Crise de l'eau à Mayotte : Un manque de pluie et des infrastructures défaillantes

Une retenue collinaire de Mayotte affichant un niveau bas cette année

Crise de l'eau à Mayotte : Un manque de pluie et des infrastructures défaillantes

Confronté à des pénuries récurrentes, Mayotte n'aura bientôt accès à l'eau courante qu'un jour sur trois, la faute à des épisodes de sécheresse qui se répètent et à un déficit criant d'infrastructures dans le département le plus pauvre de France.

Une sécheresse inédite

Depuis des mois, Mayotte vit au rythme des « tours d'eau », des coupures planifiées de l'alimentation visant à limiter la consommation. A partir du 4 septembre, ces tours vont s'intensifier : l'eau ne sera désormais accessible qu'un jour sur trois. La faute à une sécheresse inédite, alors que l'approvisionnement de Mayotte dépend essentiellement des eaux pluviales.

Selon la préfecture du plus jeune département français, la saison des pluies 2022-2023 (qui s'étend de décembre à mars) a été « la plus sèche de l'histoire de Mayotte après celle de 1997 » et aucune précipitation significative n'a été enregistrée depuis.

Conséquence, les taux de remplissage des deux retenues collinaires de Combani et Dzoumogné étaient, selon les données officielles, de 25% et 14% au 24 août, contre 106% et 82% à la même date en 2022. Au rythme de prélèvement précédent le dernier tour de vis, les réserves se seraient retrouvées à sec fin septembre, bien avant la prochaine saison des pluies, précisent l'agence régionale de santé (ARS) de Mayotte et Météo France.

Un problème qui se répète

Si la sécheresse actuelle est inédite, Mayotte a déjà connu plusieurs « crises de l'eau » et celles-ci tendent à devenir de plus en plus fréquentes. Après une première grave crise en 1997, lié selon la mission régionale d'autorité environnementale (MRAE) de Mayotte à une « très mauvais saison pluvieuse », le deuxième épisode majeur de sécheresse remonte à 2017, concentré sur la partie sud de Grande Terre - l'île la plus étendue de Mayotte.

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Puis une nouvelle sécheresse frappe l'archipel en 2020, dans des proportions similaires à 2017. La déforestation - qui empêche les nappes phréatiques de se recharger - et la démographie galopante - Mayotte compte 300 000 habitants selon l'Insee, plus selon des estimations tenant compte des sans-papiers, venus principalement des Comores voisines - amplifient le problème.

« Le déséquilibre entre besoin et ressource en eau disponible se creuse et chaque saison sèche engendre des périodes de stress hydrique et de pénuries des volumes mobilisables de plus en plus marqués », notait la MRAE dans un avis publié en août, s'inquiétant aussi de « l'incertitude » liée au changement climatique.

Des infrastructures défaillantes

A chaque épisode de sécheresse, des réponses ont été apportées par les pouvoirs publics : création d'une usine de dessalement en 1998, réalisation des deux retenues collinaires en 1999 et 2001, généralisation des « tours d'eau » en 2017... Problème, relève la MRAE de Mayotte, « ces actions ont chaque fois été engagées dans l'urgence » et leurs mises en œuvre ont été « plus ou moins rapides et surtout plus ou moins abouties ».

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L'exemple le plus flagrant est celui de l'usine de dessalement inaugurée en 1998 : elle fournit 8% de l'alimentation en eau de l'île mais n'a jamais tourné à plein régime, la faute à des problèmes de conception. Pire, les travaux d'extension décidés en 2017 ne sont toujours pas achevés. Les autorités espèrent une amélioration début novembre, avec la fin des travaux d'urgence lancés pour augmenter la production de l'usine de dessalement.

A plus long terme, le préfet chargé de gérer la crise de l'eau à Mayotte, Gilles Cantal, a annoncé la semaine dernière la mise en chantier d'une deuxième usine de dessalement et assuré que le projet d'une troisième retenue collinaire était toujours d'actualité. Les habitants, eux, espèrent que la saison des pluies attendue à la fin de l'année soit plus abondante que l'an passé.

Avec AFP