La Réunion : Un protocole de coopération contre les violences conjugales entre le CHU, l'ordre des medecins et la Justice

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La Réunion : Un protocole de coopération contre les violences conjugales entre le CHU, l'ordre des medecins et la Justice

Ce mercredi 20 octobre, le CHU Félix Guyon, l'Ordre des médecins et la Justice, représentée par les parquets de Saint-Denis et de Saint-Pierre, ont signé un protocole de coopération afin de renforcer la lutte contre les violences intra-familiales. Le document va permettre un signalement des actes de violence facilitée, notamment grâce aux médecins, habituellement confrontés au secret médical.

Grâce à ce nouveau protocole de coopération entre la médecine et la justice, les signalements d'actes de violences conjugales seront facilités afin de poursuivre la politique territoriale de lutte contre les violences intra-familiales. Les médecins et médecins traitants, souvent témoins des cas de violences auprès de leurs patients, sont généralement impuissant en raison du devoir de secret médical. Une situation qui va dorénavant pouvoir changer grâce à la modification de la loi relative au secret médical dans les contextes de violences familiales.

Caroline Calbo, procureure de Saint-Pierre, développait le volet légal du protocole au micro de nos partenaires de RTL Réunion : “Cela fait 2 ans qu'on travaille énormément avec l'institut médico-légal, ce qui nous a permis d'ailleurs d'avoir des moyens supplémentaires pour développer l'accueil des victimes au CHU Sud, notamment développer un accueil pluridisciplinaire pour les victimes, que ce soit avec la présence de psychologues, infirmières, légistes, au quotidien, ce qui n'était pas le cas il y a deux ans, donc on a énormément développé ça. Avec cette possibilité d'améliorer le signalement par les médecins et notamment les médecins traitant de violences intra-familiales, on passe effectivement un cap supplémentaire. On avait énormément de signalement de l'hôpital sur des violences, mais les médecins traitants étaient réticents, parce qu'ils sont soumis au secret médical, et dans leur relation de confiance qu'ils peuvent avoir avec leurs patients, c'était compliqué de pouvoir dénoncer les faits. Entre-temps, il y a eu la loi qui est passée, et donc il y a cette nouvelle exception avec la possibilité de lever le secret médical. Avant, c'était seulement sur les violences à enfant, maintenant, c'est également sur les violences intra-familiales. Donc ça, ça va leur permettre d'être un peu moins réticent et d'oser peut-être plus signaler les notions de danger qu'ils ne nous signalaient pas avant”.

De son côté, Véronique Denizot, procureure de la République de Saint-Denis, précise l'amélioration du réseau entre médecine et justice, et la poursuite des objectifs du Grenelle des violences intra-familiales. Le protocole va permettre “d'améliorer le signalement fait par l'autorité médicale à l'autorité judiciaire, s'agissant de victimes de violences intra-familiales, en difficulté pour déposer plainte ou signaler les faits, les médecins étant eux-mêmes parfois en difficulté pour savoir comment passer outre le refus de la plainte ou l'impossibilité de la plainte, et comment signaler de manière efficace à l'institution judiciaire les faits dont ils ont connaissance. Donc c'est améliorer ce circuit de signalement en proposant aux médecins qui peuvent être en difficulté, un réseau, un secours, un soutien aussi au sein de leur profession pour pouvoir savoir comment signaler ces faits. Je pense que la synergie qui s'est mise en place à l'occasion du Grenelle sur les violences conjugales, on doit continuer à la faire vivre et à la maintenir sur un bon rythme pour permettre que toutes celles et tous ceux qui peuvent avoir connaissance, aux raisons de leurs compétences et de leurs fonctions, a des situations de violences intra-familiales, sachent comment et à qui les signaler, l'idée étant toujours de protéger une, ou des victimes”.

Enfin, le Dr Benjamin Dusang, président du Conseil départemental de l'Ordre des médecins de La Réunion, détaille les changements apportés par ce protocole quant au travail des professionnels de Santé : “Pour les médecins, il change concrètement qu'ils vont disposer d'un outil pratique, d'un kit de fiches réflexes, qui va leur permettre de mieux interpréter la modification du droit français, de la réforme, du réaménagement de l'article 14 du code pénal, qui permet de déroger dans certaines conditions au secret professionnel pour signaler les violences, même lorsque la victime présumée n'a pas donné son accord. C'est donc en pratique la possibilité pour eux d'avoir en ligne un médecin légiste, d'avoir un conseiller ordinal qui va les conseiller, les orienter, les débrider sur cette possibilité-là, et puis la procédure : c'est-à-dire comment on fait un signalement, comment on l'adresse au procureur, comment on téléphone au procureur, comment on informe la victime, comment on repère le danger immédiat, comment on repère la notion de l'emprise, et ils ont en plus un retour de la justice et du service de médecine légale qui les informera sur le devenir de la patiente”.

Damien Chaillot