À l’initiative de l’ONU depuis 1999, le 25 novembre est la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes. Durant ce mois de sensibilisation, le Collectif de Femmes d’Outre-Mer et du Monde (C’FOMM) intensifie ses actions pour sensibiliser et offrir un soutien concret aux victimes de violence. Avec sa mallette d’urgence, un dispositif pensé pour aider les femmes en situation de crise, le collectif, sous la présidence de la Guadeloupéenne Vanina Noël, conseillère municipale à Pierrefitte-sur-Seine, incarne une réponse déterminée et humaine. Retour sur une initiative qui veut se déployer bien au-delà des frontières hexagonales.
La mallette d’urgence est née d'une expérience personnelle et d'un constat professionnel. Vanina Noël, élue, présidente du C’FOMM et elle-même ancienne victime, se souvient : « En tant qu’élue, j’étais confrontée à des histoires déchirantes de femmes contraintes de fuir leur domicile sans rien emporter. En tant que survivante, je savais ce que signifiait perdre tout, même sa dignité ». C’est ainsi que l’idée de la mallette d’urgence est née. Conçue pour répondre aux besoins immédiats des femmes, celle-ci contient des produits de première nécessité : un gel douche, du shampoing, du dentifrice, une brosse à dents ou encore des serviettes hygiéniques. Mais ce n’est pas tout. Pour répondre aux réalités technologiques actuelles, chaque mallette est équipée de chargeurs pour iPhone et Samsung, une initiative qui pourrait sembler anodine mais qui est cruciale pour permettre aux femmes de rester connectées et d’appeler à l’aide si nécessaire. « Les femmes quittent parfois leur domicile avec un téléphone déchargé. Un chargeur peut leur permettre de retrouver leur famille ou de contacter des services d’aide, » explique Vanina Noël. Cette attention aux détails montre combien le collectif a réfléchi aux besoins spécifiques des femmes dans des situations de grande précarité.
En partenariat avec Tony Para, président de PARANEWS Production et parrain du collectif, la mallette inclut aussi des produits de beauté de qualité. « Cela peut sembler superflu, mais pour une femme qui a tout perdu, se sentir digne peut faire une différence énorme, » poursuit Vanina Noël. Au départ pourtant, la mallette n’était pas aussi fournie, mais à force de rencontres, de discussions et de dons, le projet a pris une dimension plus vaste. « Cette mallette est plus qu'un simple kit : elle est le symbole d'une main tendue, d'un soutien inconditionnel pour celles qui ont tout perdu, » ajoute la présidente du Collectif. La distribution de ces mallettes repose sur un réseau de lieux tels que les commissariats ou encore les centres d’accueil. Disponibles dans quelques espaces identifiés, l’objectif est de développer le concept dans l’Hexagone et dans les Outre-mer. « C’est une première réponse aux besoins urgents ». Cependant, le collectif fait face à une demande croissante, ce qui rend l’appel aux dons crucial pour maintenir et élargir le projet. « Nous avons besoin de renforts financiers pour répondre à cette demande », précise-t-elle. « On peut faire un don de la somme de notre choix pour nous permettre de financer la mallette d'urgence ; on peut également contribuer en fournissant des articles essentiels tels que des produits d'hygiène, des vêtements, des documents informatifs… Ou optez pour un don régulier mensuel pour nous offrir une stabilité financière et nous permettre de planifier nos actions à long terme ».
