© Ministère des Outre-mer
Deux ans après sa mise en place, la Commission nationale sur les Enfants de la Creuse a remis ce 10 avril son rapport final sur la transplantation de mineurs de la Réunion en France hexagonale de 1962 à 1984. En outre des réparations financières et des mesures de compensation, le rapport préconise des réparations d’ordre morale avec la création d’un lieu mémoriel en France et à la Réunion, l’instauration d’une journée commémorative.
La mission de la Commission nationale des « Enfants de la Creuse » s’est articulée autour de quatre points durant les deux ans : établir un tableau précis des personnes concernées par cette question et de leur situation démographique actuelle, proposer une relation précise des décisions, des actes ayant permis le transfert vers la Réunion des enfants et adolescents réunionnais, identifier les contraintes à la transmission complète des dossiers aux pupilles et les moyens de les alléger, proposer des actions et des mesures permettant le travail de mémoire individuel et collective de cette question. « Notre rôle a été celui de l’expertise. Un travail scientifique pour répondre aux quatre points de notre mission. Il n’a été ni celui d’un juge, ni celui d’un procureur, ni celui d’un avocat. » Tout au long de notre rapport, nous avons tenté de comprendre et faire comprendre la genèse de cette épisode qui a généré une souffrance reconnue par la représentation nationale » précise Philippe Vitale, président de la Commission nationale des Enfants de la Creuse
Selon les premières conclusions de ce rapport, les experts indiquent que cette transplantation de mineurs s’est faite dans le cadre des pratiques et règlements qui régissaient alors l’aide sociale à l’enfance (ASE ). Ils ajoutent que les problèmes et abus rencontrés étaient dus au contexte général, au regard porté sur l’enfant et aux lacunes du fonctionnement de l’ASE à cette époque. Concernant la responsabilité ont rappelé que « l’ancien Premier Ministre et député de la Réunion avait impulsé cette politique sans qu’il ait initié, puisqu’elle avait été pensée et mise en oeuvre avent qu’il soit élu en 1963 ».
Une journée commémorative et la création d’un lieu mémoriel
La Commission nationale des « Enfants de la Creuse » a dressé plusieurs préconisations notamment sur le plan mémoriel. Le rapport propose de créer une structure dédiée spécifiquement à cette histoire en un lieu symbolique en France Hexagone et à la Réunion, l’instauration d’une journée commémorative de cette affaire des « Enfants de la Creuse » qui pourrait être soit le 18 février (date de la résolution mémorielle de l’Assemblée nationale), soit le 20 novembre (date de la journée internationale des droits de l’enfant), ainsi la présence de cet épisode dans l’enseignement et la recherche avec un possible prix récompensant des travaux sur ce sujet. Des préconisations qui s’ajoutent à des premières mesures individuelles prises par le gouvernement, à savoir la prise en charge entre autres de billets d’avions, une aide psychologique.
« Une nouvelle étape vers la reconnaissance »
Dans son intervention, la Ministre des Outre-mer Annick Girardin a reconnu une faute. « Ce rapport permet de comprendre pourquoi et comment un tel déracinement a pu avoir lieu. Une faute a été commise et impose des réparations morales. Ce rapport n’efface pas les fautes commises mais il a l’immense mérite de vous permettre de réapproprier votre passé. C’est une étape nouvelle vers la reconnaissance de votre propre histoire et au delà, de celle de tous les enfants déracinés de France ».
La Ministre des Outre-mer a également annoncé la mise en place d’un formulaire sur le site du Ministère pour faciliter les démarches et les recherches de ceux et celles qui souhaitent savoir s’ils appartiennent ou non à la liste des mineurs. Par ailleurs, le dispositif de financement des billets d’avions vers la Réunion va être pérennisé et sécurisé juridiquement à travers une convention avec le Conseil départementale de la Réunion.
Ce rapport est une nouvelle étape vers la reconnaissance de votre propre histoire, et au-delà, de celle de tous les enfants déracinés de France. #LaRéunion pic.twitter.com/rCwUSLSQlI
— Annick Girardin (@AnnickGirardin) 10 avril 2018
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Les anciens mineurs transportés de la Réunion ont accueilli avec beaucoup d’émotion les conclusions du rapport de la Commission. A l’instar de Valérie Andanson chargée de communication de la Fédération des Enfants Déracinés des DROM (FEDD), qui se dit ravie de voir cette histoire entrer dans les manuels scolaires. « Notre histoire va être plus connue, davantage étudiée. Elle reconnaît toutefois que certaines mesures prises doivent être poursuivis comme le maintien de la cellule psychologique pour les ex-mineurs transplantés qui entreprennent le voyage à la Réunion. « Les traumatismes sont encore nombreux chez certains. Nous avons encore besoin de soutien » , poursuit-elle. Elle insiste également sur l’annualisation des billets d’avion pour la Réunion au lieu d’un billet tous les trois ans et le rallongement de la bourse de 500 euros des frais d’hébergement.