Bimensuel créé en décembre 2021, Bastille Magazine, qui raconte le monde à travers la plume d’écrivains et créateurs, se consacre à La Réunion dans son numéro de septembre-octobre. Son fondateur, William Emmanuel, originaire de l’île, nous dit la raison de ce focus ultramarin, premier mais probablement pas le dernier, et explique la ligne de ce magazine, qui veut « remettre au goût du jour le récit » et sortir les lecteurs de l’infobésité.
Créé fin 2021, Bastille Magazine s’inspire des emblématiques titres nord-américains The New Yorker et Harper’s Magazine, « qui n'ont pas l'équivalent en France ». « Notre approche est la suivante : c'est que nous pensons qu'il faut remettre au goût du jour le récit » explique William Emmanuel, Directeur de la publication, artisan de ce magazine avec François Thomazeau, Directeur de la rédaction.
Pour assurer cette promesse, les cofondateurs ont fait appel à des écrivains et des créateurs, ainsi que des experts. Les premiers « racontent le monde », politique, économique ou culturel, tandis que les seconds « aident à décrypter ». « Au lancement, nous avons été soutenus par l’Académicien Jean-Christophe Rufin (…). Et l'idée, notre ligne, c'est le monde raconté par les écrivains et les créateurs. Le monde vu par les écrivains et les créateurs ».
Bastille Magazine, c’est aussi l’ambition de s’émanciper du « flux de l'actualité », voire du « problème d'infobésité ». « Les gens sont submergés d'informations, et ça tourne toujours autour des mêmes thèmes, en réalité. Nous, nous essayons de susciter la curiosité des lecteurs en leur proposant des choses », défend William Emmanuel.
« Par exemple, dans le numéro de septembre, vous avez un récit sur Haïti. Grâce à un partenariat avec la New York Review of Books, nous avons des interrogations d'experts sur les institutions françaises après la crise politique que nous avons vécu ces dernières semaines », poursuit le Réunionnais. « Nous traitons tous les sujets et partout dans le monde. (…) Nous avons publié des articles sur le Soudan, sur le Kashmir en Inde, sur l'Iran, sur l'Ukraine. À chaque fois, nous avons des écrivains qui y vont et qui racontent ce qu'ils ont vu ».
Outre un récit sur Haïti, une Carte blanche à l’écrivain Yann Queffélec ou encore un entretien avec Jacques Attali, le numéro de ce mois de rentrée consacre aussi un dossier spécial à La Réunion, l’île natale du Directeur de la publication et cofondateur. Le dossier fait notamment appel à Dominique Vienne, président du CESER Réunion dont le texte est illustré par Lucie Penaud, Lionel Montocchio, ancien directeur de la sécurité de l’Aviation civile de l’océan Indien, ou encore l’écrivaine réunionnaise Gaëlle Bélem.
« Il y a un grand bouleversement géopolitique aujourd'hui » évoque William Emmanuel pour expliquer la publication de ce dossier. « Le monde est en train de changer : les grands blocs se redessinent, se réalignent. Et il se trouve que la France est le deuxième domaine maritime au monde grâce à l'Outre-mer. Dans ce cadre-là, il nous a semblé intéressant de publier un dossier en disant que la France se projette partout dans le monde, dans tous les océans, surtout qu'il y a des interrogations identitaires très fortes en France ».
Bien naturellement, William Emmanuel a choisi l’île de ses racines pour entamer cette projection dans la France des Océans, « d'autant qu'en mettant ce focus sur La Réunion, ça permet de traiter les questions liées à l'Indopacifique qui est la zone qui sera centrale au cours du XXIème siècle, du fait des rivalités entre l'Inde, la Chine, les États-Unis ». « L'Outre-mer me semble un sujet géopolitique extrêmement important pour la France, et Bastille Magazine envisage de faire de nouveaux numéros sur d'autres Outre-mer », assure-t-il.
Né à La Réunion, où il fait ses études de Droit, William Emmanuel travaille en parallèle au Quotidien jusqu’en 1987, date à laquelle il participe à la création d’un hebdomadaire, « Le Magazine de l’Océan Indien » qui, faute d’audience, arrêtera de paraître l’année suivante. Pas de quoi démotiver William Emmanuel qui poursuit sa carrière dans la presse à Paris, au sein de l’agence Reuters.
Âgé alors de 23 ans, il suit les activités du Premier ministre, de Michel Rocard à Édith Cresson, et de l’Élysée, avant de rejoindre le Desk de l'Afrique francophone, puis de suivre la vie des marchés financiers et des entreprises au service Économie et finances. À partir de 2007, William Emmanuel conseille des entreprises sur la stratégie de la finance, en tant que consultant en finance et stratégie auprès de dirigeants d’entreprises.