, un roman psychologique sur le thème des violences faites aux femmes ou encore, A l’orée du sable, son dernier recueil de poèmes.