Plaidoyer pour un Observatoire des violences
Dans ces actions, Vanina Noël n’oublie pas les Outre-mer. « Les dispositifs mis en place ici sont souvent difficilement applicables là-bas. Il y a un véritable travail à faire sur nos territoires. Personnellement, j’encadre des femmes qui sont obligées de quitter leur territoire parce qu’elles ne trouvent pas de solutions. Elles se réfugient ici, mais souvent les portes leur sont fermées, parce qu’on priorise celles qui sont ici. J’ai déjà entendu des mots d’une extrême gravité. C’est pour cela que j’ai interpellé les acteurs ultramarins qui pourraient permettre cet encadrement ». Dans ce combat, la mallette d’urgence devrait faire son apparition en Guadeloupe mais aussi en Martinique. L’objectif est que le système se déploie un peu partout, malgré le manque de données sur les situations réelles dans les territoires des Outre-mer. « Malgré les efforts déployés, un manque persiste dans la collecte de données et la compréhension des violences faites aux femmes dans nos territoires. Les Outre-mer sont souvent oubliés, et les chiffres sur les violences ne reflètent pas la réalité," déplore Vanina Noël, qui affirme également être pour la création d’un Observatoire des violences faites aux femmes dans les Outre-mer. "En accord avec les recommandations de Justine Bénin, ancienne coordinatrice interministérielle sur les violences faites aux femmes en Outre-mer, le Collectif de Femmes d'Outre-Mer et du Monde réclame la création d'un observatoire des violences faites aux femmes en Outre-mer. Cet observatoire est indispensable pour évaluer les violences, coordonner les actions et promouvoir la sensibilisation afin de mieux protéger les femmes dans ces territoires. Les violences faites aux femmes en Outre-mer sont un fléau que l'on ne peut plus ignorer. Malgré la sortie du rapport de Justine Bénin, tombé dans un silence assourdissant, aucune attention n'a été portée aux préconisations faites. Les manquements de l'observatoire national en France hexagonale, qui néglige les besoins spécifiques des territoires ultramarins, rendent d'autant plus urgente la mise en place d'un observatoire dédié," peut-on lire dans un communiqué envoyé par le Collectif.
Un Engagement né d'une expérience personnelle
Les chiffres actuels, souvent partiels, ne permettent pas de saisir pleinement l’ampleur du problème. « Nous avons besoin de données locales, de statistiques précises pour agir efficacement. Nos territoires ultramarins ne peuvent plus être ignorés, » insiste Vanina Noël, dont la lutte contre les violences résulte d’une expérience personnelle. « J'ai moi-même été victime de violences conjugales. À l’époque, il n’y avait rien, absolument rien pour aider les femmes dans ma situation. J’ai dû me battre seule, et c’est cette expérience qui m’a poussée à agir, » confie-t-elle. Vanina Noël se souvient de ses propres démarches infructueuses pour obtenir de l’aide : « Quand je suis allée au commissariat pour déposer plainte, on m’a renvoyée chez moi en disant que j’étais mariée et que c’était une affaire de couple. J’ai dû écrire au procureur pour que ma plainte soit prise au sérieux ». Aujourd’hui, cette expérience traumatisante est une force qui lui sert à soutenir d’autres femmes et montrer qu’une issue est possible. « Je dis toujours aux femmes de ne pas avoir honte. Leur voix est importante et leur témoignage peut aider d’autres. C’est la raison pour laquelle je témoigne aussi ».
Pour financer la mallette d’urgence et étendre ce dispositif essentiel, le C’FOMM lance donc régulièrement un appel aux dons. « Chaque don compte. Ce sont ces contributions qui permettent d’acheter les produits de première nécessité et de financer le transport des mallettes vers les commissariats et les mairies », explique Vanina Noël. Les dons sont collectés via HelloAsso, et le collectif espère sensibiliser encore davantage pour mobiliser le soutien de la population et des institutions. Au-delà de la mallette, c’est également un soutien juridique qui peut être proposé aux femmes. « Nous voulons offrir un soutien global, non seulement pour les urgences mais aussi pour accompagner les femmes dans la durée ». Le collectif a su rallier de nombreux partenaires à sa cause, des entreprises aux personnalités publiques.
« Leur soutien montre que la lutte contre les violences faites aux femmes est un combat qui transcende les frontières », conclut la présidente du Collectif de Femmes d’Outre-Mer et du Monde.
Le Collectif a récemment scellé un partenariat avec Boukha Paris, auteur-compositeur et producteur, qui a écrit et produit l’hymne officiel du C’FOMM, intitulé ‘Debout pour Elles’. Plus qu’un simple titre, la chanson incarne les valeurs de résilience et de solidarité du collectif. Le morceau sera dévoilé le 22 novembre prochain.
Abby Said Adinani