Guadeloupe: le conflit sur le prix de la canne s'enlise un mois après son lancement, le personnel de l'Usine Gardel mis en chômage partiel

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Guadeloupe: le conflit sur le prix de la canne s'enlise un mois après son lancement, le personnel de l'Usine Gardel mis en chômage partiel

Des planteurs de canne à sucre continuent à se mobiliser en Guadeloupe, plus d'un mois après les premiers blocages de producteurs réclamant la revalorisation des tarifs de la canne et une réforme du modèle de fixation de son prix. Les blocages du collectif de planteurs mettent à mal la situation financière de la sucrerie selon ses dirigeants. Ils ont décidé de placer la quasi-totalité des salariés en chômage partiel.

Le conflit se déroule alors que la période de mars-avril est celle de la coupe de la canne à sucre qui est acheminée dans la dernière unité sucrière de Guadeloupe continentale, l'usine Gardel au Moule (est de Grande-Terre). "Si les planteurs acceptent les conditions de récolte (actuelles), ils seront beaucoup plus endettés qu'ils ne le sont déjà aujourd'hui", a expliqué à l'AFP Roméo Meynard, le président de l'Union pour le développement cannier et agricole (UDCAG) et porte-parole des petits planteurs. Ceux-ci "représentent 2/3 de la production" et "très peu" d'entre eux ont décidé de récolter cette saison, a-t-il ajouté.

Toute la semaine, quelques dizaines de tracteurs et de camions mêlant producteurs et transporteurs de canne ont mené, conjointement ou séparément, des opérations de blocage au Moule, et dans d'autres lieux de l'archipel. A Sainte-Rose (Basse-Terre), une quinzaine de tracteurs attachés les uns aux autres ont ainsi bloqué la circulation dans les deux sens une grande partie de la journée de jeudi.

Mercredi, près d'une trentaine de tracteurs se sont positionnés au Moule, rejoints plus tard par des camions de transporteurs ayant mené une opération escargot, alors que les ministres, de l'Intérieur Gérald Darmanin et aux Outre-mer, Marie Guevénoux, étaient en visite sur l'île. Mardi, plusieurs tracteurs avaient déjà bloqué une partie du Moule.

Interrogé jeudi soir sur la chaîne Guadeloupe La 1ère, Gérald Darmanin a souhaité que "tout le monde soit raisonnable, notamment ceux qui travaillent dans une économie subventionnée par l'État à 80%".  Il a aussi appelé à ce que les industriels acceptent de négocier le prix de la canne. "Ce que je veux voir, c'est que la Guadeloupe continue à produire, que les ouvriers puissent être justement rémunérés de l'action qu'ils font et que les agriculteurs regardent l'avenir en exportant", a-t-il ajouté.

Le prix de la canne à sucre est fixé tous les cinq ans par convention entre les syndicats de planteurs, l'Etat et l'usinier.

90% des salariés de Gardel mis en chômage partiel

Dans une note interne, la direction de l'usine informe les salariés de sa décision de les placer en chômage partiel. «Face à cette situation et compte tenu du contexte financier extrêmement préoccupant pour GARDEL SA, nous avons soumis au Comité Social et Economique (CSE) de l'entreprise une demande de mise en activité partielle. Cette proposition a été approuvée à la majorité des votants»

Les dirigeants insistent sur la nécessité de limiter les dépenses durant cette période. 80% des salariés sont d'ores et déjà concernés par la mesure et ils seront 90% à partir de lundi. Toujours dans cette note interne, la direction apporte d'autres précisions aux salariés. «Pendant cette période de chômage, et jusqu'au 17 mai 2024, date de la prochaine réunion CSE, votre salaire vous sera versé à 100%. Dès ce soir, nous allons également entreprendre une liquidation partielle du site, ne sachant pas combien de temps la situation pourrait durer»

Ce vendredi soir, à 18h, en direct sur RCI, Nicolas Philippot, le directeur de Gardel, a apporté quelques précisions. Selon lui, le chômage partiel va concerner entre 80 et 90% du personnel technique, le personnel administratif devrait, lui, continuer à travailler.

Il évoque une mise en sécurité de l'entreprise avec une baisse du chiffre d'affaires de 30%. Quant aux négociations, s'il indique que les contacts restent « cordiaux » avec les planteurs, il juge leur position « incompréhensible ». «La saison est gâchée puisqu'on ne pourra pas couper totalement la canne, on s'enfonce dangereusement vers la période des pluies»

Du côté des planteurs, Willem Monrose, un des porte-paroles du collectif des planteurs joint également en direct, n'en démord pas :  «M. Philippot ne veut pas négocier. Il n'a pas donné suite à nos dernières propositions. Mais on ne pourra pas accepter de vendre la canne à perte »

Avec AFP et  RCI Guadeloupe

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