Guyane : Une enquête nationale périnatale met en avant l’état de santé « préoccupant » des enfants à la naissance sur le territoire

©  DR

Guyane : Une enquête nationale périnatale met en avant l’état de santé « préoccupant » des enfants à la naissance sur le territoire

À l’occasion des Assises amazoniennes de gynécologie, obstétrique, pédiatrie et anesthésie, qui se tiendront à Cayenne du 15 au 17 novembre 2023, les résultats concernant la Guyane de l’enquête nationale périnatale seront présentés en détails, confirmant des taux élevés de prématurité et de petits poids de naissance, le moindre suivi des grossesses et la fréquence des pathologies gestationnelles.



Du 15 au 21 mars 2021, l’Inserm, Santé publique France et le réseau Périnat Guyane ont mené l’enquête nationale périnatale en Guyane. Les résultats, publiés mi-septembre, seront à l’occasion des Assises amazoniennes, congrès de gynécologie, obstétrique, pédiatrie et anesthésie en Guyane, actualisant les dernières données en la matière, la dernière enquête nationale périnatale remontant à 2016.

Pour cette nouvelle enquête, 128 femmes ayant donné naissance à un enfant vivant cette semaine-là ont accepté de participer à l’étude, et les résultats, comparés à ceux de l’Hexagone, confirment des tendances déjà connues.
Les femmes enceintes en Guyane sont globalement plus jeunes, plus isolées, plus souvent célibataires et présentent un niveau d’études généralement plus bas qu’en métropole. Seulement un peu plus de la moitié des accouchées sont de nationalité française.

Près de la moitié des ménages déclarent un revenu mensuel inférieur à 1 000 euros et moins des trois quarts (73 %) sont couvertes par la protection maladie universelle. Le taux d’utilisation d’une méthode contraceptive est plus bas que dans l’Hexagone et les femmes expriment une moins grande satisfaction lors de la découverte de la grossesse.
Les antécédents médicaux et les pathologies gestationnelles sont plus fréquents, le taux de recours à l’échographie et aux dépistages est plus faible.

Le rapport tempère cependant sur certains points, mettant en avant certaines données de l’accouchement plus favorables ou comparables à l’Hexagone, telles que le taux de déclenchement programmé et de césarienne comparables, la moindre utilisation de l’oxytocine en cours de travail, le recours exceptionnel à l’épisotomie, ou encore le fort encadrement des indications de mise en place d’une antibiothérapie pendant le travail.
En revanche, l’état de santé des enfants à la naissance est jugé « préoccupant », le rapport mettant en avant 3 indicateurs-clé : Un taux de prématurité élevé (16% contre 7% en métropole), une hypotrophie importante, et une plus mauvaise cotation du score d’APGAR (le score d’APGAR représente et note, chez un nouveau-né, les cinq grandes fonctions vitales : le rythme cardiaque, le rythme respiratoire, le tonus, la coloration cutanée et la réactivité aux stimulus).

Pour Stéphanie Bernard, coordinatrice du réseau Périnat : « Ces résultats viennent renforcer l’idée qu’il y a un décalage important entre les données guyanaises et celles de l’Hexagone. Certaines données sont dans le rouge, notamment s’agissant de la santé de l’enfant à la naissance. Le taux de prématurité est élevé tout comme la proportion de petits poids à la naissance (…) Ces résultats doivent nous alerter sur la qualité de prise en charge, le taux important de pathologies et l’insuffisance du suivi. Des situations anténatales délicates sont insuffisamment repérées ».
Dans les faits, seule une femme sur six (16,1 %) a bénéficié d’un entretien prénatal précoce (36,5 % dans l’Hexagone) et moins d’une sur deux (42,9 %) de séances de préparation à la naissance et à la parentalité (80,2 % dans l’Hexagone).

Également mis en avant par le rapport, la plus grande fréquence de pathologies gestationnelles en Guyane, où une femme sur sept (14,1 %) souffre d’hypertension artérielle (contre 4,3 % dans l’Hexagone), et où l’anémie est beaucoup plus fréquente, diagnostiquée chez 66,4 % des femmes durant la grossesse contre 25,2 % dans l’Hexagone.

Stéphanie Bernard rappelle que l’enquête nationale périnatale a été menée, en Guyane, pendant la deuxième vague de l’épidémie de Covid-19. « L’épidémie avait un impact sur le recours aux soins. Mais elle n’explique pas à elle seule l’insuffisance du suivi de grossesse, qui est davantage lié au manque de ressources humaines, à des habitudes qui poussent à commencer à consulter plus tardivement, et au problème d’ouverture des droits sociaux ». 


 

Damien CHAILLOT