Mayotte : Les dysfonctionnements du fret maritime perturbent la coopération régionale

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Mayotte : Les dysfonctionnements du fret maritime perturbent la coopération régionale

La coopération régionale est source de nombreux espoirs pour un co-développement entre les îles de l'Océan Indien et Mayotte. Elle a commencé avec Madagascar par la signature de 11 conventions il y a moins d'un mois. Les premières désillusions sont déjà là. Un sujet de notre partenaire France Mayotte Matin.

 

Trouver des produits frais à Mayotte de bonne qualité et à des prix accessibles est devenu au fil du temps quasiment impossible. Aujourd’hui, avec une inflation à plus de 6,2% depuis le début de l'année, le kilo de tomates importé de l'Hexagone s'élève à 11,95 euros le kilo. Seule, une catégorie restreinte de la population peut s'offrir un tel luxe. 

La signature des 11 conventions avec les régions malgaches portant sur un certain nombre de thématiques mais aussi sur l'agriculture et le commerce de produits alimentaires a suscité chez les habitants de l'île au lagon l'espoir de pouvoir trouver des produits frais à des prix abordables. 

Quelques jours après la signature des conventions, une délégation du gouvernement malgache est venue à Mayotte pour les ateliers de la coopération régionale, l'avion qui a amené les dirigeants malgaches était chargé de fruits et de légumes à destination des commerces de la place. En parallèle, des produits frais avaient pris la mer, embarqués sur un navire de CMA CGM. Et c’est là que les problèmes commencent : le prix du fret aérien élevé et surtout le chaotique fret maritime occasionne des surcoûts conduisant les importateurs à afficher des prix de vente élevés, générant de la déception. Les haricots verts importés de Madagascar se vendent dans l'une des enseignes qui les avait importées 9,95€ le kilo, les choux-fleurs se monnaient à 9,95€ la pièce, les poireaux sont vendus 8,90€ le kilo. 

Pourquoi une telle situation ? Parce que le prix du fret aérien est très cher mais très fiable. Forcément, l'impact de ce coup rend les produits chers en rayon. Le fret maritime est beaucoup moins cher même s’il a augmenté de 50% en 2 ans, cependant il est absolument non fiable : les bateaux sont annulés et reprogrammés à la dernière minute. Lorsqu’ils arrivent au port de Longoni, ils sont la queue dans la rade en attendant d’être pris en charge, cela peut durer plusieurs jours. Vendredi un bateau contenant un conteneur de produits frais en provenance de Madagascar a pu être déchargé après 12 jours d’attente en mer, vendredi les horaires de travail des uns et des autres n’ont pas permis de libérer la précieuse marchandise qui a passé le week end à Longoni, ce matin à l’ouverture du conteneur, une partie de la cargaison de produits frais a été jetée car devenue impropre à la consommation. Le surcoût sera imputé à chaque nouveau kilo vendu afin juste, pour l’importateur, de ne pas perdre d’argent. 

Le fret maritime est devenu tellement imprécis que les importateurs et les exportateurs de produits frais sont pris en otage des calendriers fictifs et des prix hallucinants pratiqués par les uns et les autres taxes, frais de stockage … En revanche, les compagnies maritimes n’indemnisent pas leurs clients pour les retards qu’ils ont occasionné. La coopération régionale sur le volet agricole ne prendra son envol avec Madagascar qu'à la condition que des tonnages de référence puissent être échangés entre les îles de manière régulière et fiable. Ce qui implique de maîtriser les prix pour élargir le nombre des clients. Pour y parvenir, la mise en place d’une ligne maritime dédiée permettant de se passer de CMA CGM et de MSC est indispensable. Les autorités malgaches affirment y travailler. 

Par Anne Constance Onghéna pour France Mayotte Matin