Nickel calédonien : 2022, année record pour Eramet, mais « année de perte » pour la SLN

©Facebook / Société Le Nickel

Nickel calédonien : 2022, année record pour Eramet, mais « année de perte » pour la SLN

Le groupe minier français Eramet, maison-mère de la Société le Nickel (SLN) en Nouvelle-Calédonie, mise plus que jamais sur l'exploitation des métaux de la transition énergétique et une accélération de ses investissements en 2023, après une année 2022 de records. Pour sa part, la SLN a annoncé une « année de perte » et un résultat net à moins 250 millions d’euros.

Le groupe a plus que doublé son bénéfice net en 2022, à 740 millions d'euros, une « première » permise par un « contexte économique porteur au 1er semestre » et une flambée des matières premières, a annoncé l'entreprise mercredi. Après des années compliquées, le groupe a réalisé des « résultats historiques », selon les termes de la PDG Christel Bories, lors d'un point presse avec quelques journalistes. « Notre repositionnement stratégique terminé, l'année 2023 marque l'entrée dans une nouvelle ère pour Eramet », a-t-elle affirmé.

Le métallurgiste spécialisé dans les aciers spéciaux pour la défense et l'aéronautique Aubert et Duval, cédé à Airbus, « devrait sortir du périmètre du groupe fin mars », après l'obtention des feux verts des autorités de la concurrence concernées. « Le processus a pris du retard » pour obtenir le feu vert en Chine, « mais l'opération devrait se boucler dans les prochains jours », a assuré Christel Bories. Le groupe a par ailleurs reçu mardi une proposition de rachat du fonds Syntagma Capital pour le spécialiste des aciers Erasteel, que le groupe avait aussi mis en vente, a indiqué la PDG.

« Nous pouvons désormais nous appuyer sur un socle très solide d'actifs miniers générateurs de croissance », a-t-elle commenté, en rappelant qu'Eramet exploitait « la plus grande mine de nickel du monde », à Weda Bay en Indonésie, depuis 2019, ainsi que « la plus grande mine de manganèse au monde », située au Gabon. L'an passé, Eramet a réalisé un chiffre d'affaires de 5 milliards d'euros, en hausse de 37% par rapport à celui de 2021, et un bénéfice d'exploitation également historiquement élevé de 1,5 milliard d'euros.

« L'année 2023 va être une année d'accélération de la croissance sur les projets d'investissement », notamment sur les métaux de la transition énergétique comme le lithium et le nickel, a ajouté Christel Bories. Au total, le groupe devrait réaliser « près de 600 millions d'euros d'investissement en 2023 ». Le projet de mine de lithium en Argentine, mené avec un partenaire chinois, Tsingshan, mis sous cocon durant la crise sanitaire, « devrait démarrer sa production au premier trimestre 2024 », a précisé la PDG, en visant 24 000 tonnes de production par an dans un premier temps. Le groupe prévoit ensuite un « triplement rapide de la capacité de production annuelle » du site, dont les réserves sont évaluées à 10 millions de tonnes de lithium.

Cet investissement, financé à 50% par chacun des deux partenaires, s'élève à quelque 700 millions d'euros au total pour la première phase. « Pour la deuxième phase, l'enveloppe sera significative, mais ne sera pas le double de ce que nous aurons investi sur la première phase », a signalé le directeur financier du groupe, Nicolas Carré. Le projet d'exploitation de lithium géothermal en Alsace devrait quant à lui voir le jour « d'ici la fin de la décennie », selon Christel Bories.

Le groupe compte aussi sur une décision d'investissement « d'ici la fin de l'année » pour son projet de production de nickel-cobalt de qualité batterie avec l'allemand BASF en Indonésie. « Nous préférons attendre d'avoir avancé un peu plus dans les études d'ingénierie avant de prendre la décision finale d'investissement », a dit Christel Bories, « mais il n'y a aucune remise en cause du projet, acteur-clé des métaux pour les batteries ».

 « L'avenir du nickel en Nouvelle-Calédonie »

Un point d'interrogation néanmoins pèse sur la suite des activités d'extraction du nickel en Nouvelle-Calédonie. Le groupe a récemment annoncé un plan d'urgence, en lien avec l'État, pour préserver la trésorerie à court terme et éviter un dépôt de bilan de sa filiale SLN (Société le Nickel). « Cette solution est une solution à court terme qui ne résout pas les problèmes à long terme que sont le problème de l'alimentation électrique et de l'accès à nos gisements miniers », a indiqué Christel Bories. « Il est important que la Nouvelle-Calédonie et l'État se penchent sur l'avenir du nickel en Nouvelle-Calédonie », a-t-elle souligné, en se disant « ouverte à toutes les solutions porteuses d'une solution à long terme ».

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Dans un communiqué, la SLN a annoncé une « année de perte » en 2022, et un résultat net de moins 250 millions d’euros, lié à « un contexte local impacté par des intempéries exceptionnelles et une très forte augmentation des coûts énergétiques liés au contexte international ». « Face à la dégradation de sa trésorerie, la SLN a élaboré au quatrième trimestre un Plan de Progrès d'Urgence de 10 milliards de francs d'économies », en complément d’un «prêt de l'État pour un montant de 4,8 milliards » de Fcfp (40,2 millions d’euros). Un prêt qui permettra à l’opérateur historique calédonien d’écarter le risque de cessation de paiement, tandis que l’État demande aux acteurs miniers locaux une stratégie-pays autour du nickel. 

La SLN prévoit en 2023, et « sous réserve d'un fonctionnement normal des opérations », un volume d’exportation de 3,5 millions de tonnes humides et 45 000 tonnes de ferronickel, contre 3 millions de tonnes humides et 40 000 tonnes de ferronickel en 2022.

Avec AFP.