La Réunion: le projet GABiR, vers la bioéconomie circulaire de l’île

La Réunion: le projet GABiR, vers la bioéconomie circulaire de l’île

© CIRAD

Le Centre de coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement (CIRAD), était partie prenante du projet Gestion Agricole des Biomasses à l’échelle de la Réunion (GABiR). Après trois ans d’étude et la participation de nombreux acteurs du territoire, les enseignements sont nombreux et porteurs pour le développement d’une économie verte a indiqué le Cirad sur son site. Retour sur les résultats marquants de ce projet qui s’achève cette année.

Plus de 8000 personnes ont participé, directement ou indirectement, au projet GABiR. Couvrant l’étude de l’utilisation des bagasses, fourrages, déchets verts, effluents d’élevages, ou encore des déchets alimentaires, la valorisation de ces déchets en biomasse exploitable est particulièrement porteuse pour un milieu insulaire comme celui de La Réunion.

Une telle mise en réseau des acteurs économiques, institutionnels et civils, est aussi rare que porteuse. Mathieu Vigne et Jonathan Vayssières du Cirad, coordinateurs du projet, en témoignent : « Les coopératives animales et végétales, l’encadrement technique, l’enseignement agricole, les collectivités locales, les services de l’Etat, les entreprises privées, les organismes de recherche et développement… Le projet a atteint une très grande envergure, avec des acteurs de tous les secteurs, motivés et prêts à aller dans le même sens. La mise en réseau qu’a permis le projet GABiR est très encourageante pour l’avenir de la bioéconomie circulaire sur l’île.»

Identifier les sources et la quantité de biomasse valorisable

Le travail initial et nécessaire du projet GABiR est la réalisation d’un inventaire des biomasses valorisées et valorisables à l’échelle du territoire. Au bilan, ce gisement est estimé à 2,1 millions de tonnes, dont près de 40% sont destinés à la production électrique. Le reste est déjà grandement valorisé dans le secteur agricole, notamment dans l’élevage. Cependant, une partie reste valorisable, à l’image des déchets ménagers, qui pourrait bénéficier d’un recyclage.

Au-delà d’accentuer la valorisation des déchets, l’optimisation du circuit de valorisation est une piste porteuse, comme l’explique Agathe Deulvot, chargée de mission Gestion et valorisation des matières organiques à la Direction de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt (DAAF) de la Réunion :
« L’agriculture réunionnaise dépend encore en grande partie des importations d’intrants agricoles. En 2018, l’île a importé plus de 32 000 tonnes d’engrais minéraux. Pourtant, on a pu mesurer, avec le projet GABiR, que le gisement local de résidus organiques que l’on pouvait substituer aux engrais importés était d’environ 600 000 tonnes ».

Dans la lignée des optimisations envisageables, celle du co-compostage des déchets verts. Près de 150 000 tonnes de déchets verts sont collectés annuellement auprès des particuliers, mais le broyat et compost qui en sont faits sont mal écoulés et posent des problèmes de stockage. Pour y répondre, une stratégie de valorisation de ces déchets sous forme de co-compostage avec des effluents d’élevage a été étudiée. Cette synergie entre le secteur public et privé, liant les communes aux agriculteurs, a notamment permis aux éleveurs de voir diminuer les contraintes réglementaires liées à l’épandage de leurs effluents.

© Cirad

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Étude de la production et de la consommation fourragères

Capitale en milieu insulaire afin de ne pas dépendre des importations, la gestion de la demande en fourrage est capitale. Elle l’est particulièrement à La Réunion, où les besoins de l’île sont tout juste couverts par la production d’herbe locale. Une problématique potentiellement aggravée à l’avenir en raison du changement climatique et des possibles sécheresses qui en résulteraient.
Dans cette optique, la réflexion se porte sur la mise en place d’une « banque fourragère ». Afin de soutenir cette initiative, les chercheurs du Cirad ont développé une carte de localisation des surfaces productrices de fourrages et des élevages d’herbivores consommateurs. En mettant en lumière les zones d’offre et demande, le projet GABiR a permis d’évaluer les coûts de transport, ou encore estimer les localisations stratégiques des lieux de stockage.

Appui à la construction du Plan Local d’Urbanisme

Le projet GABiR a également permis la création d’outils de modélisation, et notamment un logiciel d’estimation des surfaces épandables. Appliquée à la commune de Saint-Joseph, il a permis une projection grâce à des cartes à horizon 2030. Établies en fonction de l’occupation des sols et de la réglementation en vigueur, cet outil a permis d’évaluer l’impact du futur Plan Local d’Urbanisme (PLU) de Saint-Joseph sur la disponibilité en surfaces épandables. Des données hautement utiles pour les éleveurs, l’étalement urbain étant l’une des principales problématiques auxquelles ils sont confrontés. De tels outils permettent de visualiser les zones en tension où l’épandage deviendra compliqué d’ici quelques années, mais également les zones excentrées encore disponibles. Ce type de logiciel pourra être utilisé dans d’autres communes pour accompagner la construction des PLU.

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Damien CHAILLOT