La Nouvelle-Calédonie, un sujet politique sensible dont la résonance dépasse le cadre de l’archipel, selon une étude de l’IFRI

©Forces armées de la Nouvelle-Calédonie

La Nouvelle-Calédonie, un sujet politique sensible dont la résonance dépasse le cadre de l’archipel, selon une étude de l’IFRI

Avenir statutaire du territoire, clivages politiques et communautaires, dimension stratégique et équilibres internationaux en Océanie, rôle dans l’Indopacifique et relation à la France, la Nouvelle-Calédonie est au cœur de multiples enjeux. Ces derniers sont analysés dans une récente étude de l’IFRI, « La Calédonie dépasse la Calédonie. Ancrage régional et perspectives internationales d’un Outre-mer français ».

 

La note est signée par Sarah Mohamed-Gaillard, maîtresse de conférences en histoire contemporaine à l’Institut national des langues et civilisations orientales (INALCO), pour le Centre Asie de l’Institut français des relations internationales (IFRI). Pour cette chercheuse, la Nouvelle-Calédonie, acteur de la Mélanésie, de l’Océanie et de l’Indopacifique, relève d’une destinée que renforcent les ambitions françaises dans ces régions.

« Mieux insérée dans son environnement régional, la Nouvelle-Calédonie l’est aussi par l’intermédiaire des représentations dont le territoire dispose désormais au sein des ambassades de France de la région. Des délégués calédoniens ont d’ores et déjà été nommés dans les postes d’Australie, de Nouvelle-Zélande et de Fidji », souligne-t-elle. Reste que l’avenir du territoire est suspendu aux négociations en cours et plus particulièrement à la composition du corps électoral, dont l’élargissement pourrait définitivement enterrer les discussions entre l’Etat et les indépendantistes.

Ceci dit, Sarah Mohamed-Gaillard ne croit pas que ces derniers veulent une « rupture sèche avec la France ». « La majorité des indépendantistes se prononcent ainsi pour un partenariat avec la France, ce qui reviendrait à renégocier, sur un pied d’égalité, la relation entre ces deux partenaires et mettre fin à l’asymétrie de la prise de possession de 1853 », écrit-elle. Mais la question demeure de savoir si le territoire, accédant à la pleine souveraineté, ferait bien le choix de la France comme partenaire privilégié. Planent ici les velléités décomplexées de la Chine sur l’Océanie… 

Car la France tient particulièrement à la Nouvelle-Calédonie comme point d’ancrage et levier d’influence dans le Pacifique. Exemple, les manœuvres militaires « Pégase 2022 » réalisées à la mi-août dans le cadre d’exercices de projection aérienne française. « L’archipel est investi d’enjeux qui le dépassent et l’inscrivent dans les ambitions globales de la France en Indopacifique », écrit l’autrice. La Nouvelle-Calédonie est, « avec la Polynésie française, le pilier de la présence de la France en Asie-Pacifique et un point d’ancrage essentiel pour les forces armées françaises ».

Sarah Mohamed-Gaillard précise par ailleurs que la France n’est plus perçue comme un État étranger dans le Pacifique, mais comme un État du Pacifique, « ce qui lui permet de s’émanciper de l’image de corps étranger et d’affirmer sa dimension océanienne. Signalons toutefois qu’elle peut prétendre à ce statut dans la mesure où sa politique Outre-mer ne suscite pas de tensions locales susceptibles d’inquiéter la région. » Ainsi la Nouvelle-Calédonie relaie l’action de la France, d’autant qu’elle s’intègre de mieux en mieux dans son environnement local.

La chercheuse fait également le constat que la Nouvelle-Calédonie est l’archipel de la région le mieux connecté au bassin Pacifique sur le plan aérien (Australie, Nouvelle-Zélande, Japon, États-Unis et Singapour). Et il y a bien évidemment le nickel, dont le territoire abrite la troisième réserve mondiale et en est le sixième producteur, ce qui lui confère « un caractère d’exception ».

« Pilier de la présence de la France en Océanie, la Nouvelle-Calédonie constitue un pôle de stabilité et s’impose comme un acteur de mieux en mieux inséré dans la vie régionale », conclut Sarah Mohamed-Gaillard. Cependant, avertit-elle, cet atout océanien dépend aussi des acteurs locaux, dont l’adhésion à la stratégie indopacifique de l’Etat demeure indispensable, d’autant qu’il est suivi de près non seulement sur le plan régional, mais par les autres territoires d’Outre-mer français et notamment la Polynésie, concernée au premier chef par les dossiers relatifs à l’Indopacifique.

 ► « La Calédonie dépasse la Calédonie. Ancrage régional et perspectives internationales d’un Outre-mer français »

PM