Peu de considération ! Voilà le reproche qu’émettent les Outre-mer vis-à-vis de la France « métropolitaine », de l’État, de la République. Et les Outre-mer ont raison.
Avec ses 2,2 millions d’habitants, soit quatre pour cent de la population française totale, 1,8 millions d’Ultramarins sont inscrits sur les listes électorales… Un « détail » au niveau du rapport de force des chiffres mais pas au niveau de la démocratie et du sens civique. Ainsi c’est à La Réunion, territoire ultramarin le plus peuplé, et à Wallis et Futuna, parmi les moins peuplés, qu’il y a eu le moins d’abstention sur tout l’échiquier français.
C’est presque un poncif de dire que les territoires ultramarins permettent à la France d’être présente aux quatre coins du globe. Que ce soit par sa puissance maritime et militaire dans l’axe Indo-Pacifique. Mayotte, La Réunion, la Polynésie, la Nouvelle-Calédonie, Wallis et Futuna, les Terres australes et antarctiques, lui permettent d’être un acteur puissant, légitime et efficace au sein de l’OTAN. Sans parler de toutes les richesses de la mer dont on parle tant et qui tardent à être exploitée au niveau des métaux rares.
Du point de vue de l’histoire, cette France hors Hexagone, a payé son tribut avec l’impôt du sang notamment lors des deux Guerres mondiales. Les essais nucléaires en Polynésie entre 1966 et 1996 avec son lot de souffrances, a permis à la France de siéger à la table des Grands, à la table de ceux qui détiennent l’arme nucléaire.
La Guyane, quant à elle, a initié la conquête spatiale française dès les années 1960. Depuis Kourou, vient d’être lancé le plus gros et onéreux télescope nommé James Webb, développé par la NASA, l’Agence spatiale européenne et l’Agence spatiale canadienne pour poursuivre les travaux de son prédécesseur Hubble.
Les Outre-mer ont donc contribué à l’émergence de la France comme grande Nation industrielle et technologique au cours du dernier siècle. Et parce qu’elles ont été à l’avant-garde de cette croissance majeure, elles ne peuvent qu’être appelées à jouer un grand rôle dans la construction d’une France « nation d’innovation et de recherche ». Un vœu affiché par Emmanuel Macron, président de la République, dans le cadre du plan France 2030.
Il y a quelques jours, au Parlement européen de Strasbourg, ce même Président et pas encore candidat, dans son discours inaugural de « sa » présidence française du Conseil l’Union européenne (PFUE) insistait sur « la nécessité de refonder notre partenariat avec le continent africain… ». Bravo ! Trois fois bravo ! Trois fois oui ! Mais le Président Macron, s’il est candidat, proposera-t-il d’arrêter définitivement de brandir cette espèce d’épée de Damoclès qui pèse sur le statut des Outre-mer ?
Les Outre-mer doivent être la priorité du prochain quinquennat. Il faut que la République casse cette dichotomie que certains veulent imposer dans l’histoire de France : elle n’est ni blanche d’albâtre, ni blanche immaculée… Une société de toutes les couleurs qui cassent les codes, qui montre que la vérité n’est pas unidirectionnelle, qu’elle est à 360°. Et que le malaise vaccinal que traverse la Guadeloupe par exemple n’est pas tellement différent, que les questions que se posent les citoyens de l’Isère dont l’histoire est tout aussi complexe que celle de nos territoires d’Outre-mer.
C’est pourquoi, durant la période électorale qui s’ouvre, Outremers360 ira à la rencontre des candidats pour sonder à la fois leurs visions des outre-mer et leurs plans vis à vis de ces territoires. Jean-Luc Mélenchon développe une esthétique de la « créolisation » à partir de la pensée d’Édouard Glissant, comme rempart à l’extrême-droite, nous aurons l’occasion d’y revenir.
Valérie Pécresse a signé il y a quelques semaines, avec Serge Letchimy, Président de la Collectivité territoriale de Martinique, un partenariat économique qui fixe les règles entre autres, de la mise en place d’un circuit court permettant aux agriculteurs martiniquais de vendre directement leurs produits sur les marchés de l’Île-de-France. Elle va encore plus loin en mettant en place des dispositifs favorisant les échanges sportifs et culturels entre des territoires d'Outre-mer et la Région Ile de France. Marine Le Pen revient, elle, de Mayotte avec sa volonté de ramener l’espérance.
Voyons quels candidats pourront ouvrir les vannes de leurs imaginaires afin de proposer concrètement à nos territoires un pacte Républicain de toutes les couleurs.
Nous vous proposons comme mise en bouche la publication hebdomadaire, chaque mercredi, jusqu’à la mi-mars d’une étude sur la participation électorale des différents territoires … Cette rubrique sera portée par une quinzaine de jeunes sous la direction de Bradley Chan Tsun Ching, en plus du décryptage des programmes des candidats effectué régulièrement par nos équipes et notre carnet hebdomadaire de la campagne Outre-mer pour suivre l'actualité de la présidentielle au-delà des mers.
Luc Laventure