A l'approche de la fin de cette année 2022, le Général Peloux commandant le SMA dresse un premier bilan des actions du SMA en faveur des jeunes Ultramarins au cours de cette année écoulée. Le Général Peloux présente également les objectifs et les perspectives pour 2023.
Outremers 360: Quels ont été pour vous les grands moments de cette année pour le SMA : l’ouverture de la compagnie à Hao? La participation au défilé du 14 juillet sur les Champs-Elysées?
Général Peloux commandant le SMA: Ces événements sont importants puisque, parallèlement à la création à Hao, il y a aussi la création d'une compagnie à Mayotte. À Hao, cela a été un vrai défi dans le temps imparti et compte tenu de la géographie des lieux. Les jeunes sont en place et la formation est en cours. La parole du Président de la République a été respectée.
La deuxième compagnie que nous avons créée, celle de Mayotte à la demande de Monsieur Sébastien Lecornu, précédent ministre des Outre-mer, a aussi été mise en place. C'est un peu compliqué aujourd'hui à Mayotte parce qu'on fait du Tetris avec le régiment dans la mesure où le terrain sur lequel nous souhaitions implanter la compagnie n'est toujours pas prêt . Parallèlement à cela, pour permettre aux jeunes de Mamoudzou de ne pas venir dans le centre de l'île faire les formalités pour entrer au régiment, on a créé une maison du SMA à Mamoudzou. Cela permet de faciliter les aspects liés au recrutement.
Et enfin, la cérémonie du 14 juillet sur les Champs Elysées est venue couronner cette année particulière puisque nous fêtions les 400 ans des troupes de Marine dont le SMA est une composante. C'était l'occasion aussi de faire défiler deux régiments, celui de la Guadeloupe et de la Nouvelle-Calédonie. c'était un trait d'union entre les 60 ans du SMA de l'année dernière et les 400 ans des troupes de Marines.
Outremers 360 : Revenons sur l’ouverture à Hao, pour vous cette emprise a une vocation particulière autour de nouvelles filières de formation, pouvez vous nous en parler plus en détail?
Général Peloux commandant le SMA: D'abord, cette compagnie a été créée le 1ᵉʳ juillet, elle a été inaugurée par les plus hautes autorités du territoire, le Haut-Commissaire, l'Amiral commandant des forces françaises dans le Pacifique et le représentant du gouvernement polynésien, mais également la tavana de Hao qui nous accueille et avec laquelle on a travaillé pour pouvoir faire en sorte que cette compagnie ait une réalité, un an après la décision du président de la République.
Aujourd'hui, vous avez une dizaine de cadres, une quinzaine de volontaires techniciens et environ 20 stagiaires. Ces stagiaires suivent des formations liées à un projet qui est de monter une structure éco-responsable, un écolodge. L'objectif étant que ce dispositif soit transposable dans les îles et atolls des Gambiers. Ce sont donc des formations autour de la production d'énergie à base de solaire, mais aussi la récupération d'eau de pluie ou de production d’eau douce à partir d’eau de mer parce qu'il n'y a pas d'eau naturellement sur cet atoll. C'est ensuite la formation à la gestion des déchets, la production de denrées, en particulier fruits, légumes dans les pays chauds, sur un terroir qui est très peu riche en substrats. Ce sont donc des filières tournées vers l’environnement et l’autosuffisance alimentaire qui sont déployées dans cette compagnie. C'était l'objectif de cette création, ces filières sont déjà à l'œuvre a Hao.
Outremers 360: Une année qui a été aussi marquée par l’arrivée d’un nouveau ministre des Outre-mer sentez-vous une évolution sur les attentes de l'État par rapport au SMA?
Général Peloux commandant le SMA: Je ne crois pas que le changement de portage par rapport à la précédente mandature ait vraiment une importance. On avait un ministre de plein droit, on a aujourd'hui un ministre délégué, mais également un ministre de l'Intérieur et des Outre mer. C'est à mon sens la possibilité d'avoir un double appui.
Outremers 360: Vous revenez d’une visite de commandement en Guyane qu’est ce qui vous a plus marqué dans ce territoire? De nouvelles filières vont-elles voir le jour?
Général Peloux commandant le SMA: J'ai été marqué par le camp du Saint-Laurent du Maroni.C'est la plus grande emprise du service militaire adapté. Elle représente à elle seule 53 % de la surface des RSMA. La construction un peu particulière donne un attrait tout particulier à cet environnement. C'est aussi la proximité avec une entité des Armées puisque nous sommes localisés avec la base opérationnelle avancée du 9ème RIMA avec lequel on partage beaucoup de choses.
Il n'y aura pas de création ex-nihilo de nouvelles compagnies, puisqu'aujourd'hui nous avons la structure nécessaire pour accueillir plus de jeunes guyanais. On estime aujourd'hui avec une population ayant un solde de plus de 3 % que nous allons accueillir à terme de l'ordre de 950 bénéficiaires, contre 620 aujourd'hui. Cela passera par la densification d'un certain nombre de filières professionnelles mais aussi de création de nouvelles filières professionnelles ou d'augmentation du nombre de filières professionnelles.
Deux exemples : la première est que l'on forme des agents de prévention et de sécurité. Aujourd'hui, ce sont deux filières représentant une quarantaine de jeunes par an qui vont à l'emploi, dans les domaines de la sécurité. Le territoire a des besoins avérés. Une troisième filière sera créée à l'été prochain. Deuxième exemple, nous avons une structure particulière qui est une filière multi-techniques à destination des peuples du fleuve et en particulier toute la population amérindienne. Aujourd'hui, on va doubler cette filière multi-techniques avec des Akulu, une des deux ethnies des Bushinengués, car ils sont très éloignés eux aussi des centres de formation. Il est de notre devoir de pouvoir mieux les accueillir.
Outremers 360 :Vous partez cette semaine pour La Réunion où se trouve le plus important des régiments du SMA, quelles sont vos attentes ?
Général Peloux commandant le SMA : Je connais bien le régiment pour y avoir été déjà il y a un an. Les attentes sont celles d'un général lorsqu'il va en visite de commandement. C'est d'abord de voir les cadres et les familles, mais également les partenaires et les volontaires. Les volontaires sont le pétrole de notre dispositif. Sans volontaires, on ne fait pas de formation professionnelle. Sans jeunes formés, on ne peut faire de l'insertion. Il s'agit de l'un des premiers objectifs. Le deuxième, c'est de rencontrer les partenaires. Ils sont ceux avec lesquels nous travaillons au quotidien au profit de la jeunesse réunionnaise. En fonction de la dynamique du territoire, nous avons vocation annuellement à repenser notre dispositif, il s'agit éventuellement de proposer ou de voir ce que pourraient être les nouvelles filières professionnelles que nous serions amenées à créer pour répondre à un besoin spécifique sur le département.
Outremers 360: 2023 sera une année de transition ou d’évolution pour le SMA ?
Général Peloux commandant le SMA : Je ne pense pas que 2023 puisse être une année de transition. Elle sera une année d'évolution. Un de mes anté-prédécesseurs, le Général Frétille m'avait dit lors de mon arrivée au SMA comme chef de corps: « Le SMA, c'est comme une Formule 1. Ce sont les petits réglages fins qui vont lui permettre de poursuivre sa route et de performer. Alors qu'un changement majeur pourrait rendre tous les efforts préalables inutiles et aller dans le mur». Donc on va faire évoluer petit à petit le dispositif. L'objectif est donc de mieux répondre aux besoins des territoires, d'accueillir plus de jeunes bénéficiaires. Si aujourd'hui nous accueillons 6000 jeunes bénéficiaires, l'année prochaine, ce sera 6200. Il va falloir s'adapter, s'ouvrir à d'autres publics aussi, et en particulier dans le cadre du plan SMA Horizon 2030, un certain nombre d'expérimentations sont en cours. Typiquement, à La Réunion, vous avez aujourd'hui un accueil à destination de mères célibataires. L'objectif est de voir s'il est pertinent sur un territoire, si c’est le cas il s’agit alors de le généraliser pour accueillir plus de jeunes filles lesquelles sont mères avec des enfants que les parents ou les grands parents ne peuvent pas forcément garder à la maison.
Outremers 360: Le budget consacré au SMA a été annoncé en hausse pour l’année 2023 cela aura quoi comme conséquence? Un élargissement des jeunes bénéficiaires? De nouvelles filières?
Général Peloux commandant le SMA : Dans l'augmentation du budget, il y a plusieurs aspects : vous avez la partie fonctionnement et la partie investissement. Concernant le traitement et les salaires, nous devons rester sur 17 à 18 % d'encadrants dans nos régiments, mais l'augmentation des bénéficiaires s'accompagne aussi naturellement de l'augmentation de cadres, de militaires et de personnels civils. Une partie de cette augmentation revient à l'augmentation de la masse salariale. On ne sera pas mieux payé, mais on doit payer plus de monde.
Deuxième point sur l'investissement. La création des deux nouvelles compagnies en Polynésie et à Mayotte, témoigne de cet investissement. La construction des bâtiments nécessaires au bon fonctionnement de ces unités nécessite de l'argent. C'est à peu près 6 millions d'euros pour l'un et 6 millions d'euros pour l'autre. Cela représente un montant de 12 millions.
Le fonctionnement représente également un coût important à l'instar de la compagnie de Hao, compagnie isolée de plus de 1000 kilomètres de Papeete.
Globalement cette augmentation est dans la suite logique de ce qui a été voulu par le ministre Sébastien Lecornu et le Président de la République. Une partie de ce budget vient aussi compenser l'augmentation de la masse salariale avec une rallonge supplémentaire de 3 % pour l'ensemble des traitements et salaires.
Outremers 360: En 2022 vous avez ouvert avec succès l’emprise de Hao de nouvelles implantations sont elles prévues en 2023? Si oui où?
Général Peloux commandant le SMA : Je ne pense pas qu'on créera de nouvelles compagnies. Les armées aujourd'hui sont dans une phase où elles auront du mal à donner plus de cadres, au regard des tensions aux portes de l'Europe. S'il fallait que nous ouvrions d'autres unités ce serait compliqué.
En Guyane,nous disposons de la structure nécessaire pour accueillir plus de bénéficiaires sans être obligé d'avoir plus de cadres. Dans le Pacifique, le régiment de Nouvelle-Calédonie est stable sur ses effectifs. Il n'y a pas de demandes d'augmentation du nombre de bénéficiaires, par conséquent la création d'une nouvelle compagnie n'est pas à l'ordre du jour. On ne devrait pas avoir de création à l'horizon 2023.
Outremers 360: Quels sont aujourd’hui les principaux freins au recrutement des jeunes volontaires?
Général Peloux commandant le SMA : Le premier des freins est le manque de coordination des politiques publiques. Très clairement, aujourd'hui, au moins sur les départements, les régiments et les cellules recrutement qui vont chercher les jeunes sont confrontés à des difficultés parce que des dispositifs comme le CEJ viennent directement concurrencer l'offre du SMA. Pour pallier ce problème, on a réussi dans les négociations budgétaires à obtenir un complément de budget qui va permettre de mettre le traitement des jeunes au niveau du CEJ.
Et après, il y a un sujet qui est récurrent mais qui est vrai également dans l'Hexagone, c'est l'obligation vaccinale. Mais aujourd'hui, alors même que c'était très difficile aux Antilles en début d'année, je constate qu'en Guadeloupe en particulier, les jeunes se présentent au régiment malgré l'obligation vaccinale et font le pas de se faire vacciner.
Outremers 360: Allez-vous continuer à étendre les dispositifs d’accueil pour les mamans solos dans les régiments ?
Général Peloux commandant le SMA : Cela fait partie des objectifs recherchés. Le plan SMA horizon 2030 est bien de se projeter dans l'avenir, avec la période nécessaire à la construction puisqu'on ne construit pas d'un claquement de doigts, mais surtout nous permet de tirer tous les enseignements de chacune des neuf expérimentations qui ont été imaginées et les multiplier dans les autres territoires. Aujourd'hui, vous avez Mayotte qui avait eu la charge de la formation Travaux publics avec les simulateurs de conduite. Les résultats sont probants, cet outil sera généralisé durant l'année 2023. Les autres projets comme celui des jeunes mères célibataires que vous évoquez fonctionne bien aujourd'hui à la Réunion. Nous attendons les résultats des appels d'offres qui ont été faits en Guadeloupe pour la aussi créer un bâtiment à la sortie du régiment qui va permettre d'accueillir des jeunes mères isolées à partir de 2025. Donc oui, les projets qui sont conduits aujourd'hui vont naturellement se déployer à l'horizon 2025 -2027.
Outremers 360 : Un dernier message pour vos cadres, vos bénéficiaires ?
Général Peloux commandant le SMA : A chaque fois que je me déplace dans les régiments, très clairement, j'ai un mot devant l'ensemble des troupes rassemblées parce qu'il me paraît important, de m’adresser aux cadres et aux volontaires. Mais mon discours va plutôt aux volontaires. Les cadres sont dans leur mission particulière, un peu éloignées de celles qu'ils avaient préalablement dans l'Hexagone. J’attache une grande importance à féliciter les jeunes stagiaires qui ont fait la démarche volontaire de venir dans le régiment, de suivre une formation professionnelle et de mettre tous les atouts de leur côté pour réussir leur formation, leur permis de conduire et aller à l'emploi. Donc, je dirais que s'engager dans les régiments du service militaire adapté, c'est aller à la réussite, c'est réussir.