L'Australie va fixer à 16 ans l'âge à partir duquel les mineurs pourront accéder aux réseaux sociaux, a déclaré jeudi 7 novembre le premier ministre Anthony Albanese, qui s'est engagé à sévir contre les entreprises technologiques qui ne protègent pas les jeunes utilisateurs.
« C'est (une mesure) pour les mères et les pères. Les réseaux sociaux font beaucoup de mal aux enfants et j'ai décidé d'y mettre un terme », a-t-il déclaré aux journalistes. Albanese avait annoncé en septembre une future législation en ce sens, mais il n'avait pas été tranché à l'époque si elle s'appliquerait à partir de 14 ou de 16 ans.
Les géants de la technologie et les plateformes de réseaux sociaux auront la responsabilité de s'assurer que les utilisateurs ont l'âge requis, a souligné Anthony Albanese, plutôt que les parents qui « se font un sang d'encre pour la sécurité de leurs enfants en ligne ». « La responsabilité n'incombera pas aux parents ou aux jeunes. Il n'y aura pas de sanctions pour les utilisateurs », a-t-il précisé.
Des propositions antérieures visant à introduire une limite d'âge pour les réseaux sociaux ont bénéficié d'un large soutien bipartisan en Australie. Anthony Albanese, un travailliste, a fait savoir que les nouvelles lois seraient présentées aux dirigeants des États et territoires australiens cette semaine, avant d'être soumises au Parlement fin novembre. Une proposition antérieure visant à introduire une limite d'âge pour les réseaux sociaux avait bénéficié d'un large soutien de part et d'autre de l'échiquier politique australien.
Les plateformes bénéficieront d'un délai d'un an pour se préparer. Meta, la société-mère d'Instagram et Facebook, a déclaré qu'elle appliquerait « toute limite d'âge » que le gouvernement australien « souhaiterait introduire ». Mais Antigone Davis, responsable sécurité globale chez le géant technologique, a déclaré que l'Australie devrait réfléchir attentivement à la manière dont ces restrictions seront mises en œuvre.
Anthony Albanese a souligné que les algorithmes des réseaux sociaux présentaient des contenus inappropriés aux enfants et adolescents. « J'ai des choses qui apparaissent sur mon (téléphone) que je ne veux pas voir. (Imaginez) un enfant vulnérable de 14 ans », a déclaré le chef du gouvernement. « Des jeunes femmes voient des images de morphologies spécifiques qui ont un vrai impact », a-t-il ajouté. Des experts ont toutefois mis en doute la faisabilité technique d'une telle mesure.
« Nous savons déjà que les méthodes actuelles de vérification de l'âge ne sont pas fiables, sont trop faciles à contourner ou présentent des risques pour la vie privée des utilisateurs », a observé Toby Murray, chercheur à l'université de Melbourne. En septembre, Canberra a présenté un projet de loi visant à combattre la désinformation. Le texte prévoit notamment d'infliger aux géants de la technologie des amendes pouvant aller jusqu'à 5% de leur chiffre d'affaires annuel en cas de non-respect de leurs obligations en matière de lutte contre la désinformation.
Le réseau social d'Elon Musk, X, est par ailleurs engagé dans une bataille juridique face au régulateur australien d'internet quant à sa modération des publications violentes. La mesure d'âge minimum sur les réseaux sociaux est « véritablement à la pointe dans le monde », a salué pour sa part la ministre des Communications Michelle Rowland, selon qui les plateformes « n'ont pas été à la hauteur ». « Les entreprises de réseaux sociaux ont été informées » et des pénalités financières leur seront infligées en cas de manquement à leurs obligations, a-t-elle indiqué mercredi lors d'un point presse.
Plusieurs pays et territoires ont décidé d'imposer un âge minimum pour accéder aux plateformes. Dans l'État américain de Floride, une loi doit entrer en vigueur en janvier pour interdire l'ouverture d'un compte aux moins de 14 ans. L'Espagne a voté en juin une loi interdisant l'accès des moins de 16 ans. Dans ces deux cas, la méthode de vérification d'âge n'a toutefois pas encore été déterminée. En France, une loi votée en 2023 qui a instauré une « majorité numérique » à 15 ans n'est pas encore entrée en vigueur, dans l'attente d'une réponse de la Commission européenne sur sa conformité au droit européen. Emmanuel Macron s'est même prononcé pour l'interdiction du téléphone « avant 11 ans ».
La Chine, qui restreint l'accès pour les mineurs depuis 2021, exige, elle, l'identification via un document d'identité. Les moins de 14 ans ne peuvent passer plus de 40 minutes par jour sur Douyin, la version chinoise de TikTok, et le temps de jeu en ligne des enfants et adolescents est limité.
Avec AFP