La Réunion : BichiCAM, un dispositif d'observation non intrusif pour une pêche durable et responsable des bichiques

Vue depuis l’aval des dispositifs BichiCAM au sein du canal de reproduction 2nd rang rive droite de la rivière des Marsouins © OCEA Consult'

La Réunion : BichiCAM, un dispositif d'observation non intrusif pour une pêche durable et responsable des bichiques

Le projet BichiCAM, porté par l’IRD (Institut de recherche et de développement) a été mis en place pour observer des flux de poissons et de crustacés amphihalins, à l'instar des bichiques aux embouchures des rivières. A terme, il s'agit pour l'IRD, de préserver les espèces menacées par la surpêche mais aussi de standardiser ce dispositif dans l'ensemble des cours d'eau.


Les bichiques font l’objet de pêcheries intensives sur l’île de La Réunion. Sur l'île, deux espèces dominent les peuplements piscicoles : Cotyloppus acutipinnis (Guichenot, 1863) & Sicyopterus lagocephalus (Pallas, 1770), connues sous les appellations « cabot bouche ronde » aux stades adulte/juvénile et « bichiques » au stade post-larve. Mais depuis quelques années, ces deux espèces sont confrontées à de nombreuses pressions qui ont poussé  les différents acteurs et gestionnaires à instaurer une nouvelle réglementation sur la pêche des bichiques.

Ce nouvel arrêté qui couvre toutes les zones marines et fluviales sur le territoire de La Réunion, porte sur une extension majeure de la période d’arrêt de la pêche (initialement de 15 jours elle a été étendue à 6 mois) et le maintien d’un canal libre de pêche pendant la période d’ouverture. La mise en place de cette réglementation sur la pêche s’accompagne d’un processus de régularisation de l’implantation des pêcheries et d’une intensification des contrôles sur les pratiques et les captures. L’ajustement possible de cette réglementation à moyen terme, en concertation avec les pêcheurs, nécessite de disposer de données fiables sur les pêcheries, mais également sur les flux de poissons pénétrant en rivière (flux non pêché).

Vue à l’entrée des bichiCAMs avec des bichiques exibant à la fois un comportement benthique mais encore aussi pélagique© OCEA Consult

BichiCAM est un outil de comptage des bichiques issu d’une collaboration de plusieurs années entre la société OCEA Consult’ et l’IRD, dans un premier temps au travers de l’UMR ENTROPIE puis désormais également par le MNHN via l’UMR BOREA. Cet outil a révélé un potentiel prometteur dans la surveillance des passes à poissons et dans la gestion des stocks des post-larves au niveau des embouchures, sous réserve de plusieurs améliorations.

Dans ce contexte, le projet BichiCAM III - lancé en octobre 2022 pour une durée de deux ans - porte sur l’écologie et la biologie des organismes et des habitats aquatiques dans des écosystèmes naturels et contraints. Il s’agit de comprendre, par une approche multidisciplinaire et intégrative, l’origine, le rôle et les mécanismes de l’évolution de la biodiversité aquatique (des molécules aux écosystèmes), les interactions des organismes entre eux et avec leurs milieux de vie et les réponses aux changements globaux, anthropiques et climatiques. L’outil se décompose en une partie physique et une partie informatique permettant le comptage automatisé de post-larves de poissons en migration. L'outil physique, qui peut être imprimé en 3D, est inspiré des engins de pêche (appelés vouves) qu'utilisent traditionnellement les pêcheurs de bichiques. Il permet de supporter une caméra étanche permettant de filmer dans l’eau les individus en migration. L'outil informatique permet d'automatiser la reconnaissance et le comptage des deux espèces de bichiques ayant traversé le champ de la caméra vidéo au cours d'une séquence.

Vue depuis l’amont des dispositifs BichiCAM au sein du canal de reproduction 2nd rang rive droite de la riivère des Marsouins© OCEA Consult'

L’objectif principal du projet est de standardiser l’utilisation de l’outil BichiCAM pour suivre, de façon non intrusive, des flux de post-larves ou de juvéniles de poissons et de crustacés amphihalins à leur arrivée en rivière mais aussi optimiser le traitement des images de l’outil BichiCAM pour la détection des espèces amphihalines benthiques de poissons et de crustacés lors de leur arrivée en eau douce dans un premier temps. Deuxièmement, il s'agit de calibrer les comptages effectués par l’outil BichiCAM par rapport à des flux observés, notamment par rapport aux flux pêchés pour les bichiques, afin de définir un lien entre la part de poissons comptabilisée au travers de l’outil BichiCAM et la part d’individus franchissant dans la rivière. Enfin, la troisième étape de ce projet consistera à proposer et tester la mise en place d’un suivi dans différentes rivières aux conditions hydromorphologiques (débit, profondeur, largeur mouillée, pente, granulométrie, …) variées (2 voire 3 rivières).