L’Université et le CNRS se sont alliés pour créer cette structure de recherche qui doit présenter et diffuser des « connaissances nouvelles » sur la période des essais nucléaires en Polynésie. Santé, histoire, enjeux culturels ou politiques, dénucléarisation… Une trentaine de chercheurs, polynésiens, européens ou océaniens, doivent animer les travaux de cet Observatoire piloté par l’historien Renaud Meltz, et qui travaillera avant tout sur la base des archives déclassifiées par l’État. Un sujet de notre partenaire Radio 1 Tahiti.
Au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) on appelle ça un « Sosi », pour « Suivi ouvert des sociétés et de leurs interactions ». Des structures de recherche qui ont pour but d’accompagner les études et enquêtes de longue durée en matière de sciences humaines et sociales, en regroupant des équipes pluridisciplinaires autour d’un sujet sensible. Et le sujet en question, en Polynésie, c’est bien sûr le fait nucléaire.
« L’Observatoire de l’héritage du CEP », a ainsi été officiellement lancé ce jeudi. Sous la double tutelle du CNRS et de l'Université de Polynésie française, il est accueilli par la Maison des sciences de l’homme du Pacifique et aura avant tout pour mission de présenter et diffuser des connaissances nouvelles issues des archives nationales. « La décision prise à l’issue de la table-ronde de très haut niveau organisée en juillet 2021 de déclassifier les archives régaliennes relatives au Centre d’Expérimentation du Pacifique a relancé la possibilité d’écrire une histoire du passé nucléaire de la Polynésie française », explique l’université dans un communiqué.
« Patrimonialisation » du nucléaire
Une trentaine de chercheurs, polynésiens, océaniens ou européens, serait déjà associés au projet, et le « portage scientifique » de ce nouvel observatoire sera assuré par Renaud Meltz. L’historien, ancien maître de conférences à l’UPF, a récemment publié Mensonges d’État, une autre histoire de la Vᵉ République, qui aborde, entre autres, l’histoire des essais nucléaires en Polynésie.
Il avait auparavant co-dirigé l’ouvrage collectif Des bombes en Polynésie paru en 2022, une « première grande synthèse sur l’histoire de la bombe française dans le Pacifique ». Cet ouvrage, et le programme de recherche « Histoire et mémoires du CEP » qui y avait accompagné sa rédaction entre 2019 et 2021, avait donné lieu à un colloque à l’UPF, en mai 2022, accompagné, comme la plupart des travaux sur le nucléaire, de son lot de polémiques.
Dans un entretien accordé à Outremers360, il rappelait que le projet de centre de mémoire des essais en marquait l’entrée de la Polynésie « dans une phase où la question de patrimonialiser, c’est-à-dire faire le tri et de choisir entre ce qui est utile de conserver pour les générations suivantes » sur la question du nucléaire. L’Observatoire devrait donc pouvoir accompagner ce mouvement, en étudiant notamment « l’histoire de la santé en Polynésie, la question des « modernisations » du fenua liées au CEP, l’enjeu des héritages culturels et politiques et celui de la dénucléarisation ».
Sa création « sera l’occasion de poser la question d’un dialogue avec les autorités de l’État et du pays sur la transmission de ce savoir académique à l’école et l’opportunité de créer des outils numériques innovants en accès ouvert », précise l’université.
Radio 1 Tahiti