La sénatrice socialiste de La Réunion a adressé un courrier au nouveau Premier ministre dans lequel elle propose « quelques pistes » pour améliorer le projet de loi visant à lutter contre la vie chère en Outre-mer. Audrey Bélim fait aussi part de ses inquiétudes sur le projet de loi de Finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale 2026, et plus précisément les « coupes budgétaires » impactant la Lodeom et l’augmentation des cotisations sociales pour les agriculteurs.
Dans une interview accordée à la presse quotidienne régionale, Sébastien Lecornu avait assuré que le projet de loi sur la vie chère en Outre-mer « a énormément de valeur » et qu’il était « à l’écoute » pour « renforcer » ce texte. Lors de sa présentation en juillet dernier par Manuel Valls, le texte avait eu un accueil mitigé. Les parlementaires ultramarins regrettant notamment qu’il ait été « vidé de sa substance ».
Audrey Bélim propose en premier lieu « de réintroduire dans le code du commerce une disposition de la loi dite Royer » pour lutter contre les monopoles. « Cette mesure, issue d’un amendement du député réunionnais André Thien Ah Koon, disposait qu’une enseigne ne pouvait posséder plus de 25% des surfaces alimentaires ».
Supprimée par l’abrogation de la loi Royer, « elle serait assurément bénéfique à nos territoires et à nos familles au regard du phénomène de concentration des moyennes et grandes surfaces de distribution » ajoute la sénatrice qui appelle aussi à élargir cette disposition à d’autres secteurs. Disposition qui figure aussi dans la proposition de loi de la députée Béatrice Bellay (PS), qui avait été adoptée à l’Assemblée mais pas inscrite à l’ordre du jour du Sénat.
« De plus, l’article 1er du projet de loi tel que rédigé prévoit la possibilité d’exclure le prix du transport du calcul du seuil de revente à perte » poursuit la sénatrice. « Si cette possibilité apparaît comme le moyen d’abaisser les prix pour les consommateurs de certains produits, notamment de première nécessité, il apparaît qu’elle pourrait engendrer une distorsion de concurrence entre les grandes et les petites entreprises mais également au détriment des produits locaux pour lesquels les frais d’acheminements sont naturellement bien moindre ».
L’article 3 du projet de loi donne capacité au président de l’Observatoire des prix, des marges et des revenus (OPMR) de saisir le préfet « en cas de variations excessives de prix aux fins de fournir en réponse une analyse de la situation au regard de la réglementation prévue ». Pour la sénatrice, cette disposition est « largement insuffisante » et appelle à « doter les OPMR de la personnalité juridique et de moyens qui leur sont propres (locaux, budget, personnel) ».
Audrey Bélim appelle aussi à des sanctions « de nature à être particulièrement dissuasives » pour non-respect « de la transmission obligatoire des montants correspondants aux « marges arrière » à l’autorité administrative chargée de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ».
Concernant l’article 10 relatif à l'autorité de la concurrence, la rédaction actuelle du projet de loi prévoit l’élargissement du collège avec deux nouveaux membres « parmi des personnalités ayant une expertise en matière économique ou en matière de concurrence dans les Outre-mer » ainsi que la création d’un service dédié aux territoires. Si la sénatrice salue « ces deux avancées », « il apparaît nécessaire que le service créé le soit de manière déconcentrée, a minima par bassin, afin que les personnels dédiés puissent être au plus près des réalités, des pratiques commerciales de chacun de nos territoires - chaque économie locale ayant des caractéristiques - et dans un objectif de réactivité et d’efficacité ».
« Il me semble par ailleurs tout à fait essentiel d’ajouter à ce projet de loi des dispositions en faveur de la production locale » ajoute aussi la sénatrice. « Produire nous-même nos biens agricoles ou industriels permet, bien sûr, le développement économique et la création d’emplois au sein de nos territoires mais cela permet aussi de lutter contre la vie chère, en évitant des importations lointaines et coûteuses ».
Comme beaucoup de parlementaires ultramarins, la sénatrice de La Réunion se dit aussi inquiète sur l’avenir de la Lodeom. « Les coupes budgétaires dont ont été victimes la jeunesse, le sport, l’insertion sociale via les missions locales sont à proscrire pour 2026, tout comme s’attaquer à d’autres politiques publiques en crise comme l’est le logement » explique la sénatrice qui souligne aussi « l’augmentation des cotisations sociales pour les agriculteurs ultramarins qui est un vrai sujet d’inquiétude au sein de la profession ».
« Il est évident qu’un projet de loi contre la vie chère, même amélioré par la reprise de nos propositions, ne serait pas suffisant si des reculs sociaux venaient à être votés dans le cadre du budget » poursuit Audrey Bélim qui assure « avoir des propositions » à faire au Premier ministre.