Annoncé depuis cinq ans, le pôle des métiers de l’aéronautique a ouvert ses portes aux abords de l’aéroport Marcel-Henry, ce lundi. Il préfigure la mise en place d’une politique globale menée par l’académie de Mayotte visant à étaler sur l’ensemble de l’île des pôles de compétences thématiques adossés aux différents lycées. Un sujet de notre partenaire Mayotte Hebdo.
La rentrée 2024 démarre sous un bon signe pour le lycée de Petite-Terre. Attendu depuis cinq ans, le pôle « métiers de l’aéronautique » est opérationnel depuis ce lundi après-midi. Les bâtiments flambants neufs d’une valeur de treize millions d’euros ont officiellement été inaugurés à 14h30 par le recteur de l’académie de Mayotte, Jacques Mikulovic, avec, à ses côtés, Pascal Lecoq, le proviseur du lycée de Petite-terre, en présence du préfet de Mayotte, François-Xavier Bieuville, le sénateur Saïd Omar Oili, les maires de Pamandzi et Dzaoudzi-Labattoir, Madi Madi Souf et Mikidache Houmadi. De nombreuses personnalités politiques locales, des responsables d’établissements scolaires du second degré, des enseignants et, bien sûr, des élèves étaient aussi présents.
Mise en place il y a trois ans, cette filière aéronautique manquait d’espace suffisant pour accueillir des moteurs d’avion au lycée situé plus haut à Pamandzi. Il a donc fallu s’adapter aux conditions existantes dans l’attente de la disponibilité de ce bâtiment construit sur un terrain appartenant à l’État, avec le concours de la commune de Pamandzi. Outre le hangar mécanique, l’édifice (en R+2) est également appelé à accueillir de nouvelles filières d’enseignement complémentaires dans un avenir proche, les métiers de l’accueil, de la sécurité et de l'électronique.
« A terme, ce sont 300 élèves qui rejoindront ce site, ce qui permet d’ailleurs de délester le grand lycée d’enseignement général du même nombre d’élèves. La proximité avec la plateforme aéroportuaire est un grand avantage pour nous et nous espérons vraiment parvenir à motiver les jeunes pour ces nouvelles filières. Les professeurs ont déjà pris des contacts parce que l’objectif c’est réellement d’aller sur place, regarder un gros Airbus, un gros Boeing ainsi que les ATR de chez Ewa Air qui sont juste en face de nos bâtiments. C’est un avantage énorme qui donne des objectifs à nos élèves », explique le proviseur.
Un secteur pourvoyeur d’emplois
Cette filière aéronautique regroupe les trois niveaux du lycée, à raison de seize élèves à chaque fois. Un chiffre qui peut paraître faible pour un non averti, mais qui se justifie par l’obligation pour chaque classe de placer les lycéens en formation dans des entreprises spécialisées pour effectuer leurs stages. « Il faut donc avoir des entreprises qui soient capables de les accueillir, autant dire impossible de le faire sur l’île. C’est pour cela que nous avons des partenariats avec La Réunion et l’Hexagone, en particulier avec Airbus qui avait accueilli quatre élèves en 2023 », fait remarquer le chef d’établissement.
Pour l’année dernière, ils ont été au total sept à effectuer leur stage dans l’Hexagone, et le lycée envisage de revoir légèrement ce chiffre à la hausse pour cette année en atteignant le chiffre symbolique de dix élèves (sur seize). « C’est vrai que d’aller dans l’Hexagone, c’est quand même une belle aventure. Ils y vont pour huit semaines, ce qui leur permet de faire pas mal de choses comme aller visiter un musée et faire d’autres activités qu’ils ne pourront pas forcément faire ici à Mayotte », note Pascal Lecoq.
La totalité des élèves admis avaient fait ce vœu en premier et ont dû passer un petit entretien préalable pour juger de leur motivation car certains pensent qu’en choisissant d’étudier à Pamandzi, ils vont pouvoir devenir pilotes de l’air ou steward. Mais les responsables du lycée replacent les choses en leur expliquant que les métiers enseignés dans ce pôle aéronautique sont exclusivement tournés vers la réparation des avions. Cette sélection se traduit par un bon taux de réussite au baccalauréat puisque le seul élève qui a échoué l’année dernière va pouvoir le repasser cette année. Pareil pour les débouchés.
« Ils sont là ! Airbus nous propose d’ailleurs de faire régulièrement des visio-conférence pour présenter à nos futurs bacheliers les opportunités qui existent en son sein. L’année dernière, nous avons trois élèves qui ont choisi de poursuivre des mentions complémentaires mais toujours dans le secteur aéronautique », a relevé le proviseur. Contrairement à certaines idées reçues, l’accès à ces filières techniques dispensées au lycée de Petite-Terre ne sont pas l’apanage des garçons, il y aussi une minorité de jeunes Mahoraises qui choisissent d’embrasser les métiers de l’aérien.
Multiplier ce type de pôles
Pour le recteur de Mayotte, la construction de ce pôle s’inscrit dans une stratégie ouverte à l’ensemble de notre académie dans l’objectif de « construire des pôles de compétences ». A travers les métiers de l’aérien, Pamandzi constitue donc la mise en route d’un premier pôle qui en amènera d’autres dans la mesure où l'offre de formation disponible sur Mayotte est encore insuffisante.
« La façon d’aller plus vite, c’est de construire un petit peu comme une annexe à un lycée, puisque ce premier pôle de compétences va dépendre du lycée de Petite-Terre. Donc chacun de nos lycées va se voir adosser un pôle de compétences thématiques. Par exemple, Coconi va accueillir un pôle des métiers de l’agroalimentaire, sur Chirongui, nous travaillons sur le pôle des métiers du bois, tandis que sur Bandrélé nous aimerions travailler sur l’hygiène, sécurité et santé, etc ... ».
Ainsi, la politique clairement affichée par l’académie de Mayotte tend vers la répartition d’une offre de formation professionnelle couvrant l’ensemble du territoire, avec une mutualisation des plateaux techniques. « Cela veut dire que sur ce site de Pamandzi, on peut décliner des CAP aux BTS et c’est comme ça que nous aimerions travailler avec les collectivités locales et les autres services de l’État pour pouvoir adosser à ces pôles de compétences un internat qui permettrait à des jeunes de tout le territoire de pouvoir les rejoindre », détaille Jacques Mikulovic.
Il précise, s’agissant de Pamandzi, « Mayotte étant éloignée des autres territoires, l’avion est un moyen commode, il faut donc que les avions puissent avoir de la maintenance sur ce territoire, l’entretien des moteurs par exemple. Trop souvent les opérations de maintenance sont délocalisées sur d’autres territoires, mais aussi tous les métiers connexes aux activités aéroportuaires tels que l’accueil, la sécurité et de plus en plus les problématiques liées à l’informatique ».
Il loue le partenariat établi entre le lycée de Petite-Terre et Airbus qui a permis la mise à disposition par ce dernier de deux moteurs. Il estime, en outre, que Mayotte peut être un territoire d’excellence, ce qui a été démontré dans d’autres domaines, au-delà de l’excellence académique.
SIAK pour Mayotte Hebdo