Histoire Outre-mer : Il y a 75 ans, les survivants du Bataillon du Pacifique rentraient enfin chez eux !

Soldats du Bataillon d'infanterie et de marines du Pacifique en Tripolitaine en février 1943 ©Musée de l’Ordre de la Libération

Histoire Outre-mer : Il y a 75 ans, les survivants du Bataillon du Pacifique rentraient enfin chez eux !

2021 est une année doublement historique puisque sont commémorés les 75 ans du retour du Bataillon du Pacifique mais également les 80 ans de leur départ le 21 avril 1941 de Papeete, le 5 mai de Nouméa d’où ils partent ensemble vers la Nouvelle-Zélande et l’Australie avant de rejoindre l’Afrique, l’Europe et les zones de combats. 

Il y très exactement 75 ans aujourd’hui, le 5 mai 1946, un an après la fin de la Seconde Guerre mondiale, les volontaires calédoniens et tahitiens du Bataillon du Pacifique sont de retour à bord du Sagittaire qui accoste le 5 mai à Papeete puis le 21 mai à Nouméa. Le navire ramène également des volontaires ayant appartenu à d’autres unités de la France libre : en tout, ce sont plus de 2 000 personnes qui appareillent le 14 mars 1946 du port de Marseille et font deux escales techniques en Martinique et en Guadeloupe avant de gagner le Pacifique. 

Hommage à nos héros ultramarins

« 2020 et 2021 sont des années d’anniversaires historiques : il est donc important de rendre hommage à nos héros ultramarins » comme le rappelle la Tahitienne Titania Redon dans Raconte-moi une Histoire d’outre-mer. Le 2 septembre 2020, nous avions commémoré les 80 ans du ralliement des Établissements français de l’Océanie avec l’interview d’Édouard Fritch, président de la Polynésie française

En 2021 nous poursuivons ces hommages en publiant le récit de Philippe Leydet, directeur de L’ONAC-VG1 de Polynésie française, Le Bataillon du Pacifique dans l’enfer de Bir Hakeim et le portrait du Polynésien Marcel Marcantoni Oopa, Du Bataillon du Pacifique à l’Assemblée nationale. Marcel Marcantoni Oopa est le fils du Metua2, Pouvana’a a Oopa. Comme son père, il se porte volontaire dans le Bataillon du Pacifique. Intégré à la 1ère Division de la France libre du général Koenig, le Bataillon participe notamment à la bataille de Bir Hakeim, à la campagne d’Italie puis au débarquement en Provence le 15 août 1944 ».

Le hors-série Raconte-moi une Histoire d’outre-mer rassemble les interviews et témoignages parus depuis 2016 dans le magazine Itinéraires d’outre-mer de SUEZ et publiés sur notre site. 

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Ari Wong Kim, dernier survivant Polynésien du Bataillon du Pacifique 

« Ari, né à Papeete le 16 janvier 1924, n’a que 16 ans lorsqu’il se porte volontaire le 16 septembre 1940 en réponse à l’appel historique du général de Gaulle » raconte Philippe Leydet dans Il y a 80 ans ils combattaient, s’engageaient et mouraient pour défendre notre liberté 3. « Incorporé à la compagnie autonome d’infanterie coloniale (CAICT) de Tahiti, son contingent part au mois d’avril 1941 pour la Nouvelle-Calédonie puis pour l’Australie où le Bataillon du Pacifique est officiellement formé ». Embarqué sur le Queen Mary, le Bataillon du Pacifique arrive à Suez en Egypte. 

« Ari Wong Kim est de tous les combats de la 1ère division française libre (DFL) placée sous le commandement du général Koenig. Il prend part en Libye à la bataille de Bir Hakeim puis à celle d’El Alamein en Egypte, en octobre 1942, qui marque le début de la défaite de l’Axe en Afrique » avec la victoire de la 8ème armée britannique - dirigée par le général Montgomery - sur l’Afrika Korps du général Rommel.

Ari Wong Kim ©ONAC-VG Il y a 80 ans ©Les Polynésiens dans la Guerre ©Fonds G. Buisson

« En avril 1944, Ari débarque en Italie et prend part aux combats du Garigliano. Blessé le 12 mai 44, il reçoit la Croix de guerre. Le 17 août 1944, il débarque à Cavalaire. Il participe enfin aux très durs combats de la campagne des Vosges durant le mois de septembre 1944. Dirigé finalement sur les arrières, il intègre la garde du gouverneur militaire de Paris de novembre 1944 à septembre 1945 ». 

Paris, Saintes, Marseille, la Martinique, la Guadeloupe et enfin le Pacifique ! 

Après tant de batailles, le Bataillon du Pacifique arrive à Paris en novembre 1944 et sera stationné à la caserne de la Tour-Maubourg. Le 18 septembre 1945, les volontaires du Bataillon du Pacifique défilent sur les Champs-Elysées. Fin septembre le Bataillon quitte Paris : direction la caserne de Saintes en Charente-Maritime, puis d’autres casernes dans le Sud et enfin Marseille. 

Le Bataillon du Pacifique défile sur les Champs-Elysées en septembre 1945  ©Musée de l’Ordre de la Libération

Le 14 mars 1946, le Sagittaire appareille du port de Marseille avec plus de 2000 personnes à son bord : volontaires du Bataillon du Pacifique mais également volontaires et engagés ayant appartenu à d’autres unités de la France libre (Forces Aériennes de la France libre, Forces Navales de la France libre, commandos SAS etc.) et pour certains leurs familles. Après deux escales techniques en Martinique et en Guadeloupe, c’est la traversée du canal de Panama puis le 5 mai, enfin, le retour au Fenua4 après cinq années d’absence. Paul Robineau, SAS calédonien, décrit cette arrivée dans son livre Paras Calédoniens de la France Libre 5 : « L’escale à Papeete est titanesque, hors du commun, et pour tous restera le vrai symbole de la fin de la guerre et de notre retour. (…) Toutes les îles sont là pour les recevoir. Dès l’entrée en rade, le Sagittaire est entouré de centaines de pirogues fleuries et multicolores. Toutes les poitrines entament en chœur des chants aux accents inoubliables, composés pour la circonstance. C’est féérique, grandiose, bouleversant ». Puis c’est le départ vers Nouméa qu’ils atteindront le 21 mai 1946. 

Valoriser l’Histoire de l’Outre-mer

Pour Titania Redon, à l’initiative de la rubrique, Raconte-moi une Histoire d’outre-mer du magazine Itinéraires d’outre-mer, un constat : « l’Histoire des outre-mer est encore peu connue alors qu’elle est riche d’engagements extraordinaires mais également de périodes plus douloureuses. Notre objectif est uniquement de transmettre les témoignages et les souvenirs des Anciens que nous rencontrons et de leurs proches, d’être des passeurs de mémoire ». 

Dans les prochains Itinéraires d’outre-mer, d’autres témoignages d’Anciens de la Seconde Guerre mondiale sont encore à venir : Léopold Léon, Salinière Segor † et Edmond Sainsily en Guadeloupe, Guy Brault † et Maxime Aubry † en Polynésie.

A Papara, Polynésie française, en septembre 2016 : Guy Brault†, engagé dans les Forces Navales de la France libre, et Titania Redon, directrice de la rédaction du magazine Itinéraires d’outre-mer, descendante de six anciens combattants polynésiens

 « Je suis moi-même descendante de six anciens combattants polynésiens dont Pouvana’a a Oopa, le « Metua», futur sénateur, engagé dans le Bataillon du Pacifique pendant la Première Guerre mondiale, Edmond Peltzer, également volontaire dans le Bataillon, le fils de Pouvana’a, Marcel Marcantoni Oopa, volontaire pendant la Seconde Guerre mondiale dans le Bataillon du Pacifique, futur député, et ses deux frères, Albert et Etienne Colombani, qui ont combattu dans les commandos parachutistes SAS. Si l’épopée du Bataillon du Pacifique ou la Dissidence aux Antilles et en Guyane sont connues, il est important de rendre hommage à nos héros ultramarins et de valoriser l’histoire de l’outre-mer en général »

« 2020 et 2021 sont des années « d’anniversaires historiques » comme le rappellent Renaud Muselier, président de Régions de France, Hervé Gaymard, président de la Fondation Charles de Gaulle et Vladimir Trouplin, conservateur du musée de l’Ordre la Libération. Il était donc important de commémorer ces anniversaires ». 

Retrouvez l’intégralité de leurs interviews dans le hors-série d’Itinéraires d’outre-mer : Raconte-moi une Histoire d'outre-mer

Annotations : 

1 Office national des Anciens combattants et victimes de guerre

2 Le père (de la Nation)

Il y a 80 ans, ils combattaient, s’engageaient et mouraient pour défendre notre liberté, ©Philippe Leydet, directeur service territorial de Polynésie française, ONAC-VG, juillet 2020

4 Pays

Entretien Titania Redon avec Fanny Pascual, petite-fille du SAS Paul Robineau, Nouméa, avril 2017 ©Paul Robineau, Paras Calédoniens de la France Libre, Les Editions du Cagou, 1989