Territoriales 2023 en Polynésie : Sept listes déposées, vers un duel entre le président sortant Édouard Fritch et l’indépendantiste Oscar Temaru

Les listes et partis en lice pour les territoriales 2023 en Polynésie (de haut en bas et de gauche à droite) : le Tapura Huira'atira d'Édouard Fritch (photo Tapura Huira'atira), le Tavini Huira'atira d'Oscar Temaru avec Moetai Brotherson à la tribune (photo Radio 1 Tahiti), le Amuitahira'a de Gaston Flosse (Radio 1 Tahiti), A Here Ia Porinetia de Nicole Sanquer et Nuihau Laurey (photo A Here Ia Porinetia), le Ia Ora Te Nuna'a de Teva Rohfritsch et Nicole Bouteau (photo Ia Ora Te Nuna'a), le Hau Ma'ohi de Ta

Territoriales 2023 en Polynésie : Sept listes déposées, vers un duel entre le président sortant Édouard Fritch et l’indépendantiste Oscar Temaru

Sept partis politiques ont déposé leurs listes pour les élections territoriales d'avril en Polynésie française, où les indépendantistes peuvent espérer battre le président autonomiste sortant Édouard Fritch, après leur victoire historique aux Législatives.

Parmi les listes enregistrées par le Haut-Commissariat de la République lundi, date limite pour les déposer, seules deux ont de réelles chances de remporter ces élections, car les partis qui les portent sont bien implantés dans les cinq archipels polynésiens : les autonomistes du Tapura, parti fondé par le président sortant Édouard Fritch, et les indépendantistes du Tavini d’Oscar Temaru.

Le Tapura compte sur son bilan économique et sur l'influent soutien de 42 maires sur 48 communes polynésiennes pour maintenir Édouard Fritch (71 ans) au pouvoir. Ce dernier a eu la confirmation par le Conseil d’État qu’il pouvait diriger une 3ème fois l’exécutif local, malgré la limitation à deux mandats. En effet, le Conseil d’État a souligné que le président sortant n’avait pas fait un premier mandat complet, arrivé au pouvoir suite à une condamnation à l’inéligibilité de son ex-mentor, Gaston Flosse. 

Le samedi 11 mars, le parti d’Édouard Fritch, proche de la majorité présidentielle, a réuni près de 5 000 sympathisants à Papeete, lors de son Congrès. L’occasion entre autres de présenter les grandes lignes du programme, organiser en cinq « piliers » :  construire une société équitable, soutenir la jeunesse, les entreprises et les associations, améliorer le vivre-ensemble, renforcer les autonomies alimentaire et énergétique et protéger l’environnement, et soutenir équitablement les archipels. L’actuel président mise aussi pour cette campagne sur la lutte contre la vie chère.

En face, en plus de son électorat traditionnel, le Tavini, lui, mise sur la contestation grandissante face aux autorités depuis l'épidémie de Covid-19 et les confinements. Cette contestation a débouché sur une victoire historique des indépendantistes aux dernières législatives : ils ont obtenu les trois sièges de députés, face à trois candidats du Tapura. Ce samedi, le Congrès du parti a réuni près de 3 000 militants et sympathisants, dans le fief des indépendantistes, la commune de Faa’a.

Le Tavini prône le renouvellement des élus et porte un projet de société ayant comme ligne de mire la pleine souveraineté de la Polynésie. Mais le parti met aussi en avant un programme axé sur l’assainissement des institutions, sur le développement, et sur la justice sociale et fiscale, rapporte nos partenaires de Radio 1 Tahiti. La tête de liste est actuellement Oscar Temaru, leader depuis la création du parti en 1977. Mais en cas de victoire, le président de la Polynésie française serait Moetai Brotherson, député (GDR-Nupes) de 53 ans, suffisamment modéré pour séduire au-delà de l'électorat indépendantiste. 

L'ancien président de Polynésie Gaston Flosse, 91 ans voulait se présenter une nouvelle fois, mais il est inéligible et porte la candidature d'un proche, Bruno Sandras, ancien député et ancien maire. Gaston Flosse a en outre dérouté ses électeurs en devenant souverainiste, après avoir défendu l'autonomie pendant quatre décennies. Lors d’un Grand conseil samedi à Papeete, l’ancien président et sa tête de liste Bruno Sandras ont développé le programme du Amuitahira’a o te Nuna’a Ma’ohi, anciennement Tahoera Huira’atira.

Ils annoncent notamment la suppression de la contestée TVA Sociale, source de difficultés politiques pour Édouard Fritch, remplacé par un « impôt sur le dos des grosses sociétés » et un « impôt sur l’évasion fiscale ». Thème d’actualité : le parti entend également revenir à un départ à la retraite, compétence de la Collectivité hors fonctionnaires d’État, à l’âge de 60 ans. Bruno Sandras veut aussi miser sur le vote nostalgique « des années Flosse ». « Il va y avoir un facteur X, qui s’appelle le vote nostalgique », estime-t-il. Les Polynésiens « vivent dans une situation difficile » et « le disent : ce n’était quand même pas pareil à l’époque de Gaston Flosse ».

Quatre autres partis politiques ont déposé leur liste. D’abord le A Here Ia Porinetia, créé par l’ancienne députée Nicole Sanquer et l’ancien sénateur Nuihau Laurey, tous deux partis du Tapura d’Édouard Fritch sur fond de désaccord. Désaccord également pour Teva Rohfritsch et Nicole Bouteau : ces deux anciens proches du président sortant ont créé eux aussi leur propre parti, troisième de la mouvance autonomiste.

On compte aussi dans la bataille Tauhiti Nena et le Hau Ma’ohi. Ancien boxeur, ancien cadre du parti indépendantiste, à quelques occasions défendu par Gaston Flosse, son soutien à Éric Zemmour en 2022 est apparu contradictoire avec son message politique prônant l’État associé. Enfin, le parti écologiste Heiura-Les Verts, qui s’était de 2004 à 2013 allié aux indépendantistes, fera route seul pour ce scrutin.

Le président de la collectivité n'est pas élu au suffrage universel direct : les Polynésiens élisent pour cinq ans leurs 57 représentants à l'Assemblée de la Polynésie française, qui élit à son tour le président. La liste qui remporte les élections dispose d'une forte prime majoritaire à l'Assemblée, pour éviter de renouveler l'instabilité politique des années 2000. Il faut obtenir au moins 12,5% des suffrages exprimés pour se qualifier. Un seuil très difficile à atteindre pour les nouvelles formations ou pour les écologistes. Le premier tour du scrutin aura lieu le 16 avril, et le second tour le 30 avril. 

Avec AFP et Radio 1 Tahiti

